Egypte : la violente répression des manifestants pro-Morsi
Une nouvelle manifestation des partisans de Mohamed Morsi a été dispersée dans la violence par les forces de l’ordre. Depuis le début de l’été, le nouveau pouvoir s’attache à mater les partisans de l’ancien présidant islamiste : une répression qui a entraîné un millier de morts.
Les forces de l'ordre égyptiennes dispersaient vendredi des manifestants islamistes, arguant que leurs défilés n'avaient pas obtenu l'aval des autorités comme l'ordonne une loi récente dont les militants laïcs ont également fait les frais avec l'arrestation d'une de leurs figures.
Le nouveau pouvoir, engagé depuis le début de l'été dans une répression extrêmement meurtrière des partisans du président islamiste Mohamed Morsi destitué par l'armée, disperse depuis plusieurs jours par la force toutes les manifestations n'ayant pas obtenu l'aval du ministère de l'Intérieur comme les y oblige une loi récemment promulguée.
Déterminé à appliquer ce nouveau texte, ce ministère a de nouveau jeudi soir "mis en garde contre l'organisation de tout rassemblement (...) contrevenant à la loi" affirmant qu'il agirait "face à ces activités illégales avec fermeté".
Faisant fi de cet avertissement, les islamistes, avec à leur tête la confrérie de M. Morsi, les Frères musulmans, manifestaient vendredi à travers le pays, au lendemain de la mort d'un étudiant lors de la dispersion par la police d'un rassemblement similaire à l'Université du Caire.
Dans la capitale, policiers et soldats tentaient de disperser des centaines d'entre eux, réunis devant un des palais présidentiels du Caire. Un journaliste de l'AFP sur place a entendu des tirs et rapporté que l'air était saturé de gaz lacrymogène, tandis que des manifestants jetaient des pierres sur les forces de l'ordre.
La police a en outre tiré des grenades lacrymogènes sur des cortèges --de taille modeste-- ailleurs au Caire, à Alexandrie, la deuxième ville du pays dans le nord, ainsi qu'à Suez, Qena et el-Mahalla, selon les services de sécurité.
Alors que les défilés islamistes sont implacablement réprimés, il s'agit d'une journée test car ce vendredi est le premier depuis la promulgation de la loi controversée sur le droit de manifestation qui a déclenché une levée de boucliers parmi les défenseurs des droits de l'Homme.
Après les pro-Morsi, dont la répression lancée début juillet avec l'éviction de M. Morsi s'est soldée jusqu'ici par la mort de plus d'un millier de personnes, les forces de l'ordre ont ouvert un nouveau front dans le pays, s'en prenant désormais aux mouvements laïcs de la jeunesse, fer de lance de la révolte populaire qui a chassé début 2011 Hosni Moubarak du pouvoir.
Mardi, elles dispersaient à coup de canons à eau et de grenades lacrymogènes deux cortèges et arrêtaient une soixantaine de militants, dont une quinzaine de jeunes femmes relâchées sur une route désertique en dehors du Caire.
Et jeudi soir, elles arrêtaient à son domicile Alaa Abdel Fattah, l'une des figures de proue du mouvement laïc pro-démocratie en Egypte, déjà arrêté sous Moubarak, puis sous l'intérim des militaires à sa suite. Son épouse a affirmé sur Twitter avoir été "frappée" par les forces de l'ordre lors de cette interpellation.
Vendredi après-midi, il subissait un premier interrogatoire, ont rapporté des sources judiciaires, précisant qu'il était accusé d'avoir notamment organisé une "manifestation illégale", "provoqué une émeute", "frappé un officier de police et volé son émetteur radio".
Outre M. Abdel Fattah, un autre militant célèbre, Ahmed Maher, fondateur du mouvement du 6-Avril à la pointe de la révolte de 2011, est également recherché et accusé par la justice d'avoir organisé une manifestation sans avoir prévenu les autorités trois jours auparavant, comme le prévoit une loi adoptée dimanche.
Vendredi après-midi, M. Maher tweetait: "notre rêve (lors de la révolte de 2011) était de vivre dans la dignité, mais les militaires, le (les vestiges du, ndlr) régime corrompu de Moubarak et leurs alliés (...) le combattent via les arrestations et la répression".
Revenant sur la dispersion des manifestations mardi, la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH) a affirmé avoir recensé plusieurs cas d'arrestation, de détention et de manifestants tabassés. En outre, la FIDH fait état de "harcèlement sexuel sur des femmes et des hommes" manifestant.
M. Morsi a été destitué et arrêté le 3 juillet par les militaires qui ont affirmé agir pour répondre aux revendications de millions de manifestants descendus dans les rues trois jours plus tôt pour réclamer le départ du seul président jamais élu démocratiquement du pays, qu'ils accusaient d'accaparer le pouvoir au profit des Frères musulmans et d'avoir achevé une économie déjà en ruines.
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