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Zuma échappe à une nouvelle motion de censure

Une fois de plus, le controversé président sud-africain Jacob Zuma a échappé mardi 8 août à une motion de défiance. Soutenue par une alliance des libéraux et de la gauche radicale, elle a été rejetée à 198 voix contre et 177 voix pour. Une victoire pour le chef de l’Etat mais son parti, le Congrès national africain (ANC), au pouvoir depuis 1994 apparaît plus divisé que jamais.
Article rédigé par Chloe Berthod
France Télévisions
Publié
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Le président Jacob Zuma célébrant sa victoire mardi 8 août après le rejet par le parlement sud-africain de la motion de défiance visant à le destituer.  ( AP/SIPA)

Décidément, Jacob Zuma porte bien son surnom. Le « Teflon » a survécu mardi à sa neuvième motion de défiance depuis son arrivée au pouvoir en 2009. Sa présidence, entachée par des scandales à répétitions se poursuivra donc jusqu’à la fin de son mandat en mai 2019. Le président, contesté jusque dans son propre camp, l’ANC, semble pourtant immunisé de toutes les accusations de corruption et d'abus de biens sociaux dont il a fait l’objet ces dernières années. La dernière affaire en date, est celle du limogeage fin mars du très respecté ministre des Finances Pravin Gordhan, opposant aux dérives budgétaires du gouvernement, et engagé contre la corruption.

Ce remaniement, qui avait immédiatement provoqué une chute du rand sur les marchés, est à l’origine de cette énième motion de défiance, l’opposition dénonçant une gouvernance «irrationnelle, irresponsable et imprudente». Jacob Zuma est soupçonné d’avoir remercié son ministre des Finances et neuf autres ministres, sous l’influence de la richissime famille d’hommes d’affaires d’origine indienne, les Gupta. Un rapport de la médiatrice de la République, publié en novembre 2016  faisait état de liens controversés que le président sud-africain et son entourage entretenaient avec les Gupta à la tête d’un empire industriel et médiatique.


Une énième motion de défiance 
Pour la première fois, les députés réunis au Parlement dans la ville du Cap étaient appelés à voter la motion de défiance à bulletin secret. L’opposition, emmenée par les libéraux de l’Alliance Démocratique (AD) et la gauche radicale des Combattants pour la liberté économique (EFF), espérait ainsi qu’une partie des députés de l’ANC se joindrait à elle pour voter la motion et obtenir la majorité absolue (soit 201 voix pour 400 députés).

Et ce n’est pas passé loin. Si la motion a finalement été rejetée, seuls 198 députés ont réitéré leur confiance au Président alors que l’ANC compte 249 députés au parlement... Les députés de l’opposition n’ont eu d’ailleurs de cesse pendant le débat, souvent houleux et animé, de souligner qu’il ne s’agissait pas « d’une motion de pour retirer l’ANC du pouvoir, mais d’une motion pour démettre Jacob Zuma », en vain.  


Un parti divisé et affaiblit 
Une stratégie qui s’appuyait pourtant sur des dissonances au sein même de l’ANC. Depuis quelque temps, des voix s’élèvent publiquement dans les rangs du parti de feu Nelson Mandela, contre le sulfureux et encombrant Jacob Zuma. A commencer par le vice-président, Cyril Ramaphosa chef de file des « frondeurs » et candidat sérieux à la succession de M. Zuma en 2019. L’AFP rapporte d’ailleurs que Makhozi Khoza, députée de l’ANC, avait annoncé qu’elle voterait pour la motion, déclarant « Un vote de défiance n'est pas un vote contre l'ANC, c'est un vote contre la corruption ». Le 8 août, pendant le débat précédant le vote, le ministre des Arts et de la Culture n’a pas hésité à parler de «Coup d’Etat». La fracture entre les membres du parti est donc bel et bien consommée.


Quel avenir pour l’ANC au pouvoir depuis la fin de l’apartheid ? Aux élections locales de mai 2016, le parti avait déjà subi une déroute historique, perdant plusieurs grandes villes, comme la capitale Prétoria au profit de l’alliance entre la droite et l’extrême gauche. Dans une interview à Jeune Afrique, la chercheuse Marianne Severin, avoue « ne pas donner cher de [leur] peau pour les prochaines élections ». Même s’il reste majoritaire dans l’opinion publique, les électeurs pourraient se détourner d’élus ayant décidé de soutenir un président de plus en plus impopulaire. Dans un sondage Ipsos publié en mai 2017, 62% des partisans de l’ANC désapprouvaient l’action de Jacob Zuma, contre 54% de soutien en décembre 2016. 

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