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Intempéries dans les Hauts-de-France : pourquoi il faut bannir les adjectifs "petit" ou "mini" quand on parle de tornade

L'intense épisode orageux qui a frappé les Hauts-de-France dimanche a été marqué par la formation de plusieurs tornades. Des phénomènes certes localisés mais dont il ne faut pas minorer la violence, alerte Élodie Callac, météorologue de Météo France.

Article rédigé par Valentine Joubin
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Des habitants de Bihucourt (Pas-de-Calais) marchent à travers les débrits de bâtiments détruits après le passage d'une tornade, lundi 24 octobre 2022. (SAMEER AL-DOUMY / AFP)

Des toitures éventrées, des maisons détruites et des familles à reloger... Plusieurs tornades ont causé d'importants dégâts dans le Pas-de-Calais et la Somme dimanche 23 octobre, sans faire de victimes. Des phénomènes de quelques minutes voire de quelques secondes, d'où la tentation d'utiliser des adjectifs tels que "petites tornades" ou "mini tornades". Mais ces expressions ont-elles une valeur scientifique et nous permettent-elles de mesurer l'importance de cet épisode orageux ? Nous avons interrogé Élodie Callac, météorologue et prévisionniste à Météo France.

Un phénomène localisé et court par définition

"Une tornade, c'est une colonne d'air tourbillonnante qui va se former sous un nuage d'orage, explique Élodie Callac. "Un tourbillon qui va se créer en forme d'entonnoir et qui est constitué par des gouttelettes d'eau (de la vapeur d'eau qui se condense), par les poussières et par les débris qu'elle aspire. Petit à petit ce tourbillon va venir rejoindre le sol. Et là on parle de tornade." Ces tourbillons se produisent généralement entre mai et octobre en France métropolitaine, la saison chaude, plus propice aux tornades.

"Une tornade, par définition, c'est un phénomène extrêmement localisé qui fait quelques dizaine de mètres de diamètre, au maximum quelques centaines de mètres, précise la météorologue. Et qui a "une durée de vie assez courte", poursuit-elle. De quelques minutes seulement. "Pour les cas les plus extrêmes, peut-être plus d'une heure. Mais en règle générale, c'est une durée de vie de 5 à 10 minutes." Parler de petite ou de "mini" tornade est donc redondant et inexact. Ces adjectifs "n'existent pas dans le monde scientifique", indique Élodie Callac.

Une échelle d'intensité... À posteriori

Le choix des mots n'a rien d'anecdotique, le risque étant de minorer l'importance d'une tornade, pointe également la prévisionniste. "Il faut garder à l'esprit que c'est un phénomène extrêmement violent, même s'il est très localisé et qu'il dure à priori peu de temps". Pour qualifier une tornade, les météorologues utilisent l'échelle de Fujita. Constituée de six niveaux, de F0 à F5, elle permet de graduer l'intensité et la sévérité du tourbillon.

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Mais la limite de cette notation est qu'elle ne peut être utilisée qu'à posteriori, le temps que "des études soient faites pour évaluer les dégâts", explique Élodie Callac. Brèves, peu étendues et violentes, les tornades sont par ailleurs très difficiles à observer et à mesurer. "Soit, ça passe à travers nos stations d'observation, soit ça détruit les systèmes d'observation présents sur son passage. Donc c'est très compliqué". Ces enquêtes pour mesurer l'intensité des tornades sont menées depuis 2006 par Keraunos, l'observatoire des tornades et orages violents.

La tornade la plus meurtrière date de 1845

Sur son site, Keraunos présente une cartographie des principales tornades de notre histoire. Deux seulement ont été classées de niveau F5 (plus de 320 km/h). La plus ancienne et la plus meurtrière est celle de Montville (Seine-Maritime) qui, le 18 août 1845, a provoqué la mort de 75 personnes écrasées par l'effondrement de plusieurs filatures. La seconde a eu lieu en 1967 à Palluel (Pas-de-Calais) et a coûté la vie à six personnes. Plus récemment, la tornade d'Hautmont (Nord) avait marqué les esprits en tuant trois personnes et en causant des dégâts considérables.

En dehors de ces épisodes extrêmes et dévastateurs, les tornades qui frappent la France sont "la plupart du temps d'intensité faible", précise Élodie Callac. Les zones les plus exposées sont le Nord-Ouest, le Nord et la Méditerranée. Keraunos en recense "entre 40 et 50" en moyenne chaque année. Leur nombre a-t-il augmenté avec le réchauffement climatique ? "Aucune étude n'a jusqu'ici permis d'établir une corrélation entre le réchauffement climatique et l'occurrence des orgages et donc des tornades", répond Élodie Callac. 

Et si les chiffres de Keraunos ne cessent d'augmenter depuis la création de l'observatoire en 2006, précise-t-il lui-même, c'est grâce à une observation plus intense mais aussi à l'amélioration des techniques et au développement des réseaux sociaux qui "favorisent un partage rapide des informations".

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