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"Richard Branson asiatique" et entrepreneur bravache, qui est le patron d'AirAsia ?

La disparition du vol QZ8501 entre l'Indonésie et Singapour est la première situation de crise que doit gérer le patron de la compagnie aérienne, Tony Fernandes. Ce Malaisien de 50 ans avait jusque-là parfaitement géré ses affaires. Portrait.

Article rédigé par Jéromine Santo-Gammaire
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
Le milliardaire britannique Richard Branson (G) grimé en hôtesse de l'air, et le patron d'AirAsia, Tony Fernandes, à l'aéroport de Kuala Lumpur (Malaisie), le 12 mai 2013. (MOHD RASFAN / AFP)

Jusqu'alors, Tony Fernandes avait toujours brillé par ses succès et attiré les dollars. La disparition du vol QZ8501, avec 162 personnes à son bord, dimanche 28 décembre, marque la première crise majeure de la carrière du patron d'AirAsia. Immédiatement, l'homme s'est montré très affecté sur Twitter, où il est très actif. Il  s'est également rendu le jour même à Surabaya, dans l'est de l'île de Java (Indonésie), d'où sont originaires la plupart des passagers, afin de soutenir sur le terrain les efforts de recherche.

Qui est donc Tony Fernandes, ce Malaisien de 50 ans dans lequel certains voient un "Richard Branson asiatique" ? Rien ne prédisposait ce fils d'un médecin et d'une professeure de piano aux affaires. Mais muni d'un diplôme de la London School of Economics, il a gravi les échelons, multiplié les business et les investissements, se construisant une réputation internationale. Francetv info revient sur le parcours de cet impétueux patron.

Un passage par Virgin et un mentor

Chaque année, un nouveau prix vient allonger le palmarès de Tony Fernandes, comme en témoigne son CV en ligne sur le site d'AirAsia, compagnie aérienne malaisienne qu'il a acquise en 2001. Des réussites en cascade qui lui valent souvent d'être comparé à Richard Branson.

Tony Fernandes connaît d'ailleurs très bien le mythique patron de Virgin. Dans les années 80, il entre chez Virgin Records en tant que contrôleur financier. Il monte très vite dans la hiérarchie, suivant les pas de son mentor avant de se diriger petit à petit vers le marché asiatique. Devenu son ami, Richard Branson "lui apprend comment décliner une marque et en devenir la promotion vivante et immédiatement reconnaissable", racontait en janvier 2012 le magazine Challenges sur son site internet. 

Lassé par l'industrie de la musique, le Malaisien démissionne, en 2001, de Warner Music, dont il est vice-président du secteur Asie du Sud-Est depuis deux ans. Il rachète alors, à 37 ans, une compagnie aérienne mal en point, AirAsia, pour 1 ringgit symbolique (25 centimes d'euros). A l'époque, la compagnie ne compte que deux avions, pour seulement trois destinations desservies et 11 millions d'euros de dettes. Tony Fernandes, qui n'a aucune expérience dans le secteur, établit un nouveau slogan : "Tout le monde peut voler", et mise sur l'essor de la classe moyenne asiatique, à laquelle il propose une offre à bas prix, inspirée par easyJet.

Un compétiteur qui ne craint pas la concurrence

Treize ans plus tard, AirAsia s'est muée en leader du transport aérien low cost en Asie du Sud-Est avec 30 millions de passagers chaque année, selon les chiffres du Guardian (en anglais). Ses lignes se sont étendues au monde entier avec sa compagnie low cost long-courrier, AirAsia X, lancée en 2007. Aujourd'hui, l'homme d'affaires possède cinq autres compagnies aériennes et un capital qui s'élèverait à 650 millions de dollars (530 millions d'euros), selon le magazine spécialisé Forbes, qui lui a attribué, en 2010, le titre d'homme d'affaires de l'année.

Le patron d'AirAsia, Tony Fernandes, au cours d'une interview dans son bureau de l'aéroport de Kuala Lumpur (Malaisie), le 25 novembre 2002. (REUTERS )
 

Fort de ses succès, l'homme se moque de la concurrence. Littéralement. Ainsi, fin 2011, alors que Singapore Airlines annonce le lancement de Scoot, une filiale long-courrier low cost, Tony Fernandes s'amuse : "Hahaha. Déjà vu", tweete-t-il, s'estimant "copié""Déjà, [Scoot] est vraiment un nom stupide", balance encore l'homme d'affaires auprès du Wall Street Journal (en anglais).

Un homme d'affaires insolent et culotté

S'il attribue parfois ses réussites à "la chance", le businessman, qui a des origines indiennes et portugaises, reconnaît également être un peu têtu, "persistent", confie-t-il, soit tenace en français, comme le rapportait le magazine Challenges en 2012.

Autre corde à son arc : son insolence. En juin 2011, il négocie avec Airbus l'un des plus gros contrats de l'aviation et commande 200 A320 Neo, des moyen-courriers, pour une valeur de 18,24 milliards de dollars. Mais la compagnie ne s'arrête pas là. Le 15 décembre, elle confirme encore une commande de 55 A330-900 Neo pour renforcer sa flotte en pleine croissance. C'est ainsi qu'en novembre 2013, la France fait Tony Fernandes Commandeur de la Légion d'honneur pour ses investissements dans le savoir-faire français, la compagnie n'utilisant que des Airbus assemblés dans l'Hexagone.

"J'adore m'amuser dans la vie. J'aime le fun", explique Tony Fernandes pour commenter la signature de la vente des 200 Airbus, relate Challenges. Il avait à cette occasion entraîné en boîte Louis Gallois, alors président d'EADS, Tom Enders, président d'Airbus, et John Leahy, directeur commercial de l'avionneur, et les avait poussés à danser avec des hôtesses de sa compagnie avant de signer.

Un entrepreneur insatiable

Gardant toujours à l'esprit les recommandations de Richard Branson, Tony Fernandes a rapidement choisi de varier ses activités à travers son holding Tune Group. Il fonde en 2007 Tune Hotels, une chaîne d'hôtels low cost, puis Tune Talk en 2009, des cartes de téléphone prépayées. Il se lance dans le sport cette même année avec Tune Sport et se paie, entre autres, l'écurie de formule 1 Lotus, devenue Caterham par la suite, et vendue l'été dernier. Aujourd'hui, le millionnaire est surtout l'actionnaire principal du club de football anglais des Queens Park Rangers, qu'il détient avec la famille indienne Mittal. 

Le président du groupe AirAsia, Tony Fernandes, s'apprête à assister à une conférence de presse concernant la disparition du vol QZ8501, à Surabaya (Indonésie), le 29 décembre 2014. (MANAN VATSYAYANA / AFP)

La disparition du vol QZ8501 "ne va pas atteindre l'esprit d'entreprise de Fernandes, avance Shukor Yusof, expert en aviation chez Endau Analytics, qui estime que l'homme ainsi que la compagnie parviendront à dépasser cette crise. C'est un incident malencontreux. AirAsia reste un transporteur à bas coûts solide. Je pense que les gens vont soutenir AirAsia."

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