A table ! L'Economie dans l'assiette. En Afrique du Sud, devant du mielie pap
La nourriture sud-africaine se comprend grâce à deux grilles de lecture: son histoire et son agriculture. A l'instar des différents peuples qui composent sa population, et qui du temps de l'apartheid étaient bien distincts les uns des autres, les influences culinaires se sont agrégées, mais pas, ou peu, mélangées.
Avec les vagues successives d'arrivées sur son sol, ce sont autant de types de cuisines qui ont fait leur entrée sur le territoire sud-africain.
Aux origines
Initialement, et depuis des milliers d'années, l'Afrique du Sud était peuplée de tribus nomades. On en trouvait certaines dans la région du Cap, au sud du pays, en bord de mer, et d'autres au centre du pays, dans le «veld», vastes étendues herbeuses idéales pour les troupeaux ou les cultures. Suivant les tribus, les gens vivaient de la chasse du gibier, dont l'antilope (springbok), de la cueillette, voire de l'élevage de grands troupeaux.
De ce peuple originel, reste dans les régions rurales une alimentation typique de l'Afrique australe, saine et simple. Céréales complètes, fruits et légumes frais ou séchés, protéines animales essentiellement composées de poulet et mouton, exceptionnellement de bœuf, et aussi de lait et de protéines à base d'insectes: vers mopani séchés et mangés en saucisse, sauterelles, fourmis et coléoptères comestibles.
Fusion des vagues européennes
Au XVIIe siècle, les premiers étrangers à prendre pied sur ce territoire au bout du continent africain sont les Hollandais. Ces premiers colons initient la production de certains légumes et surtout leur consommation cuits.
Ils furent suivis de près, par un peu plus d'un millier de huguenots français. Leur présence aurait pu être anecdotique, s'ils n'avaient pas introduit la culture de la vigne sur ces terres australes. Même si ces protestants français furent absorbés en deux générations, l'Afrique du Sud était le huitième producteur mondial de vin en 2017. Elle concentre 90% de sa culture et sa production dans l'ex-colonie huguenote, au nord-est du Cap. Par ailleurs, les Français ont introduit et cultivé beaucoup de fruits et surtout mis en valeur les fruits locaux en en faisant des confitures.
Derrière Hollandais et Français, arrivent les Allemands qui apportent le savoir-faire dans la fabrication de saucisses, épicées ou pas, toujours très en vogue. Les Anglais pour leur part banaliseront les viandes rôties et surtout le pudding du Yorkshire ou encore pudding cuit à la vapeur, qui fera florès, et deviendra le mielie pap, plus familièrement appelé pap.
D'autres apports sont à imputer aux Portugais ou aux Italiens.
Et les influences asiatiques
En même temps que les Hollandais est arrivée toute une population de Malais. Très vite, ils se sont imposés comme cuisiniers et cuisinières des Bataves. Ils ont familiarisé les populations aux saveurs aigres-douces. Mais aussi, grands adeptes d'épices orientales et indiennes, ils ont importé les curries, condiments, chutney et autres pickles.
Chutney et pickles qu'on retrouve dans une cuisine indienne, elle-même mâtinée d'influences malaises. Et pour finir sur une période beaucoup plus récente, ce sont les Chinois qui ont fait leur apparition sur ces terres du bout du monde. Là encore, toute une cuisine les a suivis, pour satisfaire les papilles des nouveaux immigrés taïwanais.
Les assiettes monochromes
Bizarrement, chaque population a gardé sa propre culture culinaire, même si on peut constater quelques apports de l'une à l'autre, la notion de «plat national» n'existe pas vraiment en Afrique du Sud.
Les Afrikaners, ces Sud-Africains blancs descendants des colons hollandais-européens mangeront volontiers un «braai» (barbecue) accompagné de mielie pap (pudding de maïs), quand son compatriote noir se régalera d'une tête de bœuf et abats accompagnés de mielie pap ou d'umngqusho (maïs concassé et haricots noirs). Les Malais, dans le même temps, dégusteront un bobotie (gratin de viande hachée ou émincée avec beaucoup d'épices). Le seul plat transversal à toutes les cultures et cuisines est le mielie pap, plus simplement appelé pap.
Maïs, pap et umngqusho
Le pays est un gros producteur et consommateur de maïs. C'est même le premier producteur et exportateur du continent africain. Il est cultivé dans deux grandes régions d'Afrique du Sud. Si l'extrême nord du pays est consacré à la production de fruits et légumes, en dessous, le tout le premier tiers nord du pays produit du maïs et élève des cheptels et ce, jusqu'au centre où commence le «veld». La deuxième zone de culture du maïs est plus une poche comparée à l'étendue de celle du nord. Elle se situe à l'extrême sud, au nord et à l'est de la ville du Cap.
Les Sud-Africains utilisent le maïs sous maintes formes, en farine, en semoule, concassée, en grains ou en épis. Le mieli pap est une sorte de pudding dont on fait varier le degré «d'humidification» et le temps de cuisson. Le produit obtenu va du gruau quasi liquide pris au petit déjeuner par les zoulous (tenant lieu de céréales mélangées avec du lait aigre, ou à des haricots, voire des abricots secs), à une version solide et moelleuse. La variante plus cuite de cette mixture est a mi-chemin entre le porridge et la polenta.
On peut ainsi faire varier la consistance de la préparation, de sèche et craquante à plus moelleuse ou liquide. Le pap existe aussi sous une forme plus épaisse ou plus friable, recouvert d'une sauce tomate et oignons, avec des légumes et de la viande. En réalité, ce qui caractérise ce pap est surtout sa neutralité gustative et sa capacité à afficher le goût de ce qui l'accompagne. Chaque famille à son sac de préparation toute prête pour faire son pap. Quand le maïs est moins moulu, ni farine, ni semoule, mais plutôt concassé, le plat le plus approchant est le umngqusho (maïs séché concassé et haricots secs).
La recette et à table !
Ingrédients
1kg de semoule ou de grains de maïs concassés
500 g de haricots noirs (black eyed peas)
sel
poivre
eau
Recette
Mélangez le maïs séché concassé et les haricots dans un grand saladier. Recouvrez d'eau froide. Couvrez d'un tissu et laissez reposer toute la nuit.
Le lendemain, enlevez l'eau et rincez.
Dans une grande casserole, mettez le maïs concassé et les haricots et recouvrez-les d'eau froide.
Portez à ébullition et laissez bouillir 10 minutes.
Baissez le feu et laissez mijoter à feu doux pendant 2h. Les grains doivent être tendres et pratiquement toute l'eau doit être absorbée. Si besoin est, rajoutez de l'eau en cours de cuisson.
Salez et poivrez.
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