En Floride, l'affaire Trayvon Martin exacerbe les tensions raciales
Multiplication de messages racistes, patrouilles armées de néonazis, volonté de vengeance du New Black Panther Party : le climat est électrique à Sanford, après le meurtre d'un jeune Noir de 17 ans.
A Sanford (Floride), l'affaire Trayvon Martin réveille les vieux démons américains. George Zimmermann, le meurtrier présumé de ce jeune Noir de 17 ans, a comparu pour la première fois devant un tribunal, jeudi 12 avril. La veille, le procureur spécial, Angela Corey, avait annoncé qu'il était poursuivi pour meurtre sans préméditation.
Cette étape judiciaire pourrait apporter un peu d'air à un climat de plus en plus tendu dans la ville. De nombreux journaux américains et britanniques se sont en effet inquiétés de tensions racistes ravivées à la suite du meurtre. Explications.
• Le lourd passé de Sanford
"Imaginez qu'un Noir ait tué un Blanc". Selon le blog Floride Sunshine Corridor du Monde, cette phrase est devenue la plus prononcée à Sanford après le meurtre de Trayvon Martin. La ville vit au rythme des rebondissements de l'affaire, laquelle passionne les foules. Ce même blog explique en quoi Sanford est un terrain fertile à ces réactions contrastées.
On y apprend que Sanford la blanche a longtemps été voisine de Goldsboro la noire, entre 1891 et 1911. Cette dernière, "deuxième cité noire fondée en Floride après l’émancipation de 1863, était peuplée de descendants d’esclaves". Elle fut annexée à Sanford en 1911. Comme le rapporte le blog, "les Noirs, qui s’auto-administraient, ont été dépouillés de leurs prérogatives. Ils ont aussi été dépossédés de leurs repères identitaires". Plus d'un siècle après, l'affaire Trayvon Martin ravive donc les tensions.
• Multiplication de messages racistes
Selon les médias américains, le climat se tend chaque jour un peu plus autour de la ville. Et ses conséquences dépassent même les frontières de la Floride. Ainsi, le site des Observateurs de France 24 relaie, mercredi 11 avril, le témoignage d'une habitante du Michigan, à quelque 1900 kilomètres de Sanford. Sur une route près de Detroit, la jeune femme est tombée sur un panneau raciste, "Trayvon is a nigger" (Trayvon est un nègre).
"Depuis la mort de Trayvon, les tensions sont vraiment palpables, assure-t-elle. Je suis une mère célibataire noire et j’ai peur pour mon fils à chaque fois qu’il sort. J’ai vraiment le sentiment que les hommes noirs sont visés quoi qu’ils fassent."
Les messages racistes s'invitent aussi dans l'Ohio. Ainsi, ce graffiti "Longue vie à Zimmermann" tagué sur les murs du centre culturel noir, à Columbus.
• Le New Black Panther Party entre en scène
Et pour cause. Fin mars, le New Black Panther Party ont offert une récompense de 10 000 dollars à quiconque capturerait George Zimmermann. Cette organisation radicale de défense des droits des Afro-Américains a été créée en 1989. Elle n'est pas reconnue par le Black Panther Party original. Le blog Big Browser du Monde.fr évoque "une volonté de justice populaire" inquiétante de la part de ce groupe. Et de citer Mikhail Muhammed, un des cadres locaux du parti : "Œil pour œil, dent pour dent", a déclaré ce dernier lors d'une manifestation, le 31 mars à Sanford, avant de menacer directement George Zimmermann.
• Les néonazis préparent la riposte
Cela n'a pas tardé à réveiller les extrêmistes de droite, qui entendent faire la police. En réplique au New Black Panther Party, des volontaires du Mouvement national-socialiste (NSM, groupe néonazi) ont mis en place des patrouilles nocturnes lourdement armées dans les rues de Sanford, rapporte le site américain Gawker (lien en anglais). Objectif : se préparer à des émeutes raciales.
Dans The Independent (en anglais), un volontaire, Antony Antonio, explique : "On est là car nous avons reçu des appels de citoyens blancs inquiets de Sanford. Nous allons patrouiller, effectuer des tours à pied et en voiture, afin de s'assurer que tout va bien (...) Il se dit qu'une guerre raciale se prépare et les gens sont inquiets."
La montée de ces groupes néonazis inquiètent les médias, à l'opposé de la police locale qui déclare au Miami News Times n'avoir vu "aucun néonazi en patrouille". Il faut dire que les règles du NSM n'ont rien de rassurant, selon le quotidien britannique. A Sanford, des prospectus ornés de croix gammées les passent en revue : pas de drogues, pas de taxes, homosexualité interdite et pas de "mélange racial ou d'immigration autre que blanche". Tout est dit.
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