Mémoire de la guerre d’Algérie : un combat fratricide sanglant a opposé sur le sol français les nationalistes du FLN à ceux du MNA
Alors que la France vient de reconnaître, 60 ans après les faits, le massacre du 17 octobre 1961, des épisodes sanglants de la guerre d’Algérie ont souvent été passés sous silence. Le travail de mémoire doit se poursuivre des deux côtés de la Méditerranée.
Le territoire français fut le théâtre d’un affrontement meurtrier entre le Front de libération nationale (FLN) et son rival, le Mouvement nationaliste algérien (MNA), héritier de l'Etoile nord-africaine, créée en 1926 à Paris par Messali Hadj. Une guerre fratricide qui aurait fait, selon les chiffres officiels des autorités françaises, près de 3 957 morts et 10 223 blessés dans les deux camps entre 1956 et 1962. Eliminé physiquement par le FLN, le MNA sera ensuite effacé de la mémoire algérienne.
En France, des cadres de l’Union des syndicats des travailleurs algériens (USTA), proches du MNA, seront assassinés de 1957 à 1959 par le FLN. Le 17 septembre 1959, un groupe armé du Front de libération nationale tentera de tuer Messali Hadj, le vieux dirigeant nationaliste à Gouvieux, dans l'Oise. Cet attentat manqué contre le pionnier de la cause indépendantiste algérienne constitue un épisode marquant de la compétition violente que se sont livrées les organisations nationalistes en lutte contre le colonialisme français.
L'argent de l'immigration
Durant toute la guerre d'Algérie, la lutte entre le FLN et le MNA est féroce pour obtenir l’adhésion des Algériens travaillant en France. En jeu, s’imposer à la table des négociations avec de Gaulle et surtout mettre la main sur l’argent récolté au sein de l’immigration, qui finance l’achat d’armes du FLN. L'impôt FLN est d'environ 8% du salaire. En 1960, il représente 80% du budget du FLN. Un individu qui persiste à refuser de payer sa cotisation mensuelle au FLN peut être éliminé par des commandos du mouvement.
Le FLN, minoritaire en 1955, s’impose peu à peu par la force contre son rival en France : règlements de comptes sanglants (mitraillages de cafés, liquidations physiques, attentats ciblés) vont faire plusieurs milliers de morts et blessés. Pour se protéger, les partisans du MNA se regroupent par quartiers ou par hôtels. Certaines rues comprennent des hôtels FLN ou des hôtels MNA. La police effectue des barrages la nuit sur certains axes pour séparer les deux camps et, à la fin de la guerre, pour protéger le MNA.
Sorti vainqueur de son affrontement avec le MNA, le FLN mène en parallèle la lutte contre les services de police français.
30 années de lutte nationaliste
Messali Hadj incarne de 1926 à 1958 la cause nationaliste malgré les persécutions politiques infligées par les gouvernements français, de droite comme de gauche. Son prestige commence toutefois à pâlir avec son refus de rejoindre une organisation constituée en 1955 "à ses dépens", selon lui : le Front de libération nationale.
Après la guerre, la propagande du gouvernement algérien ne glorifiera que le FLN, le MNA sera effacé de la mémoire algérienne.
Etendre la lutte armée sur le sol français
C'est deux mois après l’arrivée au pouvoir du général de Gaulle le 1er juin 1958, que les dirigeants de la fédération de France du FLN, réunis à Cologne en Allemagne, décident d’étendre la lutte armée sur le territoire français. Le FLN lance en septembre ses premières attaques contre les dépôts de carburant. Les stocks de Marseille, Rouen, Gennevilliers, Vitry, Toulouse sont en flammes. Des voies ferrées sont sabotées, des commissariats attaqués.
Ces quelque 250 attaques et sabotages feront 88 morts et 180 blessés. Le préfet de Paris Maurice Papon décrète et impose en octobre 1961 un couvre-feu aux Algériens. Afin de le dénoncer, le FLN lance un appel à manifester à Paris, le 17 octobre 1961. La manifestation pacifique sera comme on le sait sauvagement réprimée.
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