Témoignage "J'ai perdu les eaux juste avant le plus gros du cyclone Chido" : une femme raconte son accouchement tempétueux à Mayotte

Bérengère a accouché pendant le passage du cyclone Chido, à Mayotte, aidée par une collègue sage-femme de la maternité de Mamoudzou.
Article rédigé par Agathe Mahuet, Gilles Gallinaro
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Audrey (à gauche) qui a aidé Bérengère (à droite) à accoucher pendant le passage du cyclone Chido, à Tsingoni, le 28 décembre 2024. (AGATHE MAHUET / FRANCE INFO / RADIO FRANCE)

Son bébé a décidé de pointer le bout de son nez en même temps que le cyclone Chido, le samedi 14 décembre 2024. Bérengère vit à Mayotte depuis sept ans, elle est elle-même sage-femme... et désormais maman. Comme d'autres femmes, cette habitante de Tsingoni, dans l'ouest de Grande-Terre, a accouché alors que le cyclone balayait l'archipel. "À 10h, le matin, j'ai perdu les eaux, juste avant que le plus gros du cyclone arrive", raconte-t-elle, trois semaines après la naissance de son fils.

"Les routes étaient bloquées, donc je me suis dit que j'allais rester tranquille à la maison pour ne pas contracter, essayer de retarder au maximum l'accouchement", explique Bérengère. 

Pas de réseau de la journée : Bérengère est coupée du monde jusqu'à la visite chez elle, le lendemain matin, de sa collègue Audrey, qui vit aussi à Tsingoni. "Tu m'ouvres le portail et tu me dis : 'J'ai fissuré hier et je contracte'. Et là je me dis 'oh non'. On n'avait pas de ventouse, on n'avait pas de quoi suturer, on n'avait rien du tout", se souvient sa collègue.

Bérengère a pu monter dans l'hélicoptère de la gendarmerie, dans l'après-midi du 15 décembre, afin d'accoucher à la maternité de Mamoudzou. (FRANCE INFO / RADIO FRANCE)

Le travail a commencé, mais Bérengère ne peut pas accoucher à la maison. Audrey part alors chercher une radio satellite. "Je cours aussi vite que je peux, en escaladant des arbres, en contournant d'énormes tôles", raconte la jeune femme.

On l'informe qu'à l'hôpital de Mamoudzou, la zone d'atterrissage est détruite. Aucun hélicoptère du SMUR ne pourra s'y poser. Pendant ce temps, Bérengère patiente toujours : "J'étais toujours dans mes contractions, donc j'étais vraiment concentrée sur mes douleurs."

Un trajet en hélicoptère jusqu'à la maternité

Le dimanche après-midi, c'est la gendarmerie qui envoie un hélicoptère. Par chance, la maison de Bérengère est collée au stade, où l'appareil peut se poser. "À partir du moment où l'hélicoptère a atterri, toute la pression est redescendue, on s'est dit 'on est sauvées'," se rappelle Audrey. "Déjà c'était la première fois que je montais dans un hélicoptère ! On voyait toute la végétation. Il n'y avait plus rien, tout à plat. Une vision horrible du haut de Mayotte...", détaille Bérengère.

D'après Audrey, "les gendarmes ont été super sympas", mais "étaient un peu stressés quand même". "Ils n'ont pas l'habitude d'avoir des femmes enceintes en travail dans leurs hélicoptères, donc ils m'ont bien regardée en disant 'vous êtes sûre qu'elle ne va pas accoucher sur la route ?'"

L'entrée de la maternité de Mamoudzou, à Mayotte, le 28 décembre 2024. (AGATHE MAHUET / FRANCE INFO / RADIO FRANCE)

Arrivé à Mamoudzou, l'hélicoptère parvient à se poser près du port. Transportée à la maternité qui a été plutôt épargnée par le cyclone, Bérengère peut enfin accoucher, le 15 décembre, entourée de ses collègues sages-femmes. "Les filles n'auraient pas été là, il aurait pu se passer des trucs plus graves", dit Bérengère, la gorge serrée. Son petit garçon, elle l'a appelé Ezio, même si tout le monde lui disait "bébé Chido, bébé Chido". Une "expérience inédite, inoubliable, ça c'est sûr", souligne la jeune maman.

Une femme accouche pendant le passage du cyclone Chido à Mayotte, reportage d'Agathe Mahuet et Gilles Gallinaro
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