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Au Kenya, tous les rhinocéros meurent lors de l’opération de repeuplement

Cela devait être une opération exemplaire de protection d’une espèce menacée. Elle se termine en fiasco intégral après la mort, en à peine un mois, de l’ensemble des onze rhinocéros déplacés. Malgré les moyens engagés, la zone de déplacement n’avait pas été assez étudiée, les animaux se sont empoisonnés en buvant une eau non potable.
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
L'un des onze rhinocéros transférés du parc de Nairobi, qui trouveront la mort dans le parc de Tsavo. (AFP/Tony Karumba)

Les rhinocéros avaient rejoint ce qui devait être un nouveau sanctuaire, dans le parc national de Tsavo. Situé entre Nairobi et Mombasa, c’est la plus grande réserve du Kenya (22.000km²).
Les rhinocéros noirs avaient été déplacés dans le cadre de la gestion de la race, afin de réguler les individus et assurer également un brassage génétique.

C’est le 6ème plan de ce type organisé au Kenya. L’objectif étant d’atteindre une population de 830 rhinocéros noirs en 2021 contre 745 aujourd’hui.
Le Kenya Wildlife service (KWS) en collaboration avec le WWF avait commencé l’opération le 26 juin 2018. Huit rhinocéros étaient alors capturés dans le parc de Nairobi, et six autres devaient l’être plus tard dans celui de Nakuru. «Une équipe hautement spécialisée» est intervenue, précise le KWS sur son site internet, «utilisant un hélicoptère». Une fois anesthésiés, les animaux placés dans des conteneurs ont été transportés en camion vers leur nouvel habitat.

Depuis un hélicoptère les rhinocéros ont été endormis avant d'être déplacés (AFP/Tony Karumba)

Le WWF a participé à l’opération en fournissant 2 véhicules, 3 motos, des caméras des ordinateurs, etc… Mais rapidement, le chaos succède à la fanfare. Le 13 juillet, on apprend que sept rhinocéros sont morts. L’information est confirmée du bout des lèvres par le KWS. Puis ce sera huit, neuf, dix. Finalement, les onze rhinocéros déjà déplacés vont mourir. La mort du dernier relève presque du gag. Il a été mortellement blessé par des lions.
 
Pourquoi ?
Désormais, l’heure est aux questions. Pourquoi un tel échec ? Certes, ces déplacements sont toujours risqués. L’anesthésie, le transport, l’acclimatation sont autant de dangers pour un animal sauvage. Mais là, le fiasco est intégral. «Selon l'enquête, ces décès sont dus à de multiples syndromes de stress, intensifiés par l'empoisonnement au sel, la déshydratation, la faim et des problèmes gastriques», a déclaré Najib Balala, le ministre du Tourisme et de la Faune.

Six responsables du KWS, dont le directeur général, ont été mis à pied. David Zimmerman, un vétérinaire de l’organisation des Parcs nationaux d’Afrique du sud qui a participé à l’enquête, est catégorique : «l'organisation du déplacement s'est révélée défaillante» a-t-il déclaré. Selon le ministre du Tourisme, l’absence de contrôle de la qualité de l’eau disponible a provoqué la mort des animaux.
 
Visiblement, la politique de déplacement des animaux n’est pas remise en cause, mais elle a été interrompue. La réputation du KWS, et avec lui celle du WWF, est sévèrement dégradée. D’autant que toutes les cornes ont été retrouvées, ce qui exclut en grande partie l’œuvre de braconniers. Si la mort des animaux est liée à un manque de préparation de la zone, «c’est totalement inacceptable», s’insurge un quotidien kenyan. Un amateurisme qui serait dû à un manque de moyen.

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