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"Jérôme Cahuzac ternit l'image de ceux qui l'ont protégé"

L'historien Christian Delporte revient sur les ministres démissionnaires de la Ve République.

Article rédigé par Héloïse Leussier - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Jérôme Cahuzac, ancien ministre délégué au Budget, le 19 mars 2013. (PATRICK KOVARIK / AFP)

Une démission. C'est la voie de sortie qu'a empruntée, mardi 19 mars, le ministre du Budget, Jérôme Cahuzac, secoué par l'ouverture d'une information judiciaire pour "blanchiment de fraude fiscale". Quelques minutes avant cette annonce, Christian Delporte, spécialiste de l'histoire des médias et de la communication politique, revenait pour francetv info sur les démissions de membres du gouvernement.

Francetv info : Les démissions de ministres sont-elles courantes sous la Ve République ?
 
Christian Delporte : La première fois qu'un ministre a dû quitter son poste à la suite d'ennuis judiciaires, c'était en 1972. Philippe Dechartre (UDR, droite), impliqué dans "l'affaire de l'île de Ré" [une affaire immobilière], a démissionné juste avant d'être condamné. Mais c'est surtout à partir des années 90 que les cas de ministres objets d'enquêtes judiciaires se multiplient – et se terminent à chaque fois par une démission ou un remaniement.
 
En 1993, Bernard Tapie (radical de gauche), mis en cause dans l'affaire Toshiba, choisit de démissionner. Après lui, en 1994, Alain Carignon (RPR, droite), Gérard Longuet (RPR, droite) et Michel Roussin (RPR, droite), impliqués dans différentes affaires, font de même. Idem en 1998 pour Dominique Strauss-Kahn, cité dans les affaires Elf et Mnef. Il y avait alors ce qu'on appelle la jurisprudence Balladur. Elle voulait que tout ministre mis en cause dans une affaire démissionne.

Plus tard, Eric Woerth, impliqué dans l'affaire Bettencourt, n'a pas démissionné, et cela a pollué l'image de Nicolas Sarkozy.

Comment réagissent les ministres démissionnaires ?

Il y a deux réactions typiques : soit le ministre justifie son retrait du gouvernement en expliquant qu'il veut se concentrer sur sa défense, soit il est tellement mis en cause qu'il affirme ne pas vouloir porter atteinte à son équipe gouvernementale. Mais dans tous les cas, il ternit l'image de ceux qui l'ont protégé. Ici, François Hollande et Jean-Marc Ayrault, qui lui ont accordé leur confiance.

Ce type d'affaire pourrait-il avoir un impact sur la cote de l'exécutif ?

Non, pas tellement. Les Français sont plutôt blasés et préoccupés par d'autres choses. Surtout que dans le cas de Jérôme Cahuzac, il s'agit de faits qui se seraient passés il y a longtemps, en 2010. C'est presque une vieille histoire. Mais cela conforte les Français dans l'idée que les hommes d'Etat s'engagent en politique uniquement pour défendre leurs propres intérêts, ce qui remet en cause l'idée même de démocratie.

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