Rwanda : la France a fait "un grand pas, nous devons l'accepter", salue Paul Kagame
Le chef d'Etat rwandais juge "très important de répondre à toutes les responsabilités".
La France a fait "un grand pas, nous devons l'accepter", a expliqué vendredi 28 mai dans un entretien à France Inter et l'AFP Paul Kagame, le président rwandais après la visite d'Emmanuel Macron au Rwanda. Dans son discours, le chef de l'Etat français a reconnu jeudi les "responsabilités" de la France dans le génocide, qui a fait au moins 800 000 morts, essentiellement dans la minorité tutsi. Mais elle n'a "pas été complice", a souligné le dirigeant français qui n'a pas formulé d'excuses ni demandé pardon.
"Leurs vies ont été brisées au-delà de l'imaginable"
"Il y a des gens qui diront toujours 'ce n'est pas suffisant' et ils ont le droit de le penser et de le dire", a expliqué Paul Kagame qui juge "très important de répondre à toutes les responsabilités". "Est-ce que ça répond à tout, à toutes les questions posées ? Non, je ne pense pas. Est-ce que les survivants ont le droit de critiquer un certain nombre de choses ? Oui, ils ont le droit de critiquer un certain nombre de choses. Leurs vies ont été brisées au-delà de l'imaginable", a précisé le président rwandais qui salue "un grand pas en avant". "Il faut l’admettre, l’accepter et il faut aller de l'avant vers des pas additionnels lorsque ce sera possible."
Paul Kagame salue également les promesses d'Emmanuel Macron qui s'est engagé à tout faire pour que les génocidaires soient jugés. "Ce que l'on demande ici c'est simplement la justice ! Si justice est faite en France, j’en serai heureux. Je n’insiste pas sur la forme, j'insiste sur le fait que ces gens, qui ont commis des crimes graves, doivent être tenus responsables d'une manière ou d'une autre. C'est le seul point important", dit Paul Kagame. L'étape de jeudi pose les fondations d'une "relation meilleure et plus profonde entre le Rwanda et la France", selon lui.
"Les accusations continuent de pleuvoir"
Certains détracteurs du régime estiment cependant que cette réconciliation se fait aux dépens des droits de l'homme, accusant la France de rester silencieuse sur les atteintes dénoncées par des activistes et des ONG (liberté de la presse bafouée, opposition muselée, morts en détention...). "Je ne vois rien de mal, que l'on qualifierait de mal, qui se passe ici et qui ne se produit pas là d'où vous venez", rétorque Paul Kagame aux journalistes français.
"Quand ça se passe chez les autres, personne ne s'en mêle. Quand c'est ici, nos problèmes doivent être traités par l'extérieur, ou ils sont créés par l'extérieur", poursuit le chef d'Etat rwandais. "Les gouvernements ont utilisé ces ONG. Ils ont même utilisé les médias d'une façon très étrange, très bizarre. Des gens vont voir les médias, ils accusent ceux qu'ils veulent accuser, et ça doit être cru… C'est très grave, parce que les accusations continuent de pleuvoir et on ne peut pas y répondre. C'est ça la liberté à laquelle vous dites que vous êtes associés ?", assène-t-il.
Homme fort du pays depuis 1994, président depuis 2000, Paul Kagame a fait modifier la Constitution en 2015, ce qui lui permet théoriquement de rester au pouvoir jusqu'en 2034. La prochaine élection, en 2024, est encore loin, assure-t-il, affirmant se consacrer actuellement aux problèmes de son pays et du continent : "Je n'y pense pas beaucoup, je ne m'en préoccupe pas".
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