Trois questions pour comprendre le conflit territorial en mer de Chine méridionale
La Chine et les Philippines se disputent le contrôle des archipels situés dans cette région, pour des questions économiques notamment.
La Chine a mis en garde contre les risques de "conflit" en mer de Chine méridionale, mercredi 13 juillet. Pékin s'oppose à une décision de la Cour permanente d'arbitrage (CPA) de La Haye (Pays-Bas), qui appuie les prétentions territoriales des Philippines mais aussi d'autres pays voisins sur plusieurs archipels situés dans cette région. Mais pourquoi ces quelques îlots provoquent-ils tant de tensions ?
Francetv info répond à trois questions pour mieux comprendre ce contentieux qui inquiète jusqu'au gouvernement américain.
Pourquoi la Chine et les Philippines sont-elles en conflit ?
Pour comprendre le conflit entre Pékin et Manille, il faut se pencher sur la mer de Chine méridionale. Cette étendue d'eau de 3 000 kilomètres de long sur 1 000 kilomètres de large est bordée par huit pays, dont la Chine et les Philippines. Elle constitue un enjeu géopolitique et économique important, selon Libération. Un tiers du commerce maritime de la planète transite par cette zone, qui est en outre riche en poissons ainsi qu'en pétrole et en gaz.
Les pays frontaliers se disputent depuis plusieurs années les différents archipels qui se trouvent en mer médionale de Chine. Pékin souhaite étendre sa souveraineté sur 80% de la zone, dont les îles Paracels et Spratley, au titre de "droits de passage historiques" qui n'ont aucune existence légale. En bref, la Chine affirme qu'elle est la première à avoir découvert cette zone, à lui avoir donné un nom et à l'avoir exploitée, ce qui lui donnerait des droits sur 2,6 des 3 millions de kilomètres carrés de la mer.
La Chine s'appuie sur la "ligne des neuf traits" pour justifier cette revendication. Cette frontière, apparue sur les cartes chinoises dans les années 1940, n'est pas reconnue officiellement. Pékin profite toutefois de cette délimitation pour coloniser les îles de mer de Chine méridionale, en y implantant des pistes d'atterrissages, des ports et des phares, indique France 24. La marine effectue en outre des patrouilles dans cette zone, ainsi que des exercices militaires entre l'archipel des Paracels et l'île chinoise d'Hainan.
Le but de ces constructions ? Transformer ces atolls en îles habitées, afin de pouvoir les inclure dans une zone économique exclusive (ZEE). Dans cette zone, un Etat côtier peut maîtriser la pêche, la construction d'ouvrages et l'exploitation du sous-sol. Et donc, dans le cas de la mer de Chine méridionale, s'assurer le contrôle des ressources économiques de la zone.
Qu'a décidé la justice internationale ?
Les Philippines ont saisi la Cour permanente d'arbitrage (CPA) de La Haye en 2013, pour tenter de régler le conflit. La Chine a annoncé dès le début de la procédure qu'elle ne reconnaîtrait pas l'autorité des juges internationaux dans cette affaire. Pékin souhaite en effet trouver une solution bilatérale à ce contentieux territorial avec les Philippines.
Ce boycott n'a pas empêché la CPA de rendre son jugement mardi 12 juillet, note Le Figaro. La juridiction internationale estime que la Chine n'a pas de "droits historiques" sur la mer de Chine méridionale, et notamment sur les îles Spratley et Paracels. La construction d'îles artificielles dans cette région est donc illégale.
La Cour juge également que Pékin a "violé les droits souverains" de Manille dans cette zone, en empêchant les Philippins de pêcher autour du récif poissoneux de Scarborough. La Chine a pris le contrôle de ce récif, officiellement situé dans la ZEE des Philippines, en 2012.
"Le tribunal juge qu'il n'y a aucun fondement juridique pour que la Chine revendique des droits historiques sur des ressources dans les zones maritimes à l'intérieur de la ligne en neuf traits", a indiqué la CPA dans un communiqué. Conséquence : aucune des îles de l'archipel des Spratleys ne peut conférer à la Chine une ZEE.
Et maintenant, que va-t-il se passer ?
Pékin a rejeté l'arbitrage de la CPA, qualifié par le vice-ministre des Affaires étrangères comme "un papier bon à jeter", mardi 12 juillet. La Chine a également menacé d'instaurer une zone d'identification de la défense aérienne (Adiz) dans la région, en fonction du "niveau de menace" auquel elle fera face. Cette mesure contraindrait les avions civils à s'identifier auprès de contrôleurs militaires chinois, explique L'Express.
Les pays occidentaux, qui soutiennent la décision de la CPA, font pression sur la Chine pour qu'elle accepte la décision. "Ce jugement est définitif et contraignant légalement pour la Chine comme pour les Philippines, a estimé le porte-parole du département d'Etat américain, mardi 12 juillet. [Les parties] doivent s'abstenir de toute déclaration ou action provocatrice."
Malgré cette mise en garde, les tensions se renforcent en mer de Chine méridionale. Pékin a lancé des exercices navals dans le nord de la région, alors que le commandement américain dans le Pacifique a annoncé le déploiement d'un porte-avions pour renforcer "la sécurité" dans cette zone.
Taïwan a envoyé une frégate dans la région pour "protéger ses droits", mercredi 13 juillet, poursuit Le Monde. Le gouvernement taïwanais a des revendications similaires à celle de la Chine dans cette région. Pour le spécialiste de la sécurité en Asie Ian Storey, interrogé par l'AFP, "les eaux de mer de Chine méridionale sont sur le point de devenir bien plus turbulentes".
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