Fusillade à Poitiers : la maire de la ville exprime "sa colère" après les propos du ministre de l'Intérieur et lui demande de "rétablir la vérité"

Léonore Moncond'huy estime que les propos de Bruno Retailleau ont servi "à une instrumentalisation" de l'image de sa ville.
Article rédigé par franceinfo
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La maire écologiste de Poitiers, Léonore Moncond'huy, le 7 décembre 2020. (JOEL SAGET / AFP)

La maire écologiste de Poitiers, Léonore Moncond'huy, exprime "sa colère" après les propos du ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau et lui demande de "rétablir la vérité", après la fusillade qui a éclaté dans la nuit du jeudi 31 octobre au vendredi 1er novembre et qui a fait un mort et quatre blessés. Elle était l'invitée de France Bleu Poitou lundi 4 novembre.

"Pas besoin d'en rajouter"

Le ministre de l'Intérieur a d'abord expliqué qu’une rixe avait mobilisé "400 à 600 personnes", alors que "40 à 60 personnes" étaient présentes sur place, selon une source policière. "Le ministre a commis une faute et lorsqu’on porte la parole publique et a fortiori la parole d’un gouvernement, on doit être extrêmement prudent quant aux informations sur lesquelles on s’appuie", tacle la maire de Poitiers. Selon elle, "l’événement était suffisamment tragique en soi, il n’y avait pas besoin d’en rajouter avec des rixes, des bandes et ça ne correspondait en rien à la réalité du quartier, à la réalité de notre ville".

Ces fausses informations ont servi à une "instrumentalisation de l’image d’un quartier et de l’image de notre ville, au service d’un discours alarmiste, populiste, et c’est extrêmement grave", ajoute l'élue. La maire de Poitiers a également rencontré la famille d’Anis, l'adolescent de 15 ans tué dans la fusillade, "très marquée par le traitement médiatique national de l’affaire et qui a peur que la mémoire de son enfant soit salie". "Un jeune, parce qu’il habite dans un quartier, est forcément coupable, regrette l'élue. Là ce n’est absolument pas le cas, il n’avait rien fait, il se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment". Les quatre autres jeunes blessés sont "sortis de l’hôpital, mais il y a les blessures physiques et puis les blessures psychologiques qu’il faudra accompagner dans les prochains jours, dans les prochaines semaines", prédit-elle.

Appel à un rectificatif du ministre

Léonore Moncond'huy "souhaite que le ministre infirme, rectifie, les propos qu’il a tenus au matin de la fusillade, qu’il rétablisse la vérité". Les mots du ministre de l'Intérieur ont entretenu "des amalgames inacceptables" qui "contribuent de fait à nourrir les amalgames entre la jeunesse des quartiers dans leur ensemble et les trafiquants. C’est inacceptable", ajoute l'édile. Léonore Moncond'huy "reste prudente sur les sources du ministre", "néanmoins il est évident que pendant toute la séquence, "ça a nourri un discours de politique extrêmement sécuritaire et qui est basé sur la peur, pour faire peur aux gens", déplore-t-elle.

Selon le ministre de l'Intérieur, le niveau des narcotrafics a atteint "un point de bascule". Sans une mobilisation générale de l’État et de la société, ce sera "la mexicanisation du pays", a-t-il prévenu. "Mexicanisation de la société, ça renvoie à une société gangrenée, où il n’y a plus d’Etat de droits, avec des élus locaux corrompus, l’administration corrompue, ce qui ne correspond absolument en rien à ce que nous connaissons à Poitiers", poursuit la maire.

Enfin la maire de Poitiers a annoncé la réouverture dans les prochaines semaines du commissariat des Couronneries, quartier où a eu lieu la fusillade : "j’ai eu la confirmation du préfet que les travaux commenceront dans les prochaines semaines".

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