L'annonce d'une normalisation des relations avec Israël ne passe pas au Soudan
L'accord impulsé par le président américain Donald Trump vise à mettre fin à des décennies d'hostilités entre Khartoum et l'Etat hébreu.
Après les Emirats arabes unis et Bahreïn, le Soudan a annoncé à son tour la normalisation de ses relations avec Israël. Si une partie des Soudanais y voit un moyen de briser l’isolement du pays, la grande majorité l’assimile à une trahison à la "cause panarabe" et aux Palestiniens.
Le contexte
L’annonce officielle de la normalisation des relations entre les deux pays ennemis a été faite le 23 octobre à partir de Washington par le président américain. Elle a eu lieu à quelques jours à peine de la présidentielle du 3 novembre aux Etats-Unis. Cette décision, présentée comme "une victoire pour les Etats-Unis et la paix dans le monde" par Donald Trump, intervient après celle du retrait du Soudan de la liste "noire" américaine des pays soutenant le terrorisme. Khartoum réclamait depuis des années la levée de cette sanction en vigueur depuis 1993. La demande s'est accentuée après la chute d'Omar el-Béchir et l'émergence d'un pouvoir de transition.
La fin de l'isolement
Combinée à la sortie de la liste noire américaine, la normalisation avec l'Etat hébreu est perçue par une partie de l'opinion comme un moyen de briser l'isolement du Soudan.
L'accord va permettre "de réintégrer la communauté internationale" et faciliter le dialogue avec "la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI)", affirme à l’AFP l'analyste et rédacteur en chef du quotidien al-Tayar, Othman Mirghani. Khartoum y voit un intérêt économique majeur et plusieurs hommes d'affaires soudanais espèrent des retombées salutaires pour les entreprises et le commerce. De nombreux accords de coopération sont prévus notamment dans les domaines agricoles, commerciaux et économiques.
Une "trahison"
Ce "formidable revirement", selon les propres termes du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, est loin de faire l'unanimité à Khartoum. Les Soudanais souhaitaient une levée des sanctions mais ne s’attendaient pas à cette contrepartie. Une grande majorité d'entre eux reproche à ses dirigeants d'avoir franchi une ligne rouge en trahissant "la cause panarabe" cristallisée autour du sort des Palestiniens.
Un sondage réalisé en octobre dernier par le Centre arabe pour la recherche et la politique révélait que 79% des personnes interrogées s'opposaient à l'établissement de relations avec Israël. Parmi les premiers à décrier ce rapprochement, on compte notamment les chefs religieux soudanais et le parti al-Oumma de Sadek al-Mahdi.
Pour tenter de faire passer la pilule, le Premier ministre soudanais Abdallah Hamdok a souligné que l'accord de normalisation n'entrerait en application qu'après ratification par le pouvoir législatif. Or, le Soudan ne dispose toujours pas d’un Parlement de transition.
Né d'un partage du pouvoir entre militaires et représentants civils, le gouvernement actuel a pour mission de mener une transition de trois ans vers un régime civil. En plus de ce défi, le nouveau pouvoir en place devra éviter les divisions nées de l'accord de normalisation avec l'Etat hébreu.
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