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Cinq ans de l'effondrement du Rana Plaza : "L'essor de la 'fast-fashion' a aggravé la situation"

L'industrie du textile cherche "toujours à produire au plus bas coût", a déploré, mardi sur franceinfo, la porte-parole du collectif Ethique sur l'étiquette, Nayla Ajaltouni.

Article rédigé par franceinfo
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Le site où se trouvait le Rana Plaza à Savar au Bangladesh, le 17 avril 2018. (MUNIR UZ ZAMAN / AFP)

Il y a cinq ans survenait le pire accident de l'histoire de l'industrie textile : l'effondrement du Rana Plaza au Bangladesh, qui avait fait 1 138 morts. "Tous les survivants et les familles ont été indemnisés", a assuré mardi 24 avril sur franceinfo la porte-parole du collectif Ethique sur l'étiquette, Nayla Ajaltouni.

Depuis l'accident, un accord sur la sécurité des usines textiles a été signé, notamment par des entreprises françaises et une organisation indépendante de contrôle a vu le jour. Mais pour Nayla Ajaltouni, le secteur textile n'a toujours "rien trouvé de mieux qu'une ouvrière derrière une machine à coudre pour produire à bas coût". Elle estime que le consommateur doit comprendre "qu'un tee-shirt ne peut pas coûter moins cher qu'un sandwich".

franceinfo : Les survivants de la catastrophe et les familles des victimes ont-ils été indemnisés par les marques ?

Nayla Ajaltouni : En effet, tous les survivants et les familles ont été indemnisés. Cela fait partie des deux actions d'urgence que nous avons menées juste après le drame. Mais, il nous a fallu jusqu'à 2 ans de campagne internationale pour que toutes les marques, notamment celles qui étaient responsables, contribuent au fond. Cela a été le cas de Benetton qui a attendu 2 ans avant de verser enfin une contribution au fonds d'indemnisation qui est volontaire et même anonyme. Et donc il a fallu aussi lutter pour que ces victimes accèdent à la justice.

Est-ce que le modèle économique a changé en 5 ans ?

Le modèle de production dans l'industrie textile repose sur de la sous-traitance sans visibilité sur la chaîne d'approvisionnement et sur du travail peu cher pour produire au moindre coût. Malheureusement ce modèle n'évolue pas aujourd'hui dans le secteur textile. On n'a rien trouvé de mieux qu'une ouvrière derrière une machine à coudre pour produire à bas coût. Et l'essor de la "fast fashion", cette mode jetable de piètre qualité, et à très faible coût, a aggravé la situation, qui commençait à s'améliorer, même si on sent un sursaut des consommateurs et des citoyens qui n'acceptent plus cette nouvelle mode. Mais les entreprises cherchent toujours à produire au plus bas coût. Et quand on parle de coût, on parle de salaires, d'ouvriers qui demeurent les moins bien payés au monde au Bangladesh, mais cette pression, elle existe dans toute l'industrie du textile.

Le grand public est de plus en plus conscient que ces ouvriers sont mal payés. Est-ce que cela a un impact sur les clients de ces marques ?

Le public l'a découvert aussi avec l'effondrement du Rana Plaza. Pour la plupart des gens, le Bangladesh était un pays quasi-inconnu. Ce qui est encourageant, c'est que cinq ans après, la prise de conscience s'est vraiment développée. On remarque de plus en plus de consommateurs qui, spontanément, investissent les réseaux sociaux, questionnent les marques. On voit des marques, comme H&M développer une communication sur la question du développement durable, de leur responsabilité parce qu'elles sentent bien que ces questions mobilisent désormais leurs consommateurs. Il faut prendre conscience qu'un tee-shirt ne peut pas coûter moins cher qu'un sandwich. Cela veut dire qu'une personne en a forcément payé le coût, l'environnement également. Il faut maintenant qu'on fasse évoluer ce modèle.

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