: Reportage "L'agriculture a été une victime collatérale d'un sujet politique" : à la grande foire de Shanghai, les producteurs laitiers français sont inquiets
Sur fond de surtaxes européennes imposées aux voitures électriques chinoises, c’est dans un climat commercial tendu que s’est ouverte, mardi 5 novembre, la foire aux importations de Shanghai, le plus gros évènement commercial en Chine. Et dans cette escalade avec l’UE, la France est pour le moment l’un des pays les plus visés par les représailles chinoises. Pékin a déjà imposé des restrictions financières sur ses importations de Cognac et a ouvert une enquête antidumping sur les produits laitiers européens qui concerne notamment la filière française. Certaines des 130 entreprises françaises présentes à la foire de Shanghai redoutent de sérieuses difficultés pour accéder au marché chinois.
Signe des inquiétudes et de l'enjeu, la quasi-totalité des représentants de la filière laitière française ont fait le déplacement à la foire de Shanghai. Leurs exportations vers la Chine représentent près de 700 millions d'euros avec, en tête de gondole, la crème fraîche normande, dont 45 000 tonnes sont vendues chaque année en Chine. Pour le moment, les éleveurs se conforment aux exigences chinoises. "Une enquête est ouverte et, nous, on se plie aux demandes chinoises, assure Pascal Le Brun, président de l'interprofession laitière et producteur dans le Calvados. On répond aux questions du gouvernement chinois."
"Forcément, il y a beaucoup d'inquiétude."
Pascal Le Brun, président de l'interprofession laitièreà franceinfo
Le risque est de voir le beurre ou la crème fraîche visés par de nouvelles taxes. L'enquête antidumping lancée par Pékin fait très peur, explique Ludovic Blin, producteur dans la Manche : "Sincèrement, on est très inquiets parce que la Chine, c'est un débouché important pour les produits laitiers français, avec une valorisation intéressante. Et ce qu'on déplore dans ce dossier-là, c'est que l'agriculture a été une victime collatérale d'un sujet politique. Les débouchés concernés par cette hausse des taxes, ça peut aller jusqu'à un équivalent de 400 millions de litres de lait. Ce sont des entreprises laitières qui peuvent arrêter l'export sur la Chine. Il y a un réel enjeu."
Selon l'interprofession, près de 1000 exploitations laitières pourraient disparaître en France en cas de surtaxes décidées par la Chine.
La ministre française se veut rassurante
Un peu plus loin dans la foire, les producteurs de Cognac, eux, subissent déjà les représailles chinoises, avec une caution financière qui vient d'être imposée aux importateurs. Mais il y a encore de l'espoir, selon la ministre française du Commerce extérieur, Sophie Primas, présente à Shanghai, où elle a rencontré son homologue chinois. "Je suis très heureuse parce que le ministre a vraiment indiqué que sur tous les sujets, y compris sur le sujet du Cognac, nous pouvions continuer à négocier. Donc, la porte n'est pas close, souligne-t-elle. Mais on s'est dit en toute franchise quelles étaient nos lignes rouges."
La France espère une avancée lors du G20 au Brésil, les 18 et 19 novembre prochains. La question du Cognac doit être évoquée au plus haut niveau entre les présidents français et chinois. Le Premier ministre français Michel Barnier a aussi l'intention de s'emparer du dossier. Matignon prévoit une visite en Chine dans les prochains mois.
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