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Comment Obama peut-il contrôler les armes aux Etats-Unis ?

Malgré les réticences du Congrès, le président dispose de plusieurs leviers pour agir.

Article rédigé par Camille Caldini
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Un fusil d'assaut Bushmaster AR15, modèle qui a été utilisé lors de la tuerie du Connecticut le 14 décembre 2012. (JOSHUA LOTT / GETTY IMAGES NORTH AMERICA /AFP)

Contrôler les armes ou non ? Le débat qui obsède les Etats-Unis a encore une fois ressurgi, quelques heures à peine après le massacre de 26 personnes, dont 20 enfants, dans une école du Connecticut (Etats-Unis), vendredi 14 décembre. Devant la puissance politique de la National Rifle Association (NRA), lobby pro-armes, la Maison Blanche peine à imposer le contrôle des armes à feu. Barack Obama a cette fois promis des "efforts significatifs" pour "protéger nos enfants", sans plus de précisions. Francetv info a listé les options qui s’offrent à lui.

1Interdire à nouveau les armes d'assaut

L'idée. Le deuxième amendement de la Constitution américaine, férocement défendu par la NRA, garantit le droit des citoyens à posséder une arme. Pourtant, en 1994, sous la présidence de Bill Clinton, le Congrès américain, à majorité démocrate, a voté le Federal Assault Weapons Ban, interdisant la fabrication et la vente d’armes semi-automatiques à destination de la population civile, jusqu’en 2004. La sénatrice démocrate de Californie, Dianne Feinstein, à l'origine de la loi, veut la soumettre à nouveau, dès janvier 2013. Dans sa ligne de mire, notamment, le fusil Bushmaster AR-15. Ce modèle a été utilisé par Adam Lanza à l’école Sandy Hook et par James Holmes dans une salle de cinéma d’Aurora (Colorado) lors de la première de The Dark Knight Rises, le 19 juillet 2012.

Ses limites. Contrairement à Bill Clinton, Barack Obama ne dispose pas de la majorité au Congrès. Les élus républicains, réticents au contrôle des armes à feu, risquent de bloquer le renouvellement du projet de loi, comme ils l'ont déjà fait.

2Copier Bill Clinton

L'idée. Si le Congrès fait barrage, le président des Etats-Unis dispose néanmoins d'un pouvoir exécutif. Avant Barack Obama, Bill Clinton a, de cette manière, limité l'importation d'une cinquantaine d'armes semi-automatiques, en avril 1998. L'ex-président a aussi durci les règles d'attribution des licences aux armureries et interdit l'importation des pistolets automatiques israéliens de type Uzi, comme le rapportait Time magazine (en anglais) en 2001.

Ses limites. Barack Obama s'exposerait éventuellement aux représailles du Congrès, y compris sur des sujets très éloignés du contrôle des armes. En revanche, contrairement à son premier mandat, le président ne court plus aucun risque électoral, puisqu'il ne peut plus se présenter à l'élection présidentielle.

3Combler les failles de la loi actuelle

L'idée. "Avec la même facilité qu'on télécharge un mp3, n'importe quel propriétaire d'un ordinateur et d'une carte de crédit peut commander sur internet 6000 munitions, des bombes lacrymogènes, des gilets pare-balles et des casques du SWAT [unité d'élite de la police]", constatait le New York Times après la tuerie d'Aurora. La loi Brady de 1993, qui rendait obligatoire les vérifications d'antécédents criminels et psychiatriques des particuliers achetant des armes, est pleine de failles. Elle ne s'applique qu'aux armuriers agréés. La vente sur internet, qui a explosé depuis, notamment entre particuliers, ainsi que les salons d'expositions, rassemblent 40% des ventes, selon Le Monde (édition abonnés), et échappent à tout contrôle. Quant aux armuriers qui perdent leur licence, ils peuvent vendre leur stock restant sans effectuer les contrôles obligatoires, précise le National Journal (en anglais).

Ses limites. Aucune, si ce n'est technique, puisqu'il s'agit surtout de faire appliquer la loi actuelle. La NRA n'oserait pas s'opposer à un contrôle renforcé des acheteurs ayant des antécédents criminels ou psychiatriques. Depuis la fusillade du vendredi 14 décembre, elle a d'ailleurs gardé le silence et a même fermé sa page Facebook, d'après le site Adweek.

Des partisans du contrôle des armes à feu manifestent devant la Maison Blanche, à Washington, vendredi 14 décembre. (LARRY DOWNING / REUTERS)

4Mettre la pression sur les fabricants d'armes

L'idée. Plus d'un million d'armes à feu sont officiellement vendues chaque mois aux Etats-Unis, selon Le Figaro. Pour 100 personnes, le pays compte 89 armes (contre 31 en France). Mais qui est le plus gros acheteur ? C'est le ministère de la Défense, selon l'ancien gouverneur de New York, Eliot Spitzer, auteur d'une tribune sur Slate.com (en anglais). Ce qui place l'Etat en position de force. "L'Etat fédéral n'a qu'à dire qu'à partir de maintenant, le gouvernement n'achètera plus d'armes ni de munitions aux entreprises qui continuent de vendre des armes semi-automatiques et des chargeurs de plus de dix balles aux particuliers", écrit Eliot Spitzer.

Ses limites. L'industrie de l'armement pèse suffisamment lourd pour décourager les tentatives de boycott. Selon les sources, elle génère des revenus annuels de 2,3 à 10 milliards de dollars (1,7 à 7,5 milliards d 'euros), et emploie plusieurs dizaines de milliers de personnes, estime Le Figaro.

5Fabriquer l’anti-NRA

L'idée. Avec ses quatre millions de membres donateurs et son budget de 220 millions de dollars, la puissante National Rifle Association manque d'adversaire à sa taille. Le maire de New York, Michael Bloomberg, en rêve pourtant. Il est le cofondateur de l'association Mayors against illegal guns, "Les maires contre les armes illégales", qui rassemble plus de 700 maires et revendique 340 000 membres et un budget de 4 millions de dollars, selon le site d'information Capital New York (en anglais). Jusqu'à présent, c'est David contre Goliath, mais les soutiens de Michael Bloomberg assurent que l'organisation deviendra plus forte en 2014, lorsque le mandat du maire de New York arrivera à son terme et qu'il pourra consacrer sa notoriété et son temps à la promotion du contrôle des armes à feu.

Ses limites. La NRA, fondée en 1871, a plus de deux cents ans d'avance et un budget plus de cinquante fois supérieur. Il faudra des années à Michael Bloomberg pour rattraper ce retard.

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