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Produits de terroir en Tunisie: quelles saveurs!
Une journaliste tunisienne nous avait prévenu de la tenue, à Yasmine Hammamet (65 km au sud-ouest de Tunis) du 24 au 26 mai 2016, de «Saveurs de Tunisie», «la première édition du Salon national des produits de terroirs et de qualité spécifique». Des produits typiques de ce pays aux paysages méditerranéens, désertiques... Géopolis a fait le déplacement.
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La visite commence fort. Dès l’entrée, une jeune fille, qui tient un stand d’huile d’olive, vous demande de goûter et de tester six huiles d’olive aromatisées. Notamment à la cannelle (bizarre !), au citron (pas mal), au laurier (excellent)…
On trouve ainsi toutes sortes de produits sur la petite vingtaine de stands que compte «Saveurs de Tunisie». Certains sont plutôt inattendus pour un Français. Par exemple la harissa, dont l’étalage regroupe les six plus grosses marques de la fameuse purée rouge. «Harissa, un plaisir national», proclame un panneau. «Celle qu’on consomme en France est souvent coupée à la carotte. Ici, elle se fabrique exclusivement à partir de piment, d’épices et d’ail», explique Geoffroy Peyrelade, consultant pour l’Agence française de développement (AFD) et responsable de MIT, une petite structure franco-tunisienne.
«Saveurs de Tunisie» propose aussi des boîtes de conserve de sardines à l’huile d’olive labellisées. Les poissons sont «fraîchement emballées» dans une usine près de Djerba (sud), assure la personne qui les présente. «Fraîchement emballées»? C'est-à-dire mises en boîte «dans les six heures» qui suivent la pêche pendant la saison, en juillet-août.
Sur le salon, il y a également des stands de dattes (succulentes !). Des confitures de grenade. Des figues de barbarie transformées en confiture, en mélasse. Et dont la coque sert… à l’alimentation du bétail, pour que, dans une démarche écologique, tout le fruit soit utilisé.
«Entreprise locale et solidaire»
Un seul stand présente des fromages, venus de la région de Jendouba (nord-ouest). Un aliment inhabituel dans le paysage gastronomique tunisien. Le fabricant, Haykel Abidi, a créé en 2015 une «entreprise sociale et solidaire». «Dans cette région, il y a une tradition de fromage de chèvre qui n’a jamais été exploitée», explique-t-il. Pour l’instant, il ne produit que du vache. Mais il va bientôt s’attaquer au chèvre. «Sa démarche peut aider à installer le fromage dans les habitudes de consommation des Tunisiens», pense l’une de ses amies.
Autre produit présenté : des compléments alimentaires fabriqués à partir d’extraits de feuilles d’oliviers. Ils sont notamment censés, entre autres qualités supposées, «augmenter le bon cholestérol, diminuer les risques cardio-vasculaires» etc.
Mais l’essentiel n’est pas là. Car ces compléments alimentaires sont fabriqués par une unité d’une vingtaine de personnes, propriété d’une entreprise tuniso-belge. Cette unité est installée à Sidi Bouzid (centre), région défavorisée du centre de la Tunisie, d’où est parti le mouvement révolutionnaire de 2010-2011. Tout un symbole pour une région où le chômage atteint des records.
Le salon entend ainsi promouvoir des initiatives susceptibles d’aider les économies locales. «Il s’agit souvent de produits de terroir dont certains ont une vraie démarche bio comme les grenades de l’oasis de Gabès (sud-ouest). De plus, ils sont très souvent excellents. Quand je mange une figue de Djebba (nord-ouest), je sais que je n’ai pas besoin de la laver : je redécouvre le plaisir des fruits», raconte Geoffroy Peyrelade, missionné par l’AFD pour aider certains de ces agriculteurs ou groupements d’agriculteurs.
«Problème : on a souvent du mal à valoriser ces produits très locaux en raison d’une mauvaise commercialisation», précise le consultant. Commercialisation souvent entre les mains d’intermédiaires «qui achètent très peu cher et revendent très cher», explique un bon connaisseur du milieu.
Heureusement, certaines chaînes comme Magasin Général (qui possède le français Auchan dans son capital) commencent à les distribuer. Les producteurs et ceux qui les aident doivent aussi faire porter leur effort sur le marketing. Dans une telle démarche, il n’est pas forcément facile d’expliquer simplement le projet intitulé «Promotion des groupements féminins en milieu rural pour la sécurité alimentaire et la génération de revenus en Tunisie».
Mais un tel salon le prouve : les choses progressent. «Ce que vous voyez là, c’est aussi le résultat du travail d’associations qui foisonnent et s’investissent au niveau local dans l’agriculture, l’écotourisme… Ces associations dégagent une énergie folle pour reconstruire ce pays. C’est l’une des multiples manifestations de la société civile en mouvement dans la Tunisie d’aujourd’hui», conclut Amel Jaiet, journaliste free lance dans le secteur touristique.
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