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Transformés en paysage de campagne, les Champs-Elysées sont pris d'assaut par les promeneurs

Le chef de l'Etat y a pris un pris un bain de foule lundi avec son épouse. Nicolas Sarkozy et Carla Bruni-Sarkozy ont déambulé de stand en stand pendant une demi-heure.
Article rédigé par France2.fr
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Les Champs-Elysées au vert,... noirs de monde, sous un fort beau soleil de Pentecôte (AFP - FRED DUFOUR)

Le chef de l'Etat y a pris un pris un bain de foule lundi avec son épouse. Nicolas Sarkozy et Carla Bruni-Sarkozy ont déambulé de stand en stand pendant une demi-heure.

La visite de Nicolas Sarkozy
"Vous avez vu tout ce que je fais en ce moment", "Pour peser sur les prix, nous, on sera avec vous!" : à chaque arrêt, Nicolas Sarkozy lâche une phrase de réconfort aux représentants d'un monde agricole actuellement en proie à une crise profonde. "C'est un Verseau comme moi", plaisante le chef de l'Etat devant un éleveur lui présentant un veau né le 24 janvier. Avec un autre, sur le même stand, Carla Bruni s'interroge sur le mode d'alimentation des bovins.

Une telle visite, "ça fait toujours plaisir", déclaré un jeune éleveur de Charolais du Morvan. Mais "ce qu'il faut c'est qu'il nous écoute, qu'il écoute nos demandes".

Sous un soleil de plomb, le locataire de l'Elysée saisit des mains de toutes parts, s'arrête un instant pour une photo. Des "Bravo Monsieur le président", "on a besoin de vous", s'échappent de la foule massée derrière un important cordon de sécurité.

"Le président est venu voir les gens qui ont des messages à faire passer (...). Il faut, à un moment donné venir voir de quoi on a besoin", résume William Villeneuve, président des JA, qui a fait office de guide pour la visite. Depuis la défaite de sa majorité aux régionales, Nicolas Sarkozy multiplie les gestes en direction des agriculteurs, électorat traditionnellement acquis à la droite.

Même le très sérieux Herald Tribune fait sa "une" sur l'évènement (France 2)

Un grand succès populaire
800.000 personnes se sont pressées dimanche pour participer à cette opération de charme gratuite, initiée par les Jeunes Agriculteurs, syndicat proche de la FNSEA, principale organisation syndicale du monde paysan. Une opération qui intervient vingt ans après leur "Grande moisson". Les Champs-Elysées avaient alors été transformés en vaste champ de blé qui avait été moissonné devant des centaines de milliers de badauds.

"L'agriculture est au coeur de Paris. La forêt est au coeur de Paris (...). Je souhaite que cela soit le symbole de notre conception de l'agriculture", a lancé Bruno Le Maire lors de l'inauguration. Il a souligné que ce secteur ne devait pas être considéré "comme une activité latérale" mais devait être "au coeur de notre vie".

Les organisateurs semblaient un peu dépassés par le succès de cette manifestation destinée à valoriser ce secteur confronté à de grandes difficultés.

3 ha de campagne au coeur de Paris
Un immense plateau végétal de 3 hectares a été déployé entre le rond-point des Champs-Elysées et l'Arc de triomphe, sur une longueur de 1,2 km. Des milliers de parcelles sont recouvertes de jardins et de forêts composés de fleurs, d'arbres, de fruits et de légumes de toutes sortes: plants de vigne ou de bananiers, parterre de choux...

Les animaux ne sont pas oubliés même si on ne le trouvera qu'en petit nombre. L'objectif étant de présenter des spéciments peu connu. Tel le "cul noir" limousin, une race ancienne de cochon dont le gras, dit-on, est recherché pour accompagner les plats des grands chefs.

Cette initiative, qui se veut une "oeuvre poétique", est signée d'un promoteur de l'"art de rue", Gad Weil. Ce dernier avait mis en scène il y a 20 ans la "Grande moisson", dont les Jeunes agriculteurs étaient déjà à l'initiative. Les Champs-Elysées avaient alors été transformés en un vaste champ de blé qui fut moissonnée devant des centaines de milliers de personnes. Un évènement qui a marqué les esprits.

Les Champs-Elysées à la Pentecôte ou l'une des plus belles avenues du monde ployant sous la verdure (AFP - MIGUEL MEDINA )

Le budget de "Nature Capitale" s'élève à 4,2 millions d'euros, comme lors de l'opération de 1990. L'évènement est financé aux deux tiers par des annonceurs, le solde l'étant par la société de Gad Weil qui revendra des "oeuvres végétales" aux amateurs.

Le message de l'opération
"Il s'agit de rétablir un lien avec le citoyen sur ce qu'est notre métier et sur ce que celui-ci veut vraiment", explique le président des Jeunes Agriculteurs, William Villeneuve, à la veille de l'événement baptisé "Nature Capitale". "Est-ce qu'il veut les produits les moins chers du monde ou est ce qu'il veut des produits qui rémunèrent les producteurs ?", a-t-il demandé. Dans le même temps, il entend délivrer un "message positif" pour ne pas décourager les vocations alors que le secteur agricole est en plein désarroi.

Bousculés à la fois par des prix bas de production et des aides européennes décroissantes, les paysans, et surtout les jeunes, qui s'endettent pour s'installer, s'interrogent sur leur avenir. En 2009, leur revenu annuel moyen s'est établi à 14.600 euros, en chute de 34 % par rapport à 2008, année déjà marquée par un recul de 20 %, selon les chiffres publiés par le gouvernement. Pour autant, ce revenu moyen marque de très fortes disparités au sein de la profession, composée de métiers et de situations très divers.

Pour parer au plus pressé, le gouvernement a lancé un plan de soutien de 1,8 milliard de prêts et 650 millions d'aides. Le ministre de l'Agriculture, Bruno Le Maire, entend aussi s'attaquer aux problèmes structurels. Le Sénat examine ainsi actuellement la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche. Objectif: assurer des revenus plus stables aux paysans.

Des enfants se prélassant dans un verger... des Champs-Elysées (AFP - FRED DUFOUR)

L'agriculture, une priorité politique
A plusieurs reprises ces derniers mois, les agriculteurs ont exprimé leur désarroi dans la capitale. En décembre, environ 70 manifestants avaient bloqué la rue Saint-Honoré devant l'Elysée et répandu de la paille sur la chaussée, accusant Nicolas Sarkozy de "mépriser l'agriculture". Le mois dernier, plus de 10.000 céréaliers, certains juchés sur quelque 1500 tracteurs, avaient envahi les grands axes parisiens pour manifester leur angoisse devant la chute de leurs revenus.

Nicolas Sarkozy, en visite vendredi chez un producteur de fraises du Lot-et-Garonne, a pour sa part défendu le bilan de son action en faveur de l'agriculture, un secteur qu'il juge stratégique pour l'économie française. "On a souvent traité l'agriculture de façon folklorique. On était très content, on allait dans une ferme, on passait des heures au Salon, on goûtait tout. Puis on s'en va, on vous aime, au revoir et merci !", a-t-il ironisé. Un propos qui vise son prédécesseur, Jacques Chirac, et Dominique de Villepin, lequel multiplie actuellement les visites d'exploitations rurales.

Il s'agissait du troisième déplacement présidentiel dans une exploitation agricole depuis le début de l'année, de la deuxième depuis la déroute de l'UMP aux régionales de mars. Défaite qui a conduit Nicolas Sarkozy à faire de la lutte contre la crise que traverse le secteur une des priorités de son action.

En mars, le chef de l'Etat avait arpenté plus de deux heures les allées du salon de l'Agriculture, quelques jours après la colère suscitée chez certains par son absence lors de l'inauguration.

Outre la rédaction du texte sur la modernisation de l'agriculture et de la pêche, le
gouvernement fait pression sur la grande distribution. Lundi 17 mai, à l'issue d'une réunion à l'Elysée, celle-ci s'est engagée à modérer ses marges sur les fruits et légumes aux termes d'un dispositif voulu par Nicolas Sarkozy. Le président français a également averti ses partenaires européens le mois dernier qu'il n'accepterait pas le démantèlement des instruments de régulation de la Politique agricole commune (PAC) à l'occasion de la renégociation de l'Europe verte.

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