Le Japon, nouvelle cible de l'Etat islamique
Deux otages enlevés il y a quelques mois sont menacés dêtre tués par le groupe jihadiste, qui réclame une rançon de 200 millions de dollars contre leur libération. Le Premier ministre japonais active tous ses réseaux pour éviter leur exécution.
Pour le Japon, le temps presse. Le Premier ministre, Shinzo Abe, a donné l'ordre à son gouvernement d'activer tous les canaux internationaux pour faire libérer deux ressortissants du Japon menacés d'exécution par le groupe Etat islamique (EI), mercredi 21 janvier. La veille, l'organisation terroriste a donné trois jours au pays pour payer une rançon de 200 millions de dollars, sous peine d'exécuter les otages si leurs exigences n'étaient pas satisfaites.
L’archipel a déjà connu des prises d’otages tragiques, rappelle Le Monde. Dix Japonais sont morts en janvier 2013 dans l’attaque du complexe gazier d’In Amenas, en Algérie. En 2004, en Irak, un Japonais a été décapité par le mouvement d’Abou Moussab Al-Zarkaoui. Mais c'est la première fois que des otages japonais sont directement menacés de mort par le groupe EI. Le pays s'était jusqu'ici tenu à l'écart du conflit en Syrie et en Irak. Mais son implication récente a changé la donne. Explications.
Deux otages japonais sous le coup d'un ultimatum
Les deux otages japonais sont entrés en Syrie à l'été et l'automne 2014. Le contact a été perdu avec eux il y a plusieurs semaines. Le premier, identifié comme Haruna Yukawa, 42 ans, dirige une petite entreprise appelée Private Military Company (PMC) dont la mission est "de secourir des Japonais à l'étranger". Le second otage, Kenji Goto, né en 1967, est un journaliste indépendant qui fournit des reportages sur le Moyen-Orient aux chaînes de télévision japonaises et est aussi actif dans le domaine humanitaire.
Tous deux apparaissent dans une vidéo postée par l'EI en début de semaine. L'authenticité du document n'a pu être formellement établie, mais la mise en scène est comparable à celle des précédentes vidéos dans lesquelles l'EI a revendiqué l'exécution d'Occidentaux enlevés en Syrie. D'aucuns soulignent cependant des bizarreries, comme la direction divergente des ombres des deux otages ainsi que les mouvements non synchrones de leurs tuniques en apparence agitées par le vent. Des spécialistes japonais supposent qu'il s'agit d'un montage et que le tournage a pu avoir lieu en plusieurs fois. La vidéo est en cours de vérification, selon Tokyo.
L'aide humanitaire du Japon contre l'Etat islamique visée
Cette vidéo n'intervient pas à n'importe quel moment. Sa mise en ligne a eu lieu après l’annonce, par Shinzo Abe, du versement d’une aide non-militaire de 200 millions de dollars (170 millions d'euros) aux pays affectés par la guerre contre l’organisation EI. La tournée effectuée par le Premier ministre japonais au Moyen-Orient lui avait également fourni l’occasion de promettre une enveloppe globale de 2,2 milliards d'euros pour la région dans des projets civils et humanitaires.
La chaîne de télévision NHK dit s'être entretenue par messagerie en ligne avec un "porte-parole de l'EI" qui "de facto reconnaît les faits", et ajoute à propos de la rançon exigée de 200 millions, soit le montant de l'aide non-militaire annoncé : "Ce n'est pas que l'on ait besoin d'argent. Il ne s'agit pas d'un combat économique, c'est un combat psychologique."
Le Japon demande en urgence un soutien international
Shinzo Abe a écourté sa visite au Moyen-Orient pour se concentrer sur le sort des otages japonais. "J'ai rencontré le président palestinien, Mahmoud Abbas, et je lui ai demandé sa coopération", a-t-il précisé, indiquant avoir fait de même avec les dirigeants d'Egypte, de Jordanie et de Turquie. "Ils m'ont assuré faire de leur mieux pour trouver une issue favorable", a poursuivi le Premier ministre japonais. Selon Libération, "il n’est pas interdit de penser qu’un canal de discussion soit également ouvert avec l’Iran, pays avec lequel le Japon entretient une relation constante, notamment sur le plan commercial et énergétique".
Une cellule de crise a été installée en Jordanie où est dépêché le vice-ministre des Affaires étrangères japonais. Tokyo a aussi sollicité l'aide de la France dans ce dossier. Le ministre des Affaires étrangères japonais, en visite à Londres (Royaume-Uni), a téléphoné à son homologue français, mardi soir. Laurent Fabius s'est engagé à agir "en étroite collaboration avec les autorités nippones pour parvenir à une solution la plus rapide possible", selon les diplomates japonais.
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