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La mise en eau d'un grand barrage en Ethiopie inquiète l'Egypte

La mise en eau annoncée de l’Ethiopian Renaissance Dam, plus grand barrage d'Afrique, inquiète l’Egypte. L' impact de l'ouvrage sur le débit aval du Nil est difficile à prévoir. Le partage des eaux est un motif de conflit dans la région mais incite aussi à la coopération. Le Soudan veut sa part d'électricité, l'Egypte exige un très lent remplissage du barrage pour ne pas altérer le débit du Nil.
Article rédigé par Michel Lachkar
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Visite du Grand Ethiopian Renaissance Dam, construit sur le Nil bleu (nord-ouest de l'Ethiopie), en 2015. ( Minasse Wondimu Hailu/ Anadolu Agency/ AFP)

La construction du barrage Grand Renaissance sur le Nil bleu, commencé en 2012, est sur le point de s’achever dans le nord-ouest de l’Ethiopie. 145 mètres de hauteur, 1800 mètres de long, 20.000 personnes déplacées, ce sera le plus grand barrage d'Ethiopie et d'Afrique. D’une capacité de 6.000 MW, l'ouvrage permettra de remédier aux pénuries d’électricité et d'aider à l'industrialisation du pays. Mais ce qui est bon pour l'Ethiopie ne l'est pas nécessairement pour l'Egypte. Le Caire craint que cette eau ne soit utilisée à des fins d'irrigation, diminuant le débit en aval. Sans parler de l'évaporation et du blocage des limons dont les conséquences sont difficiles à évaluer.
 
67 milliards de m3 d'eau
La mise en eau de l'infrastructure doit créer un lac de 246 km de long (67 milliards de mètres cubes) et risque d’impacter les eaux du Nil qui traversent le Soudan et l’Egypte. Dans ce contexte, qui contrôle le débit du Nil Bleu (60% de l'eau du fleuve) contrôle l’eau du pays des Pharaons.

L’Egypte, «don du Nil» (Hérodote), a besoin du fleuve pour son agriculture, son énergie électrique et son alimentation en eau potable. Une ressource vitale pour un pays dont la population va doubler d’ici 2060.

Pour Le Caire, cette question relève donc de la sécurité nationale. Les autorités égyptiennes ont, par le passé, menacé de bombarder tout barrage réduisant le débit des eaux du Nil. Mais aujourd’hui, le projet Grand Renaissance ne peut plus être modifié. Autrement dit, la négociation s’impose.

Carte du Nil et ses affluents qui traversent huit pays africains (libre de droits )

La négociation s'impose
En août 2015, Ethiopie, Egypte et Soudan signent un accord où Addis Abeba s'engage auprès du Caire sur le maintien du débit du Nil et sur une utilisation restreinte de l'eau pour l'irrigation. «Nous sommes pleinement engagés à faire en sorte que la part égyptienne de l'eau du Nil ne soit pas affectée en raison de la construction du barrage», a de son côté déclaré le président soudanais Omar el-Bechir lors d’une visite du Premier ministre éthiopien, Hailemariam Desaleg.

Aujourd'hui, les divergences portent principalement sur le rythme du remplissage du barrage, qui pourrait durer entre 5 et 10 ans ans. En fonction de la fréquence des sécheresses dans la Corne de l’Afrique mais surtout de la pression de l’Egypte. Les autorités du Caire réclament un remplissage lent qui n’altère pas le débit aval. Les Ethiopiens, en revanche, veulent aller vite pour amortir un investissement évalué à 5 milliards de dollars.

Partage de l'eau et de l'électricité
Dans cette négociation, le Soudan a finalement décidé de soutenir l'Ethiopie. En effet, Khartoum recevra une partie de l'électricité produite par le barrage. Le Renaissance Dam permettra de stabiliser l'affluent du Nil et de limiter les inondations.

Ce barrage n'est que le dernier exemple des tensions liées au partage de l'eau dans la région. L'Ethiopie prévoit déjà la construction de nouvelles centrales hydroélectriques et le Soudan espère recevoir en abondance de quoi irriguer ses terres. Si l'Egypte voit dans ces projets une menace, elle pourrait aller jusqu'au conflit. Pour autant, des compromis semblent possibles.Tout est affaire de négociation.
 

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