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L'article à lire pour comprendre les élections de mi-mandat aux Etats-Unis

Les Américains sont appelés à voter, mardi, pour renouveler la totalité de la Chambre des représentants, 36 sièges de sénateurs et 36 postes de gouverneurs. Francetv info présente les principaux enjeux de ce scrutin.

Article rédigé par Louis San
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 10min
Barack Obama lors d'un meeting à Bridgeport (Connecticut) pour soutenir Dan Malloy, candidat démocrate pour une réélection au poste de gouverneur, le 2 novembre 2014. (SAUL LOEB / AFP)

C'est la même histoire tous les deux ans. Les Américains sont appelés à voter pour les élections de mi-mandat, mardi 4 novembre. Vous ne savez pas à quoi cela fait référence ? Vous ignorez pourquoi cela vaut la peine de s'y intéresser ? Suivez le guide.

Pour quoi votent les Américains ?

La Chambre des représentants. Les 435 sièges de cette instance (l'équivalent de l'Assemblée nationale), sont renouvelés tous les deux ans. Pour l'instant, le parti républicain, dans l'opposition, y est largement majoritaire avec 233 représentants contre 199 pour le parti démocrate.

Le Sénat. Il compte 100 sièges. A chaque élection de mi-mandat, un tiers est renouvelé pour six ans. Cette année, 36 sièges de sénateurs sont soumis aux votes. Pour l'instant, les démocrates détiennent une courte majorité avec 53 sièges alors que les Républicains en comptent 45.

Les gouverneurs. Trente-six des cinquante postes sont renouvelés, généralement pour quatre ans.

Des référendums. Les élections de mi-mandat sont également l'occasion pour les autorités locales de soumettre des référendums à la population. Ainsi, cette année, l'Alaska, l'Oregon et Washington DC demandent l'avis des citoyens sur la légalisation de la marijuana.

Qui va gagner ?

Les républicains risquent d'être les grands vainqueurs. Ils ont de fortes chances de renforcer leur majorité, déjà confortable, à la Chambre des représentants.

Mais le principal enjeu de ce scrutin, c'est le Sénat. Les Républicains vont très probablement le ravir aux démocrates : ils ne sont qu'à quelques siège de la majorité. Les sondages donnent un net avantage au parti de l'éléphant. Le site FiveThirtyEight.com, créé par le prévisionniste Nate Silver, donne aux républicains 76,2% de chance de l'emporter. Le New York Times estime que cette probabilité s'élève à 70% alors que pour le Huffington Post, elle s'élève à 77%.

Les républicains pourraient même mettre la main sur le plus grand nombre de mandats depuis 1929, selon le Washington Post.

Le nouveau Congrès devrait siéger à partir du 3 janvier. Mais il est possible que sa composition définitive soit encore incomplète mardi soir. En effet, un second tour aura lieu en Louisiane (le 6 décembre) et en Géorgie (le 6 janvier), si aucun candidat au Sénat n'obtient de majorité absolue mardi.

Bon, disons que les républicains l'emportent. Est-ce grave pour Obama ?

Le Congrès américain se compose de deux instances : la Chambre des représentants, qui est la basse Assemblée, et le Sénat, qui représente la haute Assemblée. Ces deux chambres votent les lois, le budget et peuvent amender la Constitution. En revanche, les élus de la Chambre des représentants sont les seuls à pouvoir lancer une procédure d'impeachment (mise en accusation) visant des membres de l'exécutif ou des juges de la Cour suprême. Un processus qui passe ensuite devant le Sénat. Dans cet hémicycle, une majorité de 60 voix (sur 100) permet de surmonter une tentative d'obstruction de la minorité.

Un projet de loi voté par les deux Assemblées peut être retoqué par le président, qui dispose d'un droit de veto. Le projet retourne alors devant le Congrès pour être voté à nouveau, et s'il remporte la majorité des deux tiers, le président doit le promulguer.

Le symbole serait fort si Barack OBama était privé de majorité démocrate dans les deux chambres du Congrès. Mais si une telle situation devait arriver, elle ne modifierait pas fondamentalement la façon dont fonctionne déjà le jeu politique actuel avec des instances aux majorités rivales.

"Il ne faut pas s'attendre à un changement radical. Les majorités républicaines à la chambre et éventuellement au Sénat ne seront pas énormes. Donc elles ne pourront pas annuler un veto présidentiel ou forcer les démocrates à faire passer des lois. Donc les changements dans la manière dont ce pays est gouverné ne seront pas énormes", relativise auprès de l'AFP Danny Hayes, expert en sciences politiques, à l'université George Washington. En effet, au Sénat, quel que soit le parti vainqueur, aucun ne devrait atteindre la "super majorité" de 60 sièges.

Quels sujets ont animé la campagne  ?

Aucun en particulier. Cette année, elle a été marquée par l'absence de questions fortes. Résultat, elle a principalement tourné autour de Barack Obama, ses échecs, ses promesses non tenues. Ce qui a vérifié l'adage des spécialistes qui estiment que les élections de mi-mandat prennent généralement la forme d'un référendum sur l'action du président.

Dans ce contexte, les républicains ont tout misé sur les déçus de Barack Obama. "La décision qu'ont à prendre les Américains est on ne peut plus claire : une voix pour un candidat démocrate est une voix pour la politique d'Obama", a lancé le président du parti républicain, Reince Priebus, pendant la campagne.

Concrètement, pendant la campagne, la réforme de la santé a cohabité avec la gestion hasardeuse de l'épidémie d'Ebola sur le sol américain, la crainte de l'organisation Etat islamique, les déboires de Washington sur le dossier syrien, ou encore le retour de Moscou sur la scène internationale pendant la crise ukrainienne.

Quels sont les Etats à surveiller ?

En version originale, on les appelle les swing states. En français on parle d'Etat pivots ou versatiles. Concrètement, ce sont des régions indécises qui peuvent faire pencher le majorité d'un côté comme de l'autre.

Dans la course pour le Sénat, le principal enjeu de ce scrutin, il y a 11 Etats à surveiller, estime le New York Times. C'est principalement dans le Sud, plutôt conservateur, que les démocrates rencontrent les plus grandes difficultés : Louisiane, Arkansas, Caroline du Nord. Les sondages donnent également des résultats serrés dans le Colorado, en Alaska et dans le New Hampshire. Là-bas, des démocrates ont été élus en 2008 portés par la vague Obama et rien ne garantit leur réélection cette année.

Quelles sont les personnalités à surveiller ?

Ne comptez pas sur ces élections pour voir émerger un(e) candidat(e) pouvant tenir tête à Hillary Clinton qui est, pour l'instant, largement favorite pour porter la candidature démocrate en 2016. 

Les républicains, eux, manquent de leader naturel. Mais ce scrutin n'est pas l'occasion de mettre en lumière de sérieux challengers pour la primaire conservatrice en vue de la prochaine présidentielle. En effet, les principales figures comme le gouverneur du New Jersey Chris Christie, le sénateur de Floride Marco Rubio, le sénateur texan Ted Cruz, ou encore le sénateur du Kentucky Rand Paul ne sont candidats à rien cette année.

En revanche, il y a quelques candidats républicains à suivre car ils tranchent nettement par rapport aux habituels figures de la formation, c'est-à-dire des hommes blancs, âgés. Carl DeMaio, 40 ans, en campagne en Californie pour un poste à la Chambre des représentants, est gay et favorable à l'avortement. Mia Love, afro-américaine, brigue dans l'Utah un siège à la Chambre des représentants. Elle pourrait devenir la première femme noire républicaine à devenir députée, rapporte MashableElise Stefanik, 30 ans, pourrait devenir la plus jeune femme à remporter un siège à la Chambre des représentants, souligne ABC News.

Ces élections peuvent-elles être un baromètre pour la présidentielle de 2016 ?

Non. Déjà, les élections de mi-mandat sont rarement favorables au parti du président en exercice.

Mais en plus, cette année, les démocrates s'attendent à une faible participation de leurs électeurs de base qui regroupent principalement les minorités ethniques et les jeunes. Par exemple, en 2010, lors des dernières législatives hors année de présidentielle, 21% des 18-24 ans avaient participé aux scrutins, contre 62% des 62-74 ans. Bref, ces élections ne risquent pas de donner un avant-goût de la prochaine course à la Maison Blanche.

Sans compter que Hillary Clinton, qui pourrait mener la candidature démocrate en 2016, est pour l'instant loin devant tout le monde. "Quand on demande aux Américains s'ils voteraient pour Hillary Clinton, elle bat tous les candidats républicains potentiels", souligne Frédérick Gagnon, professeur au Département de science politique à l'université du Québec.

J'ai eu la flemme de tout lire. Vous pouvez me faire un résumé ?

Les Américains renouvellent l'ensemble des 435 sièges de la Chambre des représentants (l'équivalent de l'Assemblée nationale), un tiers des 100 sénateurs et un tiers des 50 gouverneurs.

Les républicains risquent fortement d'être les grands vainqueurs de ces élections. Ils vont probablement davantage asseoir leur majorité à la Chambre des représentants et vont sans doute décrocher une majorité au Sénat, jusqu'ici acquis aux démocrates.

Mais même si les conservateurs mettent la main sur les deux Assemblées, les deux prochaines années de Barack Obama à la Maison Blanche ne seront pas chamboulées. Par exemple, au Sénat, principal enjeu de ce scrutin, quel que soit le parti vainqueur, aucun ne devrait obtenir assez de sièges pour s'imposer. La situation resterait finalement aussi grippée qu'elle l'est aujourd'hui.

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