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Législatives : les endroits où ça coince

Si le duel entre François Fillon et Rachida Dati à Paris cristallise l'attention des médias, de nombreuses circonscriptions donnent lieu à de joyeux affrontements.

Article rédigé par Bastien Hugues
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 11min
Rachida Dati (UMP), François Fillon (UMP), Ségolène Royal (PS), Jack Lang (PS) et Cécile Duflot (EELV). Cinq personnalités dont les candidatures suscitent quelques grincements dans les circonscriptions concernées. (AFP PHOTO / MONTAGE FTVI)

C'est à un joyeux casse-tête que les QG des partis politiques s'adonnent ces jours-ci : éviter la cacophonie dans les circonscriptions où plusieurs candidats prétendent à l'investiture, en essayant de satisfaire le plus grand nombre. A l'approche du dépôt des candidatures - 21 novembre pour le PS et Europe Ecologie-Les Verts (EELV), 31 décembre pour l'UMP -, FTVi fait le point sur les principaux points de blocage.

• Rachida Dati, victime du parachutage de François Fillon à Paris

Maire du septième arrondissement de Paris depuis mars 2008, Rachida Dati pensait qu'un siège à l'Assemblée nationale constituerait une bonne rampe de lancement pour la conquête de la mairie de Paris, que Bertrand Delanoë quittera en 2014.

C'était compter sans François Fillon, qui a officialisé mi-octobre son intention d'être candidat dans la deuxième circonscription, celle que vise l'ex-ministre de la Justice. Depuis, Rachida Dati n'a de cesse de brocarder le Premier ministre dans les médias. Entre les deux, le pompier Jean-François Copé tente d'éteindre l'incendie. Mais Dati n'a pas l'intention de lâcher le morceau : "Je serai quoi qu'il arrive candidate", a-t-elle promis sur Canal+. Quitte à entrer en dissidence de l'UMP et à défier Fillon ?

• Ségolène Royal imposée par le PS à La Rochelle

Patron de la fédération socialiste de Charente-Maritime, Olivier Falorni pensait lui aussi s'imposer naturellement à La Rochelle, où Maxime Bono cède son siège l'an prochain. Mais Ségolène Royal, qui aimerait présider l'Assemblée nationale en cas de victoire de la gauche aux législatives, a décidé d'y poser ses valises.

Pour lui faciliter la tâche, la commission électorale du PS a décidé de réserver à une femme la première circonscription du département, en dépit d'une motion adoptée par les militants locaux. Royal pourrait donc affronter une concurrente dans le cadre d'une éventuelle primaire, mais pas un concurrent. Falorni ne décolère pas. Il dénonce "un parachutage de confort (...), pathétique et insupportable".

• Cécile Duflot face à une levée de boucliers socialistes à Paris

L'arrivée de Cécile Duflot dans la sixième circonscription de Paris au détriment d'une candidature socialiste, confirmée mardi 15 novembre, donne lieu à une véritable levée de boucliers.

A l'issue d'un bureau national du PS, mardi, le maire de Paris, Bertrand Delanoë, a laissé exploser sa colère à l'égard de ce "parachutage".  "Ils me prennent vraiment pour un con, ils se foutent de ma gueule", a-t-il lancé dans la cour de Solférino, selon un témoin cité par l'Agence France Presse. Car Cécile Duflot, même si elle se dit concentrée sur 2012, pense surtout aux municipales de 2014, et à la succession de Delanoë. 

Un adjoint au maire de Paris, cité par Rue89 sous couvert d'anonymat, lançait il y a quelques jours : "Elle nous prend pour des cons. (...) Si elle croit qu'on va lui chauffer la place de maire, elle se met un doigt dans l'œil. Elle nous fait déjà assez chier au conseil régional ; à Paris elle nous mettra un fusil sur la tempe toutes les cinq minutes, c'est non."

• Jack Lang contesté sur ses terres boulonnaises

L'ancien ministre de la Culture, 68 ans, n'est pas seulement contesté par Arnaud Montebourg, qui aimerait limiter à 67 ans l'âge maximal pour se présenter aux législatives. Sur ses terres - il est élu dans la sixième circonscription du Pas-de-Calais depuis 2002 -, Jack Lang est aussi remis en cause.

Son suppléant, le vice-président du conseil général Hervé Poher, a déclaré dès la mi-octobre sa candidature à l'investiture socialiste. Contactée par FTVi, l'adjointe au maire de Boulogne-sur-Mer Brigitte Bourguignon confirme également sa candidature. Secrétaire nationale du PS en charge des sports, cette proche de Martine Aubry estime que "ces derniers mois, Jack Lang a oublié la dimension locale de son mandat".

Joint par FTVi, Jack Lang confirme pourtant qu'il est bel et bien candidat à sa succession dans le Boulonnais. Mais coupe court à la conversation lorsqu'on évoque ses concurrents. "Je respecterai ce que le parti décidera", balaye-t-il. Jack Lang serait toutefois en mauvaise posture : comme à La Rochelle, le PS pourrait décréter, au nom de la parité, que cette circonscription est réservée à une femme. "Il est dans la mouise", résume un secrétaire national du parti.

Le bureau national du PS, qui devait se pencher sur ce cas mardi 15 novembre, a finalement reporté sa décision au mardi 22.

• Dominique Paillé doublé par Marie-Anne Montchamp dans le Benelux

Les nouvelles circonscriptions des Français de l'étranger attisent les convoitises. Dans la quatrième, celle du Benelux (Belgique-Luxembourg-Pays-Bas), l'ancien porte-parole de l'UMP et proche de Jean-Louis Borloo, Dominique Paillé, prépare sa venue de longue date. "Je suis installé à Bruxelles, j'y ai mon cabinet d'avocats et mon domicile depuis un an et demi", fait-il valoir. Il espérait secrètement que l'UMP lui fasse cadeau de cette circonscription. 

Mais voilà, l'ancien député des Deux-Sèvres de 1993 à 2007 a vu son avenir s'assombrir lorsqu'il a appris que Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat auprès de la ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale, avait les faveurs de l'UMP pour s'y présenter l'an prochain. Elle a effectué de nombreux déplacements en Belgique, au Luxembourg et aux Pays-Bas ces derniers mois. Contactée par FTVi, elle confirme sa candidature : "Je m'y suis préparée depuis plusieurs mois. Quant à Dominique Paillé, je l'apprécie beaucoup, mais depuis qu'il est au Parti radical, il n'est plus dans la sphère UMP !"

L'intéressé, lui, se borne à dénoncer "un parachutage total" de celle qui a été élue en 2007 dans le Val-de-Marne, dans une circonscription qui sera totalement redécoupée l'an prochain. Pas de quoi le décourager : "Les électeurs décideront au premier tour."

• Elisabeth Guigou face aux déménagements PS en Seine-Saint-Denis

En Seine-Saint-Denis, le nouveau découpage de la carte électorale donne lieu à quelques déménagements pour essayer de satisfaire tout le monde. Le député PS Claude Bartolone, élu dans la sixième circonscription, vise désormais la neuvième. Elisabeth Guigou, du coup, aimerait se présenter dans la sixième.

Sauf que la nouvelle sixième circonscription comprendra un bout de l'actuelle troisième, détenue par Daniel Goldberg, qui compte se représenter. "J'ai beaucoup de respect pour Elisabeth Guigou, mais Aubervilliers-Pantin n'est pas sa circonscription. Moi je milite ici depuis trente ans", peste-t-il dans L'Express. Et pour ne rien arranger, une jeune conseillère municipale d'Aubervilliers, Mounia Harkati, est aussi candidate.

• Deux lieutenants d'Aubry et Hollande se disputent le Maghreb

Secrétaire national du PS chargé de la coopération, Pouria Amirshahi se dit partagé entre "agacement" et "sérénité". Candidat à l'investiture dans la neuvième circonscription des Français de l'étranger (qui comprend notamment l'Algérie, le Maroc, la Tunisie, le Sénégal et la Côte-d'Ivoire), ce proche de Martine Aubry a appris il y a quelques jours qu'il n'était pas le seul sur les rangs. 

Le Franco-Algérien Faouzi Lamdaoui, qui compte parmi les lieutenants de François Hollande, a également décidé de briguer l'investiture, a révélé Le Parisien le 6 novembre. "Tous les amis de François sont derrière Faouzi", assure le député André Vallini. "On défendra Faouzi jusqu’au bout", prévient également le bras droit d'Hollande, Stéphane Le Foll.

Dans Charente Libre, Amirshahi, d'origine iranienne, déplore "une manipulation grossière". Le bureau national du PS devrait trancher mardi 22 novembre.

• L'UMP Brigitte Barèges face à un proche de Bourgi dans le Tarn-et-Garonne

Dans le Tarn-et-Garonne, l'UMP aimerait bien ravir la deuxième circonscription à la radicale de gauche Sylvia Pinel, élue en 2007 avec moins de 51 % des voix. L'un des prétendants s'appelle Nicolas Pompigne-Mognard. Directeur du groupe de presse Le Petit Journal, ce Franco-Gabonais de 36 ans est aussi un proche de l'avocat Robert Bourgi, qui a révélé l'affaire des mallettes.

Un candidat dont la députée-maire de Montauban et patronne de l'UMP dans le département, Brigitte Barèges, ne veut pas, selon La Dépêche du Midi. Le contentieux remonterait à la campagne des régionales, en 2010, alors que Brigitte Barèges souhaitait qu'il figure en cinquième place de la liste départementale UMP. "Je ne serai pas le bon Nègre de ses listes", avait fulminé Nicolas Pompigne-Mognard, avant d'obtenir la troisième place. Son score aux cantonales en mars - il a été éliminé dès le premier tour avec 8,02 % des voix face à Jean-Michel Baylet, élu avec 57,91 % - n'a sans doute rien arrangé.

Aujourd'hui, il assure que les affirmations de La Dépêche sont fantaisistes, et dénonce "une manœuvre" du journal détenu par le président du Parti radical de gauche, Jean-Michel Baylet. Sa note de blog du 23 janvier 2010, dans laquelle il écrivait que Brigitte Barèges avait "conduit l'UMP droit dans le mur", a, elle, discrètement disparu.  
 



Calendrier.
Ces bisbilles devraient être tranchées dans les prochains jours par les partis. Rue de Solférino, les candidatures doivent être déposées entre le vendredi 18 et le lundi 21 novembre, et les militants socialistes seront appelés à voter dans leurs circonscriptions le 1er décembre. Chez les Verts, les candidatures doivent également être déposées au plus tard ce week-end. Elles seront soumises à la validation des militants "aux environs du 3 décembre". Quant à l'UMP, la première commission d'investiture s'est tenue lundi 14 novembre, et d'autres réunions examineront les candidatures jusqu'au 31 décembre. 

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