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La vague de froid aux Etats-Unis et au Canada est "remarquable", mais pas "inhabituelle"

Depuis le 26 décembre, une vague de froid polaire s'est abattue sur le nord-est des Etats-Unis et l'est du Canada. Un épisode "remarquable" selon Jérôme Lecou, prévisionniste pour Météo France, mais qui est loin d'être historique.

Article rédigé par Thomas Baïetto - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Deux Canadiens bravent le froid, le 27 décembre 2017 à Québec. (ALICE CHICHE / AFP)

L'hiver est bien arrivé en Amérique du Nord. Une vague de froid polaire s'est abattue, mardi 26 décembre, sur le nord-est des Etats-Unis et l'est du Canada, avec des températures bien dessous des normales de saison. Dans le nord de l'Ontario (Canada), le thermomètre affichait jeudi -40°C, du jamais-vu depuis 1993. A Erié, aux Etats-Unis, il est tombé 1,5 mètre de neige en seulement 48 heures.

Pour prendre la juste mesure de ce phénomène, franceinfo a interrogé Jérôme Lecou, prévisionniste chez Météo France.

France info : cette vague de froid est-elle historique ? 

Jérôme Lecou : Non. C'est quelque chose de remarquable, mais pas d'inhabituel. Les Etats-Unis sont habitués aux vagues de froid pendant l'hiver. Mais ce qui est remarquable sur cette vague de froid, c’est son intensité, avec -40°C dans certaines parties du Canada, et sa durée, puisque cette vague va se prolonger jusqu'au 5-6 janvier. C'est une séquence longue et intense.

Qu'est-ce qui provoque ce phénomène ?

D'abord, de façon très simple, c'est l'hiver. Un vortex polaire se forme, dans les régions proches du pôle qui se refroidissent en l'absence de lumière. Cet air froid est là, en embuscade. Ensuite, il y a le jet-stream, cette ceinture de vents en altitude. En règle générale, elle a une trajectoire circulaire autour du pôle. Mais elle peut subir des déformations qui vont l'amener à avoir une trajectoire plus méridienne, du nord au sud. Cela permet à l'air froid de glisser et de se répandre vers le sud. Ce phénomène s'observe parfois en Europe et en Sibérie. Enfin, il y a le rôle joué par le relief. L'air froid est canalisé par la chaîne des Rocheuses vers la partie centrale du Canada et le nord-est des Etats-Unis. Comme un liquide, l'air emprunte le trajet le plus facile.

Le président américain, Donald Trump, a utilisé cette vague de froid pour remettre en cause la réalité du réchauffement climatique. Comment réagissez-vous ?

Pendant que cette vague de froid touche les Etats-Unis, on enregistre, à l'inverse, des températures très douces du côté de la Sibérie. Le nord de la Russie connaît des températures environ 10 à 12 °C au-dessus des normales de saison. Pendant qu’on a très froid aux Etats-Unis, il fait très doux en Sibérie. Il fait également doux en Alaska. Si on prend la période de cette vague de froid très intense, entre le 26 décembre et le 5-6 janvier, l’anomalie de température sur l’hémisphère Nord sera malgré tout nettement positive. Il fait froid aux Etats-Unis, mais le réchauffement climatique continue.

Une étude du Centre national de recherches météorologiques (CNRM) de Météo France suggère même que le réchauffement climatique facilite ces vagues de froid polaire. Pouvez-vous nous expliquer ce paradoxe ?

Cette étude montre que quand on parle de réchauffement, il faut plutôt avoir l’idée de dérèglement. Le réchauffement climatique, ce n’est pas uniquement davantage de chaleur partout. L'étude suggère effectivement que les trajectoires plus méridiennes du jet-stream pourraient être une des conséquences du réchauffement. Mais nous n'avons pas encore beaucoup de recul sur ce sujet. En revanche, sur le long terme, le réchauffement l’emportera. Les très hautes latitudes se réchauffent plus vite que le reste de la planète, il y aura moins d’air froid au pôle et donc moins de vagues polaires.

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