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Afrique du Sud : les terres rendues à leurs anciens propriétaires noirs

Près d'un quart de siècle après la fin de l’apartheid en Afrique du Sud, certaines communautés commencent à retrouver les terres qu’elles occupaient avant la domination de la minorité blanche. Une opération de redistribution souvent délicate. La question, très sensible, continue à agiter la vie politique sud-africaine.
Article rédigé par Charles Bonnaire
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un tracteur sur la ferme de la communauté Moletele, le 7 juin 2017.  (MUJAHID SAFODIEN / AFP)

Cela fait 10 ans que la tribu des Molotele est redevenue propriétaire des terres que la minorité blanche lui avait prises. Dans le nord-est du pays, cette communauté est à la tête d'une ferme qui commence à faire ses premiers bénéfices.

Les Moletele ont confié pour vingt ans la gestion de leurs terres à un gros exploitant local. Les ex-propriétaires sont devenus fermiers et leurs anciens ouvriers agricoles sont devenus patrons.

Peter Scholz, exploitant agricole, à son bureau, le 7 juillet 2017.  (MUJAHID SAFODIEN / AFP)

 
«Voies originales»
Contre un pourcentage de leur chiffre d'affaires, les fermiers blancs ont apporté à l'exploitation des capitaux pour lui permettre de fonctionner. Dans ce cas de figure, chaque partie en tire profit. Il existe pourtant de nombreux cas dans lesquels les nouveaux propriétaires ne sont pas à même de faire fonctionner leur exploitation.
 
La reprise des fermes et la redistribution des terres est une question importante en Afrique du Sud. «La terre est un sujet très sensible, les communautés sont très frustrées car le processus de redistribution est trop lent. (…) Nous trouvons toujours des voies originales pour régler nos problèmes», explique Peter Setou, président de la fondation Vumelana, qui a soutenu les Moletele. Le but est d'aller à l'inverse de ce qui s'est passé au Zimbabwe. Là, des expropriations de force ont conduit à une agriculture défaillante avec des exploitants sans savoir-faire et sans capitaux suffisants. 


«C'est la terre qui nous a été enlevée par les Blancs, par la force, par un génocide»
Cette question de la redistribution est centrale dans le débat en Afrique du Sud, notamment pour le leader de la gauche radicale Julius Malema. En 2016, il incitait ses partisans à occuper les terres occupées par les Blancs qui les avait «enlevées par la force et par le génocide.» Il se défend toutefois de vouloir inciter la violence. «Je ne tuerai jamais un Blanc», affirme-t-il. Mais ce double jeu lui a valu une inculpation pour «incitation à l’effraction.» 

A la tête de l’Etat, Jacob Zuma veut aussi faire avancer cette question. Le président menace les Blancs d’«expropriations sans compensation». Pour cela, il a même appelé le Parlement à changer la Constitution au début de l'année 2017. 
 
Derrière l'expropriation, l'histoire de l'Afrique du Sud 
En 2014, le gouvernement a réformé la loi sur l’expropriation vieille de 40 ans. Le ministre adjoint aux travaux publics, Jeremy Cronin, expliquait alors au Mail & Guardian que la «compensation devait être juste et équitable, mais que ce qui était prévalent était l’utilisation de la propriété et l’histoire de son acquisition.» En clair, il faudra dorénavant prendre en compte l'histoire sud-africaine, et notamment celle de l'apartheid.
 
Longtemps, le secteur agricole sud-africain a été le théâtre d’inégalités avec des exploitants blancs riches et puissants et d’autres exploitations sous-développées appartenant à des Noirs. Aujourd’hui, à l’image des Moletele, la répartition semble commencer à changer.
 

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