: Reportage Mondiaux de para athlétisme : on a vécu la finale du 100 mètres T38 avec le clan du sprinteur français Dimitri Jozwicki
Un rapide coup d'oeil depuis le haut de la tribune spectateurs du stade Charléty suffit pour deviner leur présence. Drapeaux tricolores dans les mains, joues parfois peinturlurées, pancartes bricolées à son effigie... Ils sont au moins une cinquantaine à être venus soutenir celui qui leur avait donné rendez-vous cet été lors des Mondiaux de para athlétisme.
Lundi 10 juillet, amis, famille et partenaires de Dimitri Jozwicki - sans oublier sa compagne, Arwen - ont répondu à l'appel du sprinteur de 26 ans atteint de tétraparésie, engagé en finale du 100 mètres en catégorie T38 (mouvement et coordination du bas du tronc et des jambes légèrement limités). La veille pourtant, il avait eu une frayeur après une série mouvementée, marquée par un faux départ et des contestations d'un concurrent australien qui avaient fait sortir "Dim" de sa bulle.
Repêché au temps, il confiait à ses proches son soulagement après la course, en balayant cette peur de décevoir qui pouvait l'habiter l'espace d'un instant. "Il ne court jamais que pour lui, il pense toujours aux autres et dimanche, il ne voulait pas laisser tomber tous ceux qui avaient déjà pris leurs places pour la finale", explique son père, André.
À ses côtés dans la tribune, sa mère, Stéphanie, acquiesce : "il a toujours été comme ça et on le voit d'autant plus sur cette compétition à domicile. À chaque fois qu'il est sollicité, que ce soit pour des photos, pour discuter avec le public, par les médias etc. Il ne dit jamais non. C'est dans son tempérament d'être généreux." Un trait de caractère que le jeune homme originaire de Nancy, et qui vit désormais dans le Nord, n'a pas cédé devant les tourments du haut niveau et de la notoriété grandissante.
Membres de la famille et partenaires à l'unisson derrière Dimitri
Le frère jumeau de Dimitri, Rémi, multiplie les allers-retours dans les coursives du stade. "On est là depuis 15h32, mais le départ de la fusée est prévu pour 18h57", plaisante-t-il. Il revient dans les gradins avec deux larges pizzas pour combler la faim. La famille Jozwicki le confirme : la connexion qu'il a avec son frère fait de lui son meilleur VRP. C'est encore lui qui, après sa série peu convaincante de la veille, s'est permis de lui rentrer dedans : "J'étais devant la télé, j'ai vu qu'il était sorti de sa course, il se redresse trop tôt, il se crispe en voyant trois adversaires devant lui... Aujourd'hui, j'ai l'impression que les choses se sont inversées, c'est nous qui sommes stressés et lui bien détendu !"
Les places réservées aux sponsors se remplissent. Marine d'Anterroches a déjà les yeux rivés sur la piste. "C'est génial d'être ici, de mettre l'accent sur le parasport, le handicap et sur Dimitri", explique la directrice de la communication de la coopérative Welcoop, une entreprise qui accompagne les personnels de santé et soutient financièrement le sprinteur depuis deux ans. "En ce moment même, dans notre campus à Nancy, il y a un écran géant avec 150 collaborateurs et leurs familles qui sont réunis pour le regarder !"
Plus que 20 minutes avant le départ. Anthony, le frère aîné, et ses parents s'éclipsent quelques instants pour évacuer leur stress autour d'une cigarette. "Vous ne rapporterez pas que je pleure, hein ?", demande Stéphanie, presque déjà la larme à l'oeil. Le premier fils prend davantage de hauteur : "Quoi qu'il arrive, on va se retrouver après la course, on va fêter le moment. On habite tous un peu à droite à gauche, si on est rassemblés aujourd'hui c'est grâce à Dimitri, des instants comme ça c'est précieux."
À un an des Jeux, l'apprentissage continue
Les vivats de la foule se sont renforcés à l'entrée des huit concurrents. Puis le silence vient suspendre le stade Charléty au coup de feu lançant les hostilités. En un éclair, les voici au bout de la ligne droite. L'or et le bronze sont pour des Américains, l'argent pour un Chinois. Dimitri Jozwicki en termine à la 5e place.
À peine le temps de se remettre de leurs émotions que, déjà, Rémi débriefe de la course avec l'entraîneur de son frère, qui a filmé sur son caméscope. "C'est frustrant, il fait le meilleur départ, il tient encore devant après 70 mètres et il craque à la fin", analyse-t-il. "C'est la réalité d'une course, c'est comme ça, c'est une catégorie très dense", ajoute son père André.
Après quelques secondes de flottement sur une possible 4e place à la photo finish, l'interrogation est levée et la position du Français confirmée. Il n'y aura pas de quota qualificatif pour Paris 2024, et il faudra encore batailler pour valider son ticket. Mais sur les visages, la déception laisse place aux sourires au moment de l'arrivée de leur champion.
"Je n'ai pas de regrets, surtout quand je vois que le champion paralympique et le médaillé de bronze à Tokyo finissent derrière moi. Peut-être qu'en évoluant à mon meilleur niveau, avec un meilleur couloir... J'aurais aimé un meilleur dénouement mais c'est le sprint, c'est comme ça." "Il vaut mieux ça aujourd'hui que l'année prochaine aux Jeux", relativise Arwen. "Là, tu as vu ce que c'était de courir devant ton public, c'est un bon test."
Des premiers cortèges partent en quête d'un bar ou d'un restaurant pour se rassembler, tandis que Dimitri rejoint les tribunes pour remercier tout le monde. Un dernier salut empreint d'une certaine nostalgie mais, surtout, d'une envie de revenir en découdre au plus vite.
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