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"C'était ultra violent" : un opposant raconte l'évacuation de la Maison de la résistance à Bure

Six opposants au projet d'enfouissement des déchets nucléaires de Bure, dans la Meuse, ont été interpellés et placés en garde à vue, jeudi, après des échauffourées lors de la perquisition de la Maison de la résistance.

Article rédigé par franceinfo, Jérôme Jadot
Radio France
Publié Mis à jour
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La Maison de la résistance encadrée par les gendarmes, jeudi 22 février, à Bure, dans la Meuse. (JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP)

Le site de Bure, dans la Meuse, a été évacué jeudi 22 février. Au petit matin, 500 gendarmes ont investi le Bois-Lejuc, à Mandres-en-Barrois, pour y déloger les opposants au projet d'enfouissement de déchets radioactifs. "Il n'y a plus d'occupant" dans le Bois-Lejuc, a indiqué dans l'après-midi la préfecture de la Meuse.

Les autorités assurent que l'évacuation de la quinzaine d'occupants présents s'est faite dans le calme. Selon franceinfo, une personne a été interpellée dans le Bois-Lejuc puis placée en garde à vue pour avoir mis le feu à une barricade. En revanche, la perquisition de la Maison de la résistance, en fin de matinée, à quelques kilomètres de là, a été plus mouvementée. Six personnes ont été interpellés et placées en garde à vue.

Six opposants ont été interpellés à la Maison de la résistance à Bure, dans la Meuse : un reportage de Jérôme Jadot

Sylvain était à l'intérieur de la Maison de la résistance, dans le centre de Bure, lorsque les gendarmes sont entrés pour faire une perquisition. "C'était ultra violent", lâche-t-il. Selon lui, "une soixantaine de personnes" étaient présentes, elles "n'ont pas voulu cette perquisition" et "se sont barricadées dans le dortoir". 

À l'intérieur, les flics ont tout cassé au bélier. J'ai senti une main sur ma gorge et des gens ont pris des baffes.

Sylvain, opposant

à franceinfo

Cette perquisition a été ordonnée dans le cadre d'une enquête de flagrance pour des dégradations le matin même à Bure. Des accrochages ont eu lieu dans la foulée de l'évacuation du Bois-Lejuc. Les vitres de la mairie ont été caillassées et des militants cagoulés, perchés sur le toit de la Maison de la résistance, ont jeté des pierres en direction des forces de l'ordre. 

Cela fait quelques années que les opposants au projet Cigéo, prévu pour accueillir 80 000 m2 de déchets hautement radioactifs et enfouis 500 m sous terre, se sont organisés en collectif au cœur de cette maison. "Qu'est-ce que quelques jets de pierres face à la violence diffuse d'un projet qui s'installe et colonise le territoire depuis plus de 20 ans ?", s'agace Sylvain. 

L'incompréhension des opposants

Plusieurs militants sont sortis de la Maison de la résistance menottés, encadrés par des gendarmes, sous les cris de ralliement des autres opposants. Six personnes ont été placées en garde à vue pour "violences contre personnes dépositaires de l'autorité publique".

Cette opération, lancée en plein hiver, par un froid polaire, indigne Jacques Leray, le porte-parole du Collectif contre l'enfouissement des déchets radioactifs (Cedra).

Ce gouvernement, qui se targue d'être un gouvernement de concertation et de dialogue, aurait déjà pu attendre la fin de la trêve hivernale avant de virer les gens.

Jacques Leray, porte-parole du Cedra

à franceinfo

"D'autant plus qu'on a été contacté hier pour rencontrer monsieur Lecornu, du cabinet de monsieur Hulot, pour débattre de ce problème des déchets radioactifs, poursuit Jacques Leray. On ne s'attendait pas à ce que la concertation soit menée par des gens armés jusqu'aux dents."

Éviter la construction d'une ZAD

Réponse de Beauvau : la concertation n'a rien à voir avec le moment choisi pour l'évacuation. Selon le porte-parole du ministère de l'Intérieur, Frédéric de Lanouvelle, ce qui a été déterminant, c'est le projet imminent des opposants de construire dans le bois des habitations pérennes, comme à Notre-Dame-des-Landes"Ce bois était occupé, il n'était pas habité, rappelle-t-il, c'est-à-dire que les occupants illégaux ne restaient pas à temps plein, ils se relayaient. Et puis, il n'y a pas de bâtiment en dur. C'est pour cela que, juridiquement, la zone n'est pas habitée. Ils ne sont pas soumis, par exemple, à la trêve hivernale."

L'installation d'un bâtiment en dur pourrait changer les choses et rendre cette zone beaucoup plus compliquée à gérer, et la transformer davantage encore en zone de non droit.

Frédéric de Lanouvelle, porte-parole du ministère de l'Intérieur

à franceinfo

Pour éviter une nouvelle installation, l'État prévoit de maintenir des forces de l'ordre, sur place pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Cela n'a pas l'air de décourager les opposants, bien décidés à y revenir un jour.

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