Sécheresse : pourquoi le niveau des nappes phréatiques ne s'est-il pas amélioré en juillet ?
Les pluies des dernières semaines n'y ont rien fait. La France comptait "72% de nappes en dessous des normales de saison" au mois de juillet, selon un état des lieux communiqué jeudi 10 août par le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu. Un chiffre en progression de 4 points par rapport au mois précédent. La situation est proche de celle de 2022 à la même date, et parmi les pires de ces cinq dernières années.
Les fortes précipitations observées au mois de juillet n'ont eu que très peu d'impact sur le niveau des nappes : en un mois, seules 3% sont en hausse et 8% sont stables, précisé le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) lors d'un point presse, vendredi 11 août. Selon son dernier bulletin, 20% présentent en outre un niveau très bas, une tendance "comparable à l’année dernière".
Même s'il pleut des trombes en été, les nappes se rechargent principalement en hiver. En effet, en période estivale, les plantes et les cultures tendent à absorber directement l'eau, qui infiltrera moins les profondeurs du sol. Les précipitations d'été ne sont cependant pas inutiles, puisque l'eau que la végétation absorbe directement permet de limiter l'arrosage et les prélèvements, et par conséquent, la pression sur les ressources disponibles.
En outre, les orages ont encore moins d'impact sur le niveau de remplissage des nappes, puisque l'eau tend alors à "rebondir" plutôt qu'à "infiltrer les sols", explique Violaine Bault, hydrogéologue au BRGM. Pour les nappes phréatiques, les prévisions saisonnières sont donc à la baisse au moins "jusqu'à l'automne", avec de "fortes incertitudes" pour la suite.
Des pénuries d'eau dans 85 communes
Interrogé par franceinfo, Vazken Andréassian, hydrologue à l'Institut national pour la recherche en agriculture, alimentation et environnement (Inrae), affirme qu'il faudra "attendre un vrai hiver pluvieux pour avoir une recharge" des nappes phréatiques. L'hiver précédent a été particulièrement sec, ce qui explique en partie la gravité de la crise que traverse actuellement la France. "Pour l'instant, il n'y a aucune raison de penser que l'hiver prochain soit particulièrement sec", veut toutefois rassurer Vazken Andréassian.
La pluie n'est pas le seul facteur à prendre en compte. La vitesse de remplissage des nappes phréatiques dépend aussi de la capacité des sols à les absorber rapidement ou non, en fonction de leurs propriétés géologiques. Ainsi, les sols karstiques que l'on trouve par exemple en Normandie, dans le bassin parisien ou en Auvergne permettent à l'eau de pénétrer rapidement dans les profondeurs.
En revanche, les sols argileux du sud de la France sont beaucoup plus imperméables, en plus d'avoir reçu beaucoup moins de pluie que ceux du Nord au mois de juillet. La durée nécessaire à l'infiltration varie ainsi de "quelques jours" à "trois mois", selon Violaine Bault. Conséquence : la situation des nappes phréatiques est très disparate d'une région à l'autre de l'Hexagone.
"On a une situation qui est meilleure dans le grand ouest de manière générale, en particulier en Bretagne [et] une partie de l'Aquitaine, mais à l'inverse une situation qui est plus inquiétante, avec des niveaux historiquement bas, du côté par exemple de la vallée du Rhône et de la Saône."
Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique
Le faible remplissage des nappes n'affecte pas que les agriculteurs. Les ressources en eau sont aussi cruciales pour la production d'énergie (barrages hydroélectriques, centrales nucléaires...). Et les particuliers ne sont pas épargnés. Quelque 85 communes connaissent ainsi des pénuries d'eau, soit une dizaine de plus qu'une semaine plus tôt, a précisé Christophe Béchu jeudi 10 août. Dans le détail, 67 sont alimentées par camion-citerne et 18 par des bouteilles d'eau.
Les tensions actuelles concernent les Alpes-Maritimes, la Dordogne, le Doubs, l'Hérault, les Pyrénées-Orientales, le Var et les Vosges. Au total, 32 départements sont en "crise" sur tout ou partie de leur territoire, et 20 en "alerte renforcée". Cela se traduit par des restrictions plus ou moins importantes des usages comme l'arrosage des pelouses ou le lavage des voitures.
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