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Afrique : coronavirus et liberté de la presse ne font pas bon ménage

Dans un communiqué, l'ONG Reporters sans frontières s'inquiète de la multiplication des entraves au travail des journalistes sur l'épidémie dans plusieurs pays d'Afrique. 

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Les journalistes sont de plus en plus souvent empêchés d'exercer leur métier librement dans plusieurs pays d'Afrique, dénonce RSF. (Mohamed Abd El Ghany / REUTERS)

"Reporters sans frontières (RSF) déplore une multiplication des actes d’intimidation, d’agression et de censure visant les journalistes et médias du continent qui couvrent la crise sanitaire en cours." 

Ainsi, un caméraman de la télévision kényane NTV a été agressé par un policier, alors qu'il filmait la dispersion musclée d'une foule, qui attendait un ferry à Mombasa à deux heures du couvre-feu. Après des coups de bâton et des tirs de grenades lacrymogènes, certains passants ont alors été regroupés par la police en contradiction complète avec les règles de distanciation sociale. Un chaos que les autorités ne voulaient sans doute pas trop ébruiter.

(Le chaos à Likoni lorsque les policiers ont dispersé les usagers du ferry une heure avant le couvre-feu)

Un autre caméraman, en RDC cette fois, a été pourchassé par la police alors qu'il effectuait un reportage sur le confinement imposé à la population. Renversé de la moto-taxi sur laquelle il circulait, Tholi Totali Glody est à l'hôpital avec une jambe cassée.

Des journaux écartés

Il existe aussi des méthodes plus discrètes pour museler la presse. Il s'agit notamment de trier sur le volet les médias qui ont accès à la communication officielle et d'écarter ainsi les plus critiques. "Les autorités du Nigeria et du Liberia ont décidé de limiter l’accès à la présidence à une poignée de médias, presque tous contrôlés ou proches du pouvoir. Celles du Cameroun ont exclu de la communication gouvernementale plusieurs médias privés critiques très populaires", explique RSF.

Dans le même esprit, en Egypte, une journaliste du quotidien britannique The Guardian, Ruth Michaelson, a été priée de quitter le pays. Dans un article, elle citait une étude selon laquelle l'Egypte connaissait bien plus de cas que ce qui est officiellement annoncé.

Il y a enfin la sanction judiciaire. La "diffusion de fausses nouvelles" est une accusation très prisée. Deux journalistes ivoiriens en ont fait les frais pour avoir révélé deux cas de coronavirus dans une prison d'Abidjan. "Une fausse nouvelle", selon l'administration pénitentiaire que la justice a sanctionnée d'une amende de 5 millions de francs CFA (7 600 euros) à chacun.

Inquiétude pour les journalistes emprisonnés

De son côté, une autre organisation, Commitee to protect journalists (CPJ), réclame la libération de tous les journalistes détenus. Ils seraient plus de 250 derrière les barreaux dans le monde, souvent condamnés pour diffamation, des "prisonniers politiques", affirme le comité. Dans les pays touchés par le coronavirus, il s'agit pour eux "d'une question de vie ou de mort", l'isolement étant impossible en prison et le matériel de protection inexistant.

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