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Kenya : qui est William Ruto, le nouveau président élu sur le fil ?

L'ambitieux et riche homme d'affaires de 55 ans, père de six enfants, a été déclaré vainqueur avec 233 000 voix d'écart. Son opposant rejette les résultats. 

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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  (TONY KARUMBA / AFP)

A 55 ans, William Ruto a été déclaré vainqueur de la présidentielle au Kenya avec 50,49% des voix contre 48,85% pour Raila Odinga. Ce dernier a rejeté ce 16 août les résultats, les qualifiant de "parodie" et promettant de poursuivre toutes les options légales à sa disposition. William Ruto l'a emporté après avoir travaillé à polir sa réputation sulfureuse en se proclamant porte-parole des "débrouillards" du petit peuple, face au pouvoir des dynasties.

Le vice-président sortant, à la tête d'une des plus grandes fortunes du Kenya, s'est proclamé "hustler in chief" ("débrouillard en chef"), leader de la "hustler nation" ("nation des débrouillards") formée des millions de travailleurs pauvres qui tentent de survivre dans un pays en proie aux difficultés économiques. 

"Débrouillard en chef"

Son accession à la fonction suprême vient parachever la légende du "self made man" construite par cet enfant d'une famille modeste de la vallée du Rift (ouest). Ce diplômé en sciences, professeur avant de se lancer en politique dans les années 1990 au sein des jeunesses du parti de l'autocrate Daniel arap Moi, aime à rappeler qu'il n'a eu sa première paire de chaussures qu'à l'âge de 15 ans et qu'il vendait des poulets en bord de route. Il est aujourd'hui à la tête d'une grande entreprise de volailles, un des piliers de sa fortune qui comprendrait également des hôtels, des milliers d'hectares de terres... L'étendue de ses actifs a fait l'objet en septembre 2021 d'une vive controverse entre le ministère de l'Intérieur et le vice-président, qui a accusé le pouvoir de vouloir le discréditer.

"Dynasties" 

La rupture entre Ruto et le président Uhuru Kenyatta, aux côtés duquel il a été élu en 2013 et 2017, est consommée depuis plusieurs années. Le chef de l'Etat l'avait en effet adoubé, l'assurant du soutien du parti présidentiel pour l'élection de 2022, n'ayant pas lui-même le droit de briguer un troisième mandat. Mais après sa réélection en 2017, suivie de violences qui avaient causé des dizaines de morts, Uhuru Kenyatta s'est progressivement rapproché de son opposant historique Raila Odinga, à qui il a finalement accordé son soutien. William Ruto est alors parti en croisade contre l'alliance des "dynasties" kényanes incarnées par Kenyatta et Odinga, héritiers de deux familles au coeur de la politique kényane depuis l'indépendance en 1963.

Crimes contre l'humanité 

Uhuru Kenyatta le Kikuyu, la première ethnie du pays, et William Ruto le Kalenjin, la troisième en nombre, s'étaient alliés en 2012 pour conquérir le pouvoir, dans ce qui avait été surnommé la "coalition des accusés". Ils étaient tous deux poursuivis pour crimes contre l'humanité par la Cour pénale internationale (CPI) pour leur rôle dans les violences post-électorales de 2007-2008, les pires depuis l'indépendance (plus de 1 100 morts et 600 000 déplacés). Les deux hommes étaient à l'époque dans des camps opposés, et Ruto allié à Raila Odinga. La CPI avait décrit William Ruto comme le principal planificateur des violences contre la communauté kikuyu dans son fief kalenjin de la vallée du Rift, avant d'abandonner toutes les poursuites en 2016.

"Born again"

Celui qui était l'un des hommes les plus craints du pays s'est employé à polir sa réputation sulfureuse qui mêlait accusations de violences, de corruption, d'appropriation de terres et de détournement de fonds qu'il ne cesse de démentir. "Il est considéré comme un des stratèges les plus efficaces de la politique kényane", souligne Nic Cheeseman, professeur à l'université de Birmingham (Royaume-Uni). Ce quinquagénaire, chrétien "born again" revendiqué et père de six enfants, se montre souvent affable. Sa rhétorique des "débrouillards", misant sur un clivage social plus qu'ethnique, a notamment trouvé un écho chez les jeunes. 

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