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Afrique: les lacs qui tuent sous contrôle

La station pilote de dégazage du lac Kivu est en place depuis mars 2017. Objectif: retirer le gaz carbonique meurtrier qui peut s’échapper à tout moment des eaux et menacer une population de deux millions de personnes. En 1986, au Cameroun, un phénomène similaire avait provoqué la mort de 2000 habitants.
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Le lac Kivu à Goma, en RDC. (AFP)

Le lac Kivu est dit méromictique. Ses eaux se mélangent très rarement. «Ce type de lac méromictique peut se former pour un certain nombre de raisons mais essentiellement parce que le bassin est exceptionnellement profond et encaissé par rapport à la superficie du lac», explique le site aquaportail. Or, au fond, les roches volcaniques et les bactéries libèrent une quantité considérable de CO2 qui s’accumulent. A 300 mètres sous la surface du lac, des millions de m3 de CO2 et de méthane attendent. Un mouvement d’eau provoqué par exemple par un tremblement de terre provoquerait la remonté à la surface de ce gaz et la mort pour la population voisine.

Les scientifiques appellent cela une explosion limnique. Trois lacs seulement dans le monde ont cette capacité: le Kivu et les lacs Nyos et Monoun au Cameroun.
 
Le Cameroun, après les accidents mortels de 1984 au lac Mounoun puis de 1986 au lac Nyos, a procédé à des opérations préventives de dégazage. Sur le lac Kivu, partagé entre la RDC et le Rwanda, l’affaire traîne. On en parle depuis 2007. Il a fallu attendre dix ans pour voir installer une station pilote de dégazage sur ses eaux. La concentration la plus forte se situe dans le golfe de Kabuno, au nord-ouest du lac, dans les eaux territoriales congolaises. Dès 12 mètres de profondeur, la concentration en gaz carbonique est proche de la saturation avec trois milliards de m3, et une explosion est possible.

La technique employée est la même que pour les lacs camerounais. Elle a été mise au point par un ingénieur français. Il s’agit de faire remonter lentement les eaux gazeuses à la surface, afin qu’elles relâchent dans l’atmosphère le CO2. On amorce le phénomène par pompage et il se poursuit seul.
 
L'unité de dégazage installée à Kibuye permet de produire 26 Mw d'électricité. (AFP)

Un autre projet au Rwanda
La présence de ce gaz a fait naître un autre projet sur la rive rwandaise du lac Kivu. Kivuwatt, un projet bien plus ambitieux de 180 millions d’euros, qui veut récupérer les gaz pour les transformer en électricité. La centrale a été inaugurée en avril 2016.

L’entreprise ContourGlobal est parvenue, au bout de sept ans de recherches, non seulement à remonter les gaz, mais également à isoler le méthane pour produire de l’électricité. La production est encore modeste, 26 Mw, mais c’est déjà le quart de la production nationale, et elle vise les 100Mw à terme.

Ainsi, le Rwanda assure à la fois la sécurité et le confort pour les riverains du lac. Une ressource qui, selon les experts, pourrait durer un siècle.

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