Attentats à Kaboul : "Nous pouvions nous attendre à une réaction un peu plus ferme" des États-Unis, estime une spécialiste du monde arabe
Selon Myriam Benraad, "le président américain a confirmé cette logique de désengagement qui sanctionne le fait que les États-Unis n'ont plus aucune maîtrise de la situation en Afghanistan".
Les États-Unis répondront "avec force et précision" à l'attaque kamikaze revendiquée par le groupe jihadiste État islamique qui a fait au moins treize morts jeudi 26 août parmi les soldats américains à l'aéroport de Kaboul."Nous pouvions nous attendre à une réaction un peu plus ferme", s'est étonné sur franceinfo la politologue Myriam Benraad, spécialiste du monde arabe, professeure associée en relations internationales, après l'allocution du président américain Joe Biden.
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franceinfo : Ce discours de Joe Biden était-il attendu ?
Myriam Benraad : Oui, il était très attendu, après les attaques qui viennent de se produire. Pourtant, après ces attaques, nous pouvions nous attendre à une réaction un peu plus ferme. Or, le président américain a confirmé cette logique de désengagement qui sanctionne le fait que les États-Unis n'ont plus aucune maîtrise de la situation en Afghanistan. Ces attentats kamikazes, qui ont été revendiqués par l'État islamique, le démontrent.
"L'objectif de l'État islamique était de sanctionner l'humiliation totale des États-Unis lors de leur retrait."
Myriam Benraad, politologueà franceinfo
La riposte prendra la forme de frappes ciblées contre un certain nombre de dirigeants, d'infrastructures et de lieux stratégiques de l'État islamique qui seront identifiés mais il n'y aura pas de réengagement militaire dans le pays.
Les terroristes de l'État islamique peuvent-ils être une menace pour les talibans eux-mêmes ?
Oui, bien sûr, il y a aussi la dimension politique derrière ces attentats, qui est de signifier aux talibans qu'ils n'ont pas remporté la compétition dans la guerre que se livrent les jihadistes entre différentes mouvances hétérogènes. Il y a cette rivalité, cette grande rivalité entre Al Qaïda, à laquelle les talibans sont très associés, et puis l'État islamique, puisqu'aujourd'hui, ces deux mouvances se disputent la maîtrise du jihadisme global. On peut aussi y voir une dimension politique, c'est-à-dire un message très fort passé par l'État islamique que les talibans n'ont pas remporté la maîtrise du jihad sur le terrain et qu'ils seront là pour leur signifier à travers ces attentats.
Emmanuel Macron a évidemment condamné ces attentats avec la plus grande fermeté, a-t-il dit. Il a aussi dit ce jeudi que les évacuations d'Afghans allaient se poursuivre après le 31 août. Est-ce que c'est dangereux ?
Ça l'était déjà de toute façon, dès le départ, dès le début de l'évacuation, qui s'est faite dans une grande confusion, dans un chaos quasi total. Aujourd'hui, c'est d'autant plus le cas que, bien sûr, on voit que l'État islamique a réussi à orchestrer ces attentats et qu'ils vont peut être, dans une logique de surenchère, vouloir en faire d'autres dans les heures, les jours qui viennent. Vraiment, nous sommes dans une grande incertitude actuellement.
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