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Sommet sur l'Amazonie : "On n'a encore une fois pas voix au chapitre", dénonce le porte-parole de la Collectivité territoriale de Guyane

Les huit pays d'Amazonie sont réunis à partir de ce mardi au Brésil pour sauver la plus grande forêt tropicale du monde mais aucun représentant de la Guyane n'a été convié. "Il faut absolument écouter ce que les gens qui vivent sur les territoires ont à dire", estime la Collectivité territoriale de Guyane.
Article rédigé par franceinfo
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Le premier sommet de l'Amazonie, au Brésil, le 8 août 2023. (RICARDO STUCKERT / BRAZILIAN PRESIDENCY)

"On n'a encore une fois pas voix au chapitre, on sera spectateurs des discussions", dénonce Thibault Lechat-Vega, 3e vice-président de la Collectivité territoriale de Guyane chargé des affaires européennes et institutionnelles, porte-parole de la collectivité, sur franceinfo mardi 8 août, alors que s'ouvre un sommet sur l'Amazonie au Brésil.

>> Sommet de l’Amazonie : la forêt menacée par l'agriculture intensive du Brésil

Emmanuel Macron a décliné l'invitation du président Lula et envoie l'ambassadrice de la France au Brésil, Brigitte Collet. Aucun représentant de la Guyane, territoire recouvert à 95 % de forêt amazonienne, n'a été convié.

franceinfo : C'est le premier sommet international dédié à l'Amazonie. Est-ce que l'absence d'Emmanuel Macron est un problème ?

Thibault Lechat-Vega : On est vraiment dans l'incompréhension totale. D'abord parce qu'Emmanuel Macron décline l'invitation. Puis, parce que la Guyane n'est absolument pas associée à cette décision ni à cette manifestation. Nous sommes concernés par les problématiques de déforestation, d'orpaillage illégal et de reconnaissance des droits des populations autochtones. On n'a encore une fois pas voix au chapitre, on sera spectateurs des discussions qui se font dans un espace amazonien, où nous sommes situés géographiquement, mais en réalité où nous sommes complètement isolés politiquement. C'est d'autant plus problèmatique quand le président Emmanuel Macron utilise la position de la Guyane et de la forêt amazonienne pour avoir une voix sur la scène internationale sud-américaine. Et lorsqu'il s'agit d'être à la table des négociations, on voit qu'il n'y a plus personne. On ne comprend pas qu'il n'y ait pas eu au moins la ministre des Affaires étrangères.

Vous auriez aimé participer à ce sommet pour y dire quoi et pour y défendre quelles positions ?

Déjà pour y être, parce que la Guyane est dans un processus de décentralisation et d'autonomisation. Nous allons vers un prochain processus de consultation populaire pour savoir si les Guyanais veulent plus d'autonomie. Pour nous, c'est vraiment primordial d'y être présent avant même de savoir ce qu'on va dire. La deuxième chose, ce qu'on va dire, c'est que nous subissons toutes les problèmatiques qu'il y a en Amazonie française. On a l'impression qu'il y a une espèce de mise sous cloche du territoire de la Guyane pour en faire un espèce de grand exemple de ce qu'on fait de mieux en matière de préservation de l'environnement, en oubliant qu'il y a des gens qui habitent sur ce territoire. Il faut absolument écouter ce que les gens qui vivent sur les territoires ont à dire et ce qu'ils attendent.

En Guyane, les problèmatiques économiques et écologiques sont liées. Est-ce qu'elles vous semblent bien comprises, bien suivies, depuis Paris, depuis la métropole ?

Absolument pas. On a l'impression d'être un espèce de faire-valoir. En Guyane, plus de 50 % du territoire est concerné par une norme de protection environnementale.

"On a l'impression qu'on en fait un espèce de slogan 'Make our planet great again' alors qu'en réalité sur ce territoire, et même au cœur du parc amazonien, les ressources naturelles sont pillées par les orpailleurs clandestins"

Thibault Lechat-Vega, de la Collectivité territoriale de Guyane

à franceinfo

Ce sont 12 tonnes d'or qui sont extraites chaque année [en Guyane] avec du mercure qui empoisonne les rivières et les populations autochtones. Derrière cet espèce d'affichage, d'écologie de comptoir de café, la réalité est bien autre. On a des populations qui souffrent jusqu'au coeur du parc amazonien qui, elles, demandent à ce qu'on respecte leur environnement, mais qui ont aussi envie d'avoir accès à l'électricité, à l'eau potable et à l'éducation pour leurs enfants. La question c'est comment on concilie ces aspirations légitimes et l'ambition de protéger notre environnement. Aujourd'hui, la réalité c'est qu'on ne fait ni l'un, ni l'autre.

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