Afghanistan : ce que l'on sait des combats qui se poursuivent dans la vallée du Panchir
La résistance aux talibans dans le nord de l'Afghanistan pourrait expliquer le retard annoncé samedi pour présenter le nouveau gouvernement afghan.
C'est l'une des dernières zones à encore échapper à leur emprise sur l'Afghanistan. Les talibans se heurtent à une importante résistance dans la vallée du Panchir. Des combats qui pourraient expliquer le retard annoncé, samedi 4 septembre, de la présentation d'un nouvel exécutif par les talibans, initialement pressentie vendredi. Franceinfo vous explique ce que l'on sait des affrontements armés dans cette province.
L'un des derniers foyers d'opposition aux talibans
La vallée du Panchir, au nord de Kaboul, est l'une des plus petites provinces d'Afghanistan et la seule à ne pas être tombée aux mains des talibans. Bastion anti-taliban de longue date, cette vallée enclavée et difficile d'accès, située à environ 80 kilomètres de la capitale, est le théâtre depuis le départ des dernières troupes américaines du pays, le 31 août, de combats entre les forces talibanes et le Front national de résistance (FNR).
Une résistance menée par le fils du commandant Massoud
La résistance est organisée autour du FNR, emmené par Ahmad Massoud, fils du défunt commandant Ahmed Shah Massoud. Le vice-président Amrullah Saleh s'y est également réfugié.
Composée de combattants de milices antitalibans et d'anciens membres des forces de sécurité afghanes, cette résistance a juré de résister à toute offensive des nouveaux maîtres du pays, tout en laissant ouverte la porte à des négociations si le mouvement fondamentaliste mettait un terme à ses offensives. Amrullah Saleh a évoqué une "situation très difficile" dans un message vidéo diffusé sur Twitter vendredi, tout en assurant que la "résistance continu[ait] et continue[rait]".
The RESISTANCE is continuing and will continue. I am here with my soil, for my soil & defending its dignity. https://t.co/FaKmUGB1mq
— Amrullah Saleh (@AmrullahSaleh2) September 3, 2021
Des combats intenses depuis le départ des troupes américaines
Ces dernières semaines, les talibans ont envoyé des centaines d'hommes dans les zones entourant le Panchir. Lundi 30 août au soir, au moment où le dernier avion militaire américain s'apprêtait à décoller de Kaboul, une offensive talibane a été menée contre la vallée, selon des membres de la résistance. "Peut-être voulaient-ils tenter leur chance en attaquant le Panchir. Par la grâce de Dieu, la chance n'était pas de leur côté (...). Nos compatriotes n'ont pas à s'inquiéter", a déclaré Fahim Dashti, un membre du FNR, dans une vidéo diffusée mardi par Voice of America (article en anglais).
Selon lui, sept ou huit talibans ont été tués dans les combats, ainsi qu'un ou deux combattants dans les rangs du FNR. Les talibans n'ont fait aucun commentaire sur cette attaque, qui, selon des habitants, a été menée sur plusieurs fronts, notamment depuis le col de Khawak à l'ouest et depuis le sud. Le lendemain, une deuxième offensive, plus sanglante cette fois, a été menée, selon Bismillah Mohammadi, ex-ministre de la Défense. Au total, 34 talibans ont été tués et 65 autres blessés, a-t-il affirmé mercredi sur Twitter.
Mercredi 1er septembre, les talibans ont appelé les combattants de la vallée du Panchir à baisser les armes pour éviter une guerre sanglante. "Mes frères, nous avons fait de notre mieux pour résoudre le problème du Panchir via des pourparlers et des négociations, en vain malheureusement", a déclaré un haut responsable taliban, Amir Khan Muttaqi, dans un message audio adressé aux habitants de la vallée et publié sur Twitter. "Maintenant que les pourparlers ont échoué et que les moudjahidines [talibans] ont encerclé le Panchir, il reste des gens à l'intérieur [de la vallée] qui ne veulent pas que les problèmes soient résolus de manière pacifique, a-t-il ajouté. C'est à vous qu'il revient de leur parler. A ceux qui veulent se battre, dites-leur que cela suffit."
Les talibans ont promis des places dans leur gouvernement, d'après le FNR
Selon Ahmad Massoud, les talibans ont proposé d'attribuer deux sièges au FNR dans le gouvernement qu'ils veulent créer. "Nous n'avons même pas considéré leur offre", a-t-il expliqué, estimant que les talibans avaient "choisi le chemin de la guerre". Le FNR avait en amont précisé qu'il était prêt à résister à toute agression des talibans, mais aussi à négocier avec ces derniers sur la formation d'un gouvernement inclusif. "Notre message aux talibans, c'est que nous voulons la paix", avait réaffirmé mercredi un combattant de la résistance. Mais "s'ils n'acceptent pas la paix et entrent par la force, alors le champ de bataille sera là pour les accueillir."
Des célébrations meurtrières après des rumeurs de victoire des talibans
A Kaboul, vendredi soir, des rafales ont retenti, tirées pour célébrer une victoire talibane dans le Panchir que des rumeurs, notamment sur les réseaux sociaux, disaient acquise. Mais les talibans n'ont fait aucune annonce officielle et les chefs de la résistance dans la vallée ont nié, auprès de l'agence Reuters, avoir perdu le contrôle de la province.
Selon les services d'urgence de la capitale, deux personnes ont été tuées et 20 autres blessées dans ces tirs de joie. De son côté, l'agence Reuters, citant la télévision afghane Shamshad, fait état, samedi, d'au moins 17 personnes tuées dans une fusillade pendant les célébrations à Kaboul. Au moins 14 personnes auraient également été blessées dans des tirs de joie à Jalalabad, dans l'est, selon le porte-parole de l'hôpital, interrogé par Reuters.
Des débordements qui ont conduit le porte-parole en chef des talibans, Zabihullah Mujahid, à exhorter ses partisans à arrêter de "tirer en l'air" et à "remercier Dieu à la place". "Les balles peuvent blesser les civils, ne tirez pas inutilement", a-t-il posté sur Twitter.
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