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Les Soudanais célèbrent le premier anniversaire de la chute de l'ex-président Omar el-Béchir

Coronavirus oblige, il n'y aura pas de grands rassemblements à Khartoum, ni dans les autres villes du pays pour célébrer le premier anniversaire de la chute de l'ex-président Omar el-Bechir, balayé par la rue le 11 avril 2019. 

Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Une femme brandit le drapeau soudanais durant le soulèvement populaire contre le président Omar el-Béchir, le 12 septembre 2019 à Khartoum. (EBRAHIM HAMID / AFP)

C'est une date qui restera gravée à jamais dans la mémoire du peuple soudanais. Elle marque la fin du régime autocratique d'Omar el-Béchir. Après 30 ans de règne sans partage, le tout puissant président et chef suprême de l'armée était destitué de son "trône" par les militaires, sous la pression de la rue. C'était le 11 avril 2019. Il a depuis été traduit en justice, condamné et placé en détention dans la prison de Kobel à Khartoum, où lui-même enfermait ses opposants. Aujourd'hui, les révolutionnaires soudanais se souviennent de cette date comme si c'était hier.

Les gens criaient, d'autres pleuraient, d'autres encore embrassaient la terre de joie

Ahmed, un Soudanais présent le 11 avril 2019

à RFI

Très ému, Ahmed se souvient de tous ces gens qui étaient sur les barricades. Ils n'étaient pas politiciens. Ils voulaient tout simplement protéger "ce Soudan miniature que nous avions créé". Un Soudan avide de justice sociale et de liberté. 

Un régime rongé par la corruption et le népotisme

C'est une mesure de triplement du prix du pain qui met le feu aux poudres. Le coût de la vie est devenu insupportable. Pénurie de farine, d'essence et de liquidités, chute de la valeur de la monnaie, la pauvreté gagne le petit peuple au moment où la bourgeoisie du régime vit dans l'opulence. Le message du pouvoir à destination des quartiers périphériques de la capitale est menaçant : "Toute volonté de se rebeller sera réprimée dans la violence." La soif de liberté et de justice sociale a finalement été plus forte que les menaces proférées par "un pouvoir rongé par la corruption et les détournements des deniers publics" dénoncés par les révolutionnaires qui prennent la rue.

Les premières manifestations éclatent en décembre 2018 dans la ville d'Atbara, devenue un bastion révolutionnaire. Puis la révolte gagne la région de Port Soudan, principal port du pays à 1 000 km à l'est de la capitale. Le mouvement s'étendra ensuite à travers tout le pays. Un slogan est sur toutes les lèvres :"Le peuple veut la chute du régime... Liberté, paix, justice, la révolution est le choix du peuple." Pendant quatre mois, plusieurs milliers de révolutionnaires organisent un sit-in devant le quartier général de l'armée au cœur de la capitale, Khartoum. La pression de la rue finira par avoir raison de celui qui était arrivé au pouvoir par les armes en 1989. Omar el-Béchir est déposé par son armée et arrêté le 11 avril 2019 sous les acclamations de la foule. Mais les révolutionnaires soudanais ne sont pas encore au bout de leurs peines.

Les révolutionnaires dénoncent "un putsch"

L'armée a bien tenté de s'approprier la victoire du peuple en mettant en place "un conseil militaire de transition". Des milliers de manifestants s'y opposent. Ils bravent le couvre-feu et poursuivent le sit-in devant le quartier général de l'armée. La répression sera sanglante. Des hommes armés en uniforme tirent à balles réelles sur les manifestants pacifiques et font des dizaines de morts le 3 juin 2019. Le conseil militaire de transition ordonne une enquête et appelle à des élections "dans neuf mois au maximum". Les protestataires dénoncent "un putsch". Ils demandent justice pour leurs "martyrs".

Il a fallu la médiation de l'Ethiopie et de l'Union africaine pour aboutir à la signature d'un accord sur le principe d'un partage du pouvoir. Cet accord de transition signé le 17 août 2019 a abouti à la mise en place d'un Conseil souverain, composé de six civils et de cinq militaires. Il a permis la formation du premier gouvernement post-Béchir qui a prêté serment le 8 septembre 2019. 

C'est le début d'une nouvelle ère. Si nous réussissons, un nouveau Soudan sera construit

Abdallah Hamdok, Premier ministre de transition le 17 août 2019

Aujourd'hui, le nouveau pouvoir de transition peine à gérer une économie en lambeaux. Coupures de courant et pénuries sont fréquentes, les Soudanais font souvent la queue plusieurs heures pour acheter du pain ou de l'essence. Des pénuries qui rappellent celles qui ont déclenché la révolution en décembre 2018. "La route de la reprise économique sera longue. Elle nécessitera le soutien réfléchi, prolongé et coordonné des bailleurs de fonds traditionnels", confie à l'AFP Jonas Horner, chercheur à International Crisis Group (IGC). 

Une transition politique mise à rude épreuve

Ces derniers mois, la transition politique a été mise à rude épreuve par plusieurs incidents sécuritaires, dont une tentative d'assassinat non-revendiquée contre le Premier ministre de transition, Abdallah Hamdok, le 9 mars 2020. Depuis le début de la semaine, l'armée a été déployée dans les rues menant à son quartier général. Elle a démenti des informations de presse faisant état de menaces de coup d'Etat fomenté par des partisans du président déchu contre les autorités de la transition.

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