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Le divorce de Bill et Melinda Gates interroge sur l’avenir de leur fondation très active sur le continent africain

La Melinda et Bill Gates fondation (MBGF) affirme avoir dépensé quelque 54,8 milliards de dollars depuis sa création, principalement dans des campagnes de vaccination, la scolarisation et la lutte contre la pauvreté.

Article rédigé par Michel Lachkar
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le milliardaire américain Warren Buffett (à droite) annonce l'apport de 31 milliards d’actions à la fondation Bill et Melinda Gates. New York, Conférence de presse, le 26 juin 2006. (SPENCER PLATT / GETTY IMAGES NORTH AMERICA)

Malgré leur divorce Bill et Melinda Gates devraient continuer à diriger ensemble leur fondation caritative qui emploie quelque 1600 personnes dans le monde. Mais l’inquiétude est réelle, à la hauteur des milliards dépensés chaque année dans les secteurs de la santé et de l’éducation sur le continent africain.

Des milliards pour la santé

Première priorité affichée depuis la création de la fondation en 2000, la lutte contre le paludisme, dans laquelle la fondation a dépensé 2 milliards de dollars, avec la production et la distribution de moustiquaire imprégnées. La MBGF a également dépensé 10 milliards de dollars, dans la vaccination contre la polio et pour alimenter le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Lors de l'épidémie d'Ebola en 2014, la fondation a également été au rendez-vous.

Des actions élargies depuis à l'accès à la contraception et au contrôle des naissances, sujet sensible en Afrique. Sur la forte croissance démographique du continent Bill Gate exprimait ainsi son point de vue ainsi dans Jeune Afrique "C’est autant un problème qu’une chance. Si un président ne peut pas faire en sorte que sa population soit bien nourrie, bien formée et ait un emploi, oui, c’est un souci. Il faut pouvoir assurer un avenir à chacun. Nous ne sommes pas là pour dicter aux femmes leur comportement, mais elles doivent avoir le choix et pouvoir accéder à la contraception."

"Nous sommes déçus que Donald Trump ne comprenne pas à quel point aider les pays africains à devenir émergents et stables est une obligation morale autant que stratégique."

Bill Gates

Jeune Afrique

Engagé dans la lutte contre le Covid

Présente également dans la lutte contre la pandémie, la fondation engage dès février 2020,  plus de 230 millions de dollars, pour fournir tests de détection, des équipements de protection et épauler des services sanitaires débordés dans certains pays en développement. MBGF a ainsi aidé plusieurs pays africains à mettre à niveau leur réponse sanitaire. Elle contribue aussi à l'OMS et au programme mondial Covax d'aide à la fourniture de vaccins aux pays les plus pauvres. 

Mais ces milliardaires philanthropes (pour certains nécessairement cupides) n'échappent pas aux critiques, voire au complotisme. Sur les réseaux sociaux, Bill Gates est accusé d’avoir créé le virus, pour écouler ses vaccins et tracer la population avec des puces qui y seraient dissimulées. Un véritable délire complotiste alors que dans les faits, le milliardaire alerte depuis des années sur le risque de pandémie. 

Révolution verte versus OGM

Ce que l'on peut peut-être leur reprocher c'est qu’en se rendant indispensables, ils entretiennent la dépendance à l’aide, et évite aux Etats africains de se prendre en main. Il est vrai qu'en vingt ans d’existence et après avoir dépensé des dizaines de milliards de dollars, la BMGF n’a évidemment pas éradiqué la pauvreté comme elle le promettait, ni même la famine. Comment en aurait-il été autrement, le nombre de pauvres suit dans ces pays l'augmentation de la population. Mais ce qui est certain, c'est que sans la BMGF, cela aurait été bien pire. 

Critique plus justifiée, la Fondation compte de nombreux détracteurs parmi les agriculteurs, qui lui reprochent la diffusion de semences OGM et d’engrais chimiques. Bill Gates ne s’en est d’ailleurs jamais caché : sa révolution verte passe par des organismes génétiquement modifiés, résistants à la sécheresse et aux insectes ravageurs.

Au sein de la BMGF, celui qui dirige depuis 2006 la recherche sur ce sujet n’est autre que Rob Horsch, ancien vice-président du développement international chez… Monsanto. Gates affirme d’ailleurs que "Monsanto cède gratuitement ses semences à la fondation", ce qui interroge. 

D'où vient l'argent ?

Au début de la fondation, les Gates lui ont apporté environ 20 milliards de dollars d'actions Microsoft. En 2006, le célèbre milliardaire Warren Buffett annonce qu'il va lui donner une grande partie de sa fortune, sous forme d'actions de sa holding financière Berkshire Hathaway. En 2010, lui et les Gates lancent le "Giving Pledge (faire un don)", encourageant les ultra-riches à donner au moins 50% de leur fortune à des activités caritatives, y compris la fondation Gates, un engagement qu'ont pris  plus de 200 personnalités dans le monde. Aujourd'hui, la fondation dispose d'un total de dons estimé à plus de 50 milliards de dollars. Un joli pécule qui s’érode peu, la BMGF ne dépense pratiquement que ce qu’elle gagne. Ses placements en actions lui rapportent des dividendes pour financer ses activités. Melinda Gates, très impliquée n’excluait qu’un secteur d’investissement : "celui du tabac, car ce ne serait pas très cohérent avec leurs actions dans la santé".   

Incertitudes sur l'avenir

Bill Gates, 4e homme le plus riche du monde selon Forbes avec une fortune évaluée à 124 milliards de dollars, et Melinda se sont engagés à continuer à œuvrer ensemble pour la fondation, mais vont-ils continuer à lui accorder l'essentiel de leur fortune, comme ils s'y étaient engagés ? Leur séparation ouvre désormais la question.

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