Fonte des glaciers en Asie centrale : vers une crise de l'eau?
Les glaciers d'Asie centrale ont fondu quatre fois plus que la moyenne mondiale depuis le début des années 1960, perdant 27% de leur masse. C'est ce que révèle une récente étude publiée par la revue Nature Geoscience. D'ici à 2050, les températures, plus élevées à cause du changement climatique, pourraient faire disparaître la moitié de la glace restante des glaciers du Tangri Tagh (chaîne de hautes montagnes d'Asie centrale située au nord-ouest du bassin du Tarim. C'est le cinquième relief du monde après l'Himalaya, les Andes, les Rocheuses et le Pamir).
Le hic, c'est que ces glaciers constituent une source d'eau cruciale pour les habitants du Kazakhstan, Kirghizstan, d'Ouzbékistan et d'une partie du nord-ouest de la Chine. «Les glaciers sont d'énormes réservoirs d'eau. Ils peuvent équilibrer les volumes d'eau entre les années humides et les années sèches» souligne Doris Duethmann, chercheuse au German Research Centre for Geoscience, (GFZ) à Potsdam. «Au cours d'une année, les précipitations de l'hiver sont stockées jusqu'à l'été, moment où elles sont libérées comme eau de fonte» explique-t-elle.
Le fleuve Syr-daria, le plus grand fleuve d'Asie Centrale, est symptomatique de ce phénomène. Il prend naissance dans la vallée de Fergana et dessert 25 millions de personnes en eau, passant par l'Ouzbékistan, le Kazakhstan, le Tadjikistan et le Kirghizstan.
En tout, les glaciers du Tien Shan ont perdu en moyenne 5,4 milliards de tonnes de glace par an depuis les années 1960. Pendant cette période, leur surface s'est réduite d'environ 3000 kilomètres carrés.
Vers une crise de l'eau ?
Une hausse des températures estivales de 2 degrés de 2021 à 2050 signifierait sans doute une perte supplémentaire de 50% du volume des glaces d'ici au milieu du siècle. «Les mois d'hiver dans la région étant très secs et les montagnes si hautes, la plupart des chutes de neige sur les glaciers ont lieu en été», précise Daniel Farinotti, également chercheur au GFZ. «Cela signifie qu'une température plus élevée contribue à la fois à augmenter la fonte et à réduire l'alimentation du glacier», explique-t-il.
Plus d'un milliard de personnes dans le monde, en particulier en Asie et en Amérique du Sud, obtiennent plus de la moitié de leur eau potable de la fonte saisonnière de la neige et des glaciers. «La situation est particulièrement préoccupante à la lumière à la fois de la croissance de la population locale et de la rétraction continue des glaciers, attendue en raison du changement climatique», peut-on lire dans l'étude de Nature Geoscience.
Lors d'un séminaire international à Douchambé (Tadjikistan) en novembre 2014, organisé par l'ONU et le FMI, le directeur du bureau de l'UNESCO en Asie centrale, Sergueï Lazarev, annonçait qu'un centre régional allait ouvrir sous l'égide de l'ONU à Almaty, au Kazakhstan.
Certains experts proposent de créer des réservoirs d'eau sous la forme de «coussins de sécurité» en cas de sécheresse. Une idée qui peut faire son chemin, mais qui n'empêchera pas le processus de réchauffement climatique, dû essentiellement à l'activité humaine. En effet, l'homme est responsable à 69% de la fonte des glaces sur la période 1991-2010, contre seulement 25% sur la période 1851-1990.
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