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Rentrée scolaire 2023 : trois questions sur la formation "dès l'après-bac" pour devenir enseignant proposée par Emmanuel Macron

Le président de la République souhaite revenir au modèle des écoles normales. Le Snes-FSU et le SE-Unsa dénoncent notamment une "vision très passéiste" et un moyen de baisser le salaire des enseignants.
Article rédigé par franceinfo
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Une enseignante dans une école primaire à Paris, le 19 août 2022. (MAGALI COHEN / HANS LUCAS / AFP)

Aussitôt bachelier, aussitôt professeur ? Emmanuel Macron veut "une formation dès l'après-bac" pour les enseignants, afin de former plus tôt les jeunes intéressés par ce métier. En déplacement dans un lycée professionnel à Orange (Vaucluse), vendredi 1er septembre, le président de la République a annoncé avoir demandé au ministre de l'Education nationale, Gabriel Attal, de travailler sur une réforme de la formation des enseignants.

Cette formation "professionnalisante, plus visible, va permettre de mieux planifier nos besoins", a déclaré le chef de l'Etat. L'Education nationale fait face à une pénurie de candidats aux concours de l'enseignement. En changeant le dispositif, Emmanuel Macron espère susciter à nouveau des vocations. Le projet présidentiel est accueilli par hostilité par la plupart du monde enseignant. Franceinfo revient sur le sujet en trois questions.

A quel niveau sont recrutés les enseignants ?

Depuis 2008, les professeurs, qu'ils enseignent en maternelle ou en lycée, doivent détenir un master pour se présenter aux concours. Les professeurs des écoles, en maternelle et en primaire, doivent passer le concours de recrutement de professeurs des écoles. Les professeurs en collège et en lycée doivent eux avoir réussi le concours du certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré (Capes).

Le ministère de l'Education conseille de suivre un master de l'enseignement, de l'éducation et de la formation, pour se préparer aux concours de l'enseignement, mais ce n'est pas obligatoire. Pour ceux qui souhaitent devenir professeur des écoles, avant de suivre un master, les aspirants peuvent suivre un parcours en alternance dès la première année de licence, dans le parcours préparatoire au professorat des écoles.

Une fois admis aux concours, les candidats sont considérés comme des professeurs stagiaires. Ils sont évalués au terme de leur première année d'enseignement avant d'être titularisés ou non.

Pourquoi le gouvernement veut-il former les enseignants juste après le bac ? 

"Il faut qu'on puisse permettre à nos jeunes bacheliers et bachelières qui veulent aller vers ce beau métier d'être formés aux savoirs fondamentaux nécessaires au métier d'enseignant dès l'après-bac", affirme Emmanuel Macron. Selon le chef de l'Etat, "en recrutant post-bac, on donne de la visibilité" à ces étudiants, "on les accompagne".

Il souhaite revenir à un modèle de formation "qui est un peu celui des écoles normales", lesquels existaient jusqu'à la création des IUFM (instituts universitaires de formation des maîtres) au début des années 1990. Emmanuel Macron regrette en effet que des professeurs soient surqualifiés : "Certains de nos enseignants rentrent après un cursus universitaire qui est totalement disproportionné et parfois décorrélé avec ce qu'ils vont faire."

Abaisser le niveau de formation requis pour passer les concours de l'enseignement n'est pas une nouvelle proposition du gouvernement. Déjà en 2018, Jean-Michel Blanquer, alors ministre de l'Education, proposait de "prérecruter" les professeurs dès bac +3. Une proposition renouvelée par son successeur, Pap Ndiaye, dans un entretien au journal Le Monde, le 29 juin.

Pourquoi les syndicats d'enseignants y sont-ils défavorables ?

Les syndicats d'enseignants sont pour la plupart opposés à cette proposition. "Baisser le niveau de recrutement va conduire à moins payer" les enseignants, a dénoncé samedi Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, le syndicat majoritaire du second degré. Pour la professeure de sciences économiques et sociales, "Emmanuel Macron a réussi ce tour de force de proposer quelque chose qui va encore diminuer l'attractivité de nos métiers alors qu'on a du mal à recruter".

Elisabeth Allain-Moreno, secrétaire générale du syndicat des enseignants SE-Unsa, partage également cette analyse. Interrogée sur franceinfo, vendredi, elle a estimé que cette proposition d'Emmanuel Macron témoignait d'"une méconnaissance de la formation et des besoins". "Quand on est enseignant, il y a un cursus universitaire qui est indispensable", a-t-elle expliqué. "On ne va pas prendre des écoles normales de quelques décennies en arrière et venir les calquer aujourd'hui en 2023, dans un monde qui n'est absolument plus le même", s'est-elle insurgée.

Un syndicat, le Snetta-FO, organisation de la voie professionnelle, ne partage pas ces critiques. Dans un communiqué, il demande la fin du niveau master nécessaire pour passer les concours et exige la création d'écoles normales spécifiques pour les professeurs de lycée professionnel. "La masterisation a tari le vivier de recrutement de nouveaux professeurs", estime son secrétaire général, Pascal Vivier.

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