Détention de Paul Watson : comment la France se mobilise pour la libération du militant écologiste

Article rédigé par Zoé Aucaigne
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Le tribunal de Nuuk (Groenland) doit statuer, le 4 septembre 2024, sur le maintien du militant écologiste Paul Watson en détention provisoire. (PAULINE LE NOURS / FRANCEINFO)
Le fondateur de l'ONG Sea Shepherd est toujours en détention provisoire au Groenland, en attendant que la justice danoise se prononce sur la demande d'extradition du Japon.

Pour la France, il faut sauver le capitaine Paul Watson. Le militant écologiste est dans le viseur du Japon pour son combat contre la chasse à la baleine, encore pratiquée par les marins nippons. Le fondateur de l'ONG Sea Shepherd a été arrêté le 21 juillet au Groenland, sur la base d'un mandat d'arrêt international lancé par le Japon en 2012 pour "conspiration d'abordage". Tokyo lui reproche d'empêcher l'activité de ses baleiniers en Antarctique.

Paul Watson a été appréhendé lors d'un ravitaillement en carburant au Groenland, alors qu'il se rendait dans le Pacifique Nord pour intercepter le nouveau navire baleinier-usine japonais Kangei Maru. Depuis son arrestation, le militant est derrière les barreaux en attendant que la justice danoise se prononce sur la demande de son extradition au Japon, où il risque quinze ans d'emprisonnement. Le tribunal de Nuuk (Groenland) doit statuer, mercredi 4 septembre, sur son maintien en détention provisoire.

La diplomatie française au travail

Agé de 73 ans, Paul Watson est d'origine canadienne, mais il réside en France depuis 2015. "A l'époque, les autorités françaises avaient accepté de ne pas mettre à exécution le mandat d'arrêt japonais", souligne l'avocat William Bourbon auprès de La Vie. "Outre le fait que Paul avait des attaches en France, il y aurait eu quelque chose de totalement indécent et absolument absurde sous la présidence de François Hollande d'arrêter ce grand militant écologiste."

L'ancien président socialiste plaidait alors pour l'"exemplarité" de la France sur la protection de l'environnement, comme lors d'un discours donné le 27 novembre 2014. Trois ans avant d'être nommé ministre de la Transition écologique par Emmanuel Macron, Nicolas Hulot avait par ailleurs plaidé la cause de Paul Watson auprès de François Hollande, rappelle Le Monde.

Dans son pays d'accueil, ses soutiens se sont mis en ordre de marche pour obtenir sa libération. Parmi eux, le gouvernement français, en lien avec le royaume du Danemark, dont fait partie le Groenland. "Les échanges continuent avec les autorités danoises au niveau diplomatique, entre les ambassades, les ministères concernés..." fait savoir la présidence de la République.

"La situation est suivie de très près, avec la volonté qu'il ne soit pas extradé."

L'Elysée

à franceinfo

Le secrétaire d'Etat démissionnaire chargé de la Mer, Hervé Berville, fait partie des membres de l'exécutif à être intervenus. "Il a contacté son homologue au Danemark", assurait la présidente de Sea Shepherd France, Lamya Essemlali, à France 3. A l'occasion de la manifestation de soutien prévue mercredi 4 septembre à Paris, Hervé Berville s'exprimera "pour souligner l'engagement diplomatique de la France sur ce dossier", annonce d'ailleurs l'ONG dans un communiqué.

Des militants font pression aussi

"J'apprécie le soutien du président et du gouvernement français", a d'ailleurs salué Paul Watson, dans une interview enregistrée au téléphone par Lamya Essemlali diffusée par France Inter.

"Cela me montre que le gouvernement français et le président [Emmanuel] Macron se préoccupent de la protection des baleines." 

Paul Watson, fondateur de l'ONG Sea Shepherd

à France Inter

Mais les militants poussent pour davantage d'action de l'exécutif. Le journaliste Hugo Clément a par exemple lancé une pétition "pour empêcher le Japon de faire taire à jamais le principal défenseur des baleines". Il a demandé au chef de l'Etat français "de contacter la Première ministre danoise, Mette Frederiksen, pour exiger la libération immédiate de Paul Watson". Le texte a déjà obtenu plus de 765 000 signatures, dont celles de personnalités comme l'actrice Brigitte Bardot ou les animateurs Stéphane Bern et Nagui.

La présidente de la Fondation Brigitte Bardot espère aussi peser sur le gouvernement danois pour la libération de celui qu'elle considère comme son ami. "C'est un scandale, une honte, une lâcheté qui n'honore pas votre pays !" écrit-elle dans une lettre ouverte à la cheffe du gouvernement danois, publiée sur le site de l'association de défense des animaux. "Madame la Première ministre, vous ne pouvez pas choisir le camp des fossoyeurs des océans, être complice des braconniers, vous affranchir des réglementations européennes qui protègent les cétacés !" insiste-t-elle.

A l'image de Brigitte Bardot, 70 députés européens, dont la Française Emma Fourreau (La France insoumise), ont plaidé la cause Paul Watson dans un autre courrier adressé à Mette Frederiksen. La cheffe du gouvernement danois les a renvoyés vers le ministère de la Justice. "La réponse n'est ni satisfaisante, ni rassurante", a réagi l'élue insoumise sur Facebook. "Pire que ça, elle se défausse sur son ministre de la Justice, comme si une Première ministre n'était pas responsable et solidaire des décisions de tout son gouvernement."

Un soutien à faire entendre 

Pour obtenir la libération de son fondateur, l'ONG Sea Shepherd France mise aussi sur la mobilisation. L'association a ainsi lancé l'opération #FreePaulWatson, destinée à rassembler le maximum de soutiens. "L'objectif est que l'opinion publique continue de se mobiliser, que tous ceux qui ne l'ont pas encore fait signent la pétition et utilisent le hashtag #FreePaulWatson", avance la présidente de Sea Shepherd auprès de Ouest-France

Des manifestants rassemblés à Toulouse (Haute-Garonne), le 31 août 2024, pour demander la libération de Paul Watson. (ISABELLE SOURIMENT / AFP)

Quelques dizaines de personnes à Strasbourg, une soixantaine à Caen, une centaine à Toulouse... Les manifestations se sont enchaînées ces dernières semaines sur le territoire français. "On est très reconnaissants envers la France et les Français, c'est vraiment la locomotive de la mobilisation de l'opinion publique. C'est ici qu'il y a le plus de ferveur", estime Lamya Essemlali.

De quoi mettre du baume au cœur du capitaine de Sea Shepherd ? "Il commence à trouver le temps long et a un grand sentiment d'injustice. Il trouve ça surréaliste d'être encore en prison un mois après", raconte la présidente de l'ONG en France, qui a pu échanger avec lui. "Mais il se réjouit que cette affaire braque les projecteurs sur les agissements du Japon envers les baleines."

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