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Inondations dans le Gard : par endroits, il est tombé "plus d'une baignoire par mètre carré", estime une hydrologue

Selon Emma Haziza, il y a "toujours des moyens de se prémunir". Il faut écouter les "sachants du territoire" capables de prédire en quelques minutes les conséquences d'une forte pluie à un endroit donné. 

Article rédigé par franceinfo
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L'hydrologue Emma Haziza était l'invitée de franceinfo lundi 22 juillet 2019. (FRANCEINFO)

Lors des fortes intempéries, mardi dans le Gard, il est tombé "plus d'une baignoire par mètre carré", a imagé Emma Haziza, hydrologue et spécialiste des inondations, mercredi 15 septembre sur franceinfo. "À partir du moment où vous avez des gens sinistrés, c'est qu'il y a eu un problème dans le processus", a-t-elle aussi observé, soulignant que "la vigilance rouge est arrivée à 11h35 du matin, ce qui peut paraître assez tard, surtout vu la violence de ces évènements et leur rapidité".

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franceinfo : S'agit-il d'un phénomène classique pour la saison ou bien a-t-il un caractère exceptionnel ?

Emma Haziza : Les deux. On est vraiment dans un contexte post-équinoxe où l'on a des fronts froids qui descendent de l'Arctique et qui rencontrent une mer Méditerranée extrêmement chaude. La conjonction de ces phénomènes va mélanger ces masses d'air. On a donc deux scénarios possibles, sur cette zone. Le premier, c'est que ces masses d'air aillent jusqu'au niveau des Cévennes et que les cours d'eau cévenols gonflent. Ca va se passer très en amont, dans des milieux très montagneux. Mardi, c'est quelque chose qui s'est passé en plaine. Un système extrêmement puissant s'est formé vers 7h30-8 heures du matin. Il y avait des vents ascendants à 200-300 km/h dans cette aire tourbillonnaire.

"Des colonnes qui montent jusqu'à 12 km de hauteur de pluie sont tombées en l'espace de trois heures dans cette zone entre Montpellier et Nîmes. Elles ont tout dévasté sur leur passage."

Emma Haziza, hydrologue

à franceinfo

Le caractère exceptionnel, c'est cette intensité.

Faut-il faire le lien avec le réchauffement climatique ?

Oui. Je suis ces événements depuis à peu près 1992. On voit très bien qu'on a toujours eu ces phénomènes. On ne peut pas dire qu'on n'a jamais connu ça, ce n'est pas vrai. On a toujours eu des épisodes diluviens. Ce triangle entre Nîmes, Montpellier et Alès, c'est vraiment la zone la plus dangereuse où l'on sait qu'on va avoir des réactions très violentes sur le plan hydrologique. Par contre, il y a une récurrence de plus en plus forte, des phénomènes de plus en plus violents et avec des intensités qu'on ne connaissait pas. 270 mm d'eau, c'est plus d'une baignoire qui tombe par mètre carré en l'espace de trois heures.

A-t-on des moyens de se prémunir contre cela ?

Il y a toujours des moyens. À partir du moment où vous avez des gens sinistrés, c'est qu'il y a eu un problème dans le processus. On a vu les phénomènes sur les images radar à partir de 7h30-8 heures du matin mardi. La vigilance rouge est arrivée à 11h35, ce qui peut paraître assez tard, surtout vu la violence de ces évènements et leur rapidité. Ce sont des phénomènes qui passent entre les modèles, on n'arrive pas à savoir l'endroit où ils vont se dérouler exactement. Météo France fait son travail sur le plan atmosphérique, ensuite il y a un autre travail à faire sur la réponse hydrologique, c’est-à-dire comment cette eau va se comporter sur le territoire. On a un précédent, en 2005. La cellule de crise préfectorale avait fait fermer l'autoroute [A9], suite à un événement énorme qui s'est déroulé exactement au même endroit. Il avait touché le bassin du Vistre, ce cours d'eau qui passe dans les garrigues nîmoises. On avait fermé l'autoroute et empêché à 4 000 véhicules d'arriver dans 1,40 m d'eau. Ça veut dire qu'une décision prise juste à temps permet de ne pas avoir ces sinistrés. Là, on a laissé cette autoroute ouverte. À qui la faute ? En fin de compte, on a toute une chaîne et un processus qui font que, peut-être, on perd les sachants du territoire, qui sont capables de nous dire qu'à telle pluviométrie, sur cette zone, il faut prendre une décision dans les dix minutes.

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