Un vétéran du pétrole nommé à la tête de la COP29 en Azerbaïdjan : "Tout est encore possible", selon Oxfam France

L'ONG appelle à une séparation hermétique entre l'industrie des énergies fossiles et les personnes qui participent aux négociations.
Article rédigé par franceinfo
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Le ministre de l'Ecologie et des Ressources naturelles d'Azerbaïdjan, Mukhtar Babayev, le 9 décembre 2023 lors de la COP28 aux Emirats arabes unis. (AFP PHOTO / UN CLIMATE CHANGE)

"Cela dépendra beaucoup de la pression mise sur Mukhtar Babayev et l'Azerbaidjan. On attend que les pays progressistes, comme la France, s'engagent à obtenir d'ici novembre un accord le plus ambitieux possible", déclare Guillaume Compain, chargé de plaidoyer climat de l'ONG Oxfam France, vendredi 5 janvier sur franceinfo, après la nomination du ministre de l'Ecologie et des Ressources naturelles d'Azerbaïdjan, Mukhtar Babayev, à la tête de la COP29 qui se tiendra en novembre 2024 à Bakou. Mukhtar Babayev a passé 16 ans chez Socar, la compagnie nationale pétrolière et gazière d'Azerbaïdjan. Même s'il trouve le "symbole" inquiétant, Guillaume Compain d'Oxfam reste convaincu que "tout est encore possible".

L'an dernier, les Émirats arabes unis, hôtes de la COP28, avaient choisi Sultan Al Jaber, patron de la compagnie nationale Adnoc, pour présider la conférence de l'ONU, qui s'est conclue en décembre à Dubaï. Pour la seconde année consécutive, un homme du pétrole présidera donc la conférence de l'ONU sur le climat, plusieurs ONG montrent des signes d'inquiétudes.

franceinfo : Un vétéran du pétrole nommé à la tête de la COP29 en Azerbaïdjan, il y a un sentiment de déjà-vu ce soir chez Oxfam ?

Guillaume Compain : Oui, il y a un sentiment de déjà-vu. On peut rire jaune d'apprendre la nomination d'un ancien cadre de l'entreprise nationale de production d'hydrocarbures d'Azerbaïdjan, comme président de la COP29. Les craintes que ce soit une COP du greenwashing sont là. Ce n'est pas rassurant qu'il ait des liens étroits avec l'industrie pétrolière gazière. On sait que l'Azerbaïdjan est un gros producteur de gaz et de pétrole, très dépendant de ses exportations. Pour autant, on n'est pas surpris par cette nomination, ni inquiet sur le résultat de cette COP.

Tout est encore possible ! On l'a bien vu l'année dernière : même s'il y a eu beaucoup de limites à la décision finale de la COP28, il y a eu aussi quelques avancées. Cela dépendra beaucoup de la pression mise sur Mukhtar Babayev et l'Azerbaidjan. On attend que les pays progressistes, comme la France, s'engagent à obtenir d'ici novembre un accord le plus ambitieux possible.

En matière de diplomatie climatique, il est beaucoup question de symboles, d'image. Est-ce qu'il ne faut pas revoir le processus d'attribution des COP ?

Clairement, en termes de symbole, ce choix peut inquiéter. Cela peut en partie miner la confiance dans les négociations internationales. Les COP, c'est un processus tournant, un peu comme les Coupes du monde de football, où différents continents accueillent différentes COP. Cela peut donc arriver que des pays pétroliers et gaziers accueillent des COP. Il y a clairement des règles d'attribution à revoir. Il y a un impératif absolu, qui est de garantir une séparation hermétique entre l'industrie des énergies fossiles et les personnes qui participent aux négociations.

Aux COP, le nombre de représentants d'entreprises pétrogazières a explosé, c'est inacceptable. Il faut absolument que les Nations unies revoient le processus d'accréditation aux COP, pour que ce soit véritablement les défenseurs du climat qui soient présents, pas des personnes qui vont défendre le statu quo.

Ces COP servent-elles vraiment à quelque chose ?

Elles servent. Elles ne sont pas aussi satisfaisantes qu'il est nécessaire d'avancer mais on a obtenu des avancées lors des différentes COP. Certes, il y a eu des limites à la COP28, mais il y a quand même eu la première mention d'accord de tous les pays pour opérer une transition, en dehors des énergies fossiles. Beaucoup d'objectifs de ces COP vont d'ailleurs au-delà de la question des énergies fossiles : il y a aussi la question financière !

En Azerbaïdjan, en novembre, sera discutée la question des financements climatiques accordés par les pays les plus riches. Ces pays qui ont largement profité des énergies fossiles et qui ont plus de moyens d'agir contre le changement climatique, que les pays du Sud. Comment les accompagner dans leur transition énergétique ? Comment s'adapter et faire face aux pertes et dommages, c'est-à-dire à ces catastrophes de plus en plus violentes ?

Là-dessus, on attend de la COP29 des négociations qui vont certes être dures, mais où l'Azerbaïdjan n'aura pas vocation à bloquer. Il s'agit avant tout de la part des pays donateurs, les pays riches, dont la France, de montrer davantage d'ambition et de solidarité.

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