"Ils diffusaient mes adresses et encourageaient les gens à me tabasser" : la réalité du harcèlement sur Twitter
Le médecin et animateur Michel Cymes a annoncé qu'il quittait Twitter en raison des messages haineux qui s'y multiplient. Egalement victime de harcèlement sur ce réseau social, Maxime nous relate son expérience.
"Un déversoir permettant à ceux qui n'ont que de la haine à proposer de s'exprimer." Le médecin et animateur télé Michel Cymes n'est pas tendre avec le réseau social Twitter, qu'il a décidé de quitter le 14 avril. Dans un récit partagé avec ses abonnés, il regrette que les messages haineux s'y multiplient. Une situation qui ne lui laisse plus le temps d'interagir avec la communauté : "Twitter ne remplit plus, à mes yeux, ce rôle de lien entre vous et moi."
Chers followers , merci de lire cette petite bafouille....je vous embrasse. pic.twitter.com/zxRAW5ujyf
— Cymes Michel (@michelcymes) 14 avril 2017
Ce ras-le-bol, Maxime l'a ressenti aussi. Harcelé depuis 2014 à cause de ses positions politiques, le jeune homme s'est aussi détourné du réseau social parce qu'il était au bord de la dépression. Il a fini par se réinscrire, persuadé qu'il ne faut pas "laisser la place à ceux qui propagent des messages de haine". Il raconte son expérience à franceinfo.
Insultes et menaces de mort
Maxime quitte Twitter le jour où le harcèlement virtuel qu'il subit s'immisce dans sa vie personnelle. "L'une des personnes qui me harcelait a appelé l'école de commerce dans laquelle j'étudie. Elle leur a dit que j'étais pédophile, que je m'en prenais à sa famille et la suivais dans la rue." La violence de cette démarche le laisse sans voix. "J'ai eu peur que cela ait des conséquences sur ma carrière, sur mon futur."
Depuis trois ans, le jeune homme est victime des attaques répétées de certains utilisateurs de Twitter. "Ils me sont tombés dessus parce que je dénonçais l’homophobie et les manœuvres politiques de l'extrême droite." Tout va crescendo. D'abord, les insultes : "sous-merde", "PD" ou "tafiole". Puis, viennent les menaces. "Ils ont commencé à publier mes photos personnelles avec des commentaires dégradants. Celles de mon frère et de ma mère aussi." Ses détracteurs appellent au meurtre. "Ils diffusaient mes adresses sur le réseau et encourageaient les gens à me tabasser." Certains vont même jusqu'à ouvrir des sites internet pour le calomnier. On y prétend, par exemple, que le jeune homme est pédophile.
"J'étais dans un cercle vicieux, quasiment en dépression"
Poussé à bout, il prend la décision de désactiver son compte. "Je suis resté inactif pendant un mois", confie-t-il, "ça m'a fait du bien". La coupure était nécessaire : "J'étais dans un cercle vicieux qui pouvait m'amener en dépression", confie-t-il. Ce harcèlement constant pollue son esprit et impacte sa scolarité. Il a peur que sa relation de couple se détériore. "Je vivais dans l'appréhension que la personne qui partage ma vie ne comprenne pas." Son conjoint est peu coutumier des réseaux sociaux.
Incrédule, il se demande comment il en est arrivé là. "Je ne m'attendais pas à un tel déferlement de haine juste pour avoir exposé mes opinions." Avec le recul, il parle de ce qu'il aurait pu faire autrement : "L'erreur, c'était de mettre mon nom et mon prénom sur Twitter. J'aurais dû prendre un pseudo". Il regrette aussi certaines de ses réponses, parfois virulentes mais rares, aux insultes. "Au début on ne sait pas comment réagir par rapport à ça."
Le choix de renouer avec le réseau social s'est fait après une longue réflexion. "Si tu décides d'abandonner, tu laisses aux gens emplis de haine toute la place." Soutenu par ses amis, Maxime tient bon : "Sans ça, tu perds ta voix dans un espace qui devrait t'accepter." Avec regrets, il évite de partager des informations sur les endroits qu'il fréquente. "Dommage, soupire-t-il, je trouvais ça sympa et convivial."
Il met en cause "la modération de Twitter"
Parce qu'il ne veut plus avoir à supporter le harcèlement, Maxime porte plainte à cinq reprises. "Trois ont été classées sans suite, deux ont été reçues par le parquet. Seulement l'une d'entre elles a mené à une enquête." Le jeune homme a collecté lui-même plus de 1 580 pages de preuves. A plusieurs reprises, on lui dit que les services ne sont pas habilités à recevoir la plainte car il s'agit du domaine virtuel ou que les menaces ne constituent pas un délit. "Les réseaux sociaux, ce n'est pas ma tasse de thé", explique un agent au jeune homme. "On n'a pas le temps pour ça", rétorque un autre, visiblement débordé.
"Pourtant, ça ne devrait pas être à la police d'intervenir, constate-t-il, amer. La modération de Twitter devrait faire quelque chose." Mais il n'a jamais pu entrer en contact avec les équipes. "J'ai contacté le PDG via le réseau social, mais il m'a bloqué." "Dès que je signale un compte pour insulte et qu'il est désactivé, il réapparaît quelques secondes plus tard sous un autre nom."
Le jeune homme espère que le coup de gueule de Michel Cymes lui permettra d'attirer l'attention sur le problème. "Si des gros comptes comme le sien, qui compte 200 000 abonnés, commencent à taper du poing sur la table, peut-être que Twitter décidera d'agir."
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