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En Algérie, la licence "moudjahidine" permet d'importer des voitures

Alors que l'importation de véhicules neufs est interdite, les anciens combattants bénéficient d'un privilège largement détourné au fil des ans.

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Trafic sur une route de la périphérie d'Alger. (STRINGER / AFP)

C'est une pratique largement partagée en Algérie. L'achat d’un véhicule importé grâce à la "licence moudjahidine". Celle-ci permet à l’acheteur de ne pas payer les droits de douanes qui sont de l’ordre de 30% du prix du véhicule. L’affaire devient vraiment très juteuse lors de l’achat d'un véhicule haut de gamme.

Comme son nom l’indique, cette licence est réservée aux anciens combattants de la guerre d’indépendance et à leur proche famille (épouse, enfants). Mais cela a généré un trafic que l’Etat tente désormais de résorber, après avoir longtemps fermé les yeux. Par le biais de procurations, les titulaires permettent à des tiers d’utiliser ces véhicules qu’ils ont importés, moyennant bien sûr une rétribution au titulaire de la licence. Le principe de l’incessibilité durant trois années du véhicule ainsi importé, vole de fait en éclats.

Un trafic banalisé

Le passage devant le notaire, qui établit une procuration en bonne et due forme, a donné à cela un cadre officiel, au point que beaucoup d’Algériens pensaient la procédure légale. Ces notaires peu scrupuleux ont accompagné le trafic faisant exploser le coût de ces procurations qui peuvent désormais atteindre 50 000 dinars (311 euros). Quant au moudjahidine modeste qui ne peut pas s’offrir une automobile, il vend directement sa licence d’importation, faisant flamber les prix dans ce domaine.

Face au resserrement de plus en plus strict du nombre de véhicules autorisés à l’importation, puis de la suspension de ces importations, le trafic des "licences moudjahidines" est devenu très prospère. Sur Internet, les sites spécialisés dans la revente ont fleuri.

Situés autour de 200 000 dinars (1 200 euros environ), le prix des licences a doublé depuis que l’Etat a interdit l’importation de véhicules

Des avantages réduits

L’Etat a contre-attaqué en abaissant la puissance des véhicules autorisés à l’importation à 1 800 cm³ au lieu de 2 000 cm³ pour les véhicules essences, et de 2 500 à 2 000 cm³ pour les diesels. Clairement, les autorités algériennes veulent privilégier les petits véhicules pour mettre fin au trafic des grosses cylindrées.

Hors de cette "licence moudjahidine", l’importation de véhicules devient très onéreuse. Taxes et droits de douane de 15%, puis TVA de 19%, taxe intérieure de consommation qui passe de 30 à 60% !

Tout cela veut casser un système bien installé au fil des années que la conjoncture restrictive a renforcé. Mais pour mettre fin à ce trafic le plus simple est encore de libérer les importations de véhicules.

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