: Reportage "Certaines fleurs sont déjà ouvertes" : l'inquiétude des botanistes face au bourgeonnement précoce
Dans le jardin de l'école botanique du Muséum national d'Histoire naturelle, à Paris, les exemples de bourgeonnement précoces sont multiples en ce début du mois de janvier. Mais il y en a un particulièrement marquant, c'est celui de la lithodora. "Toute la partie vert tendre, ce sont les nouvelles pousses de l'année qui commencent déjà à être bien formées, précise Olivier Poustomis, jardinier à l'école de botanique, alors que les bourgeons de cette plante ne s'ouvrent habituellement pas avant mars. Là, c'est la première année que je vois vraiment une fleur dès début janvier".
Quelques dizaines de mètres plus loin, on s'arrête cette fois devant un arbuste nommé le buisson à papier. "Il va faire des espèces de fleurs vraiment très, très bizarres qui vont vers le bas". Le constat est le même pour cette espèce : "Certaines fleurs sont déjà ouvertes, constate Olivier Poustomis. Donc là, c'est quand même assez en avance puisqu’habituellement, ça fleurit plutôt dans un mois, un mois et demi".
Une situation qui préoccupe le jardinier Olivier Poustomis. Sa principale crainte, qui a de grandes chances de se confirmer, c'est un épisode de gel qui arriverait au cours de l'hiver. "Toutes les fleurs, tous les bourgeons pourront être brûlées. Du coup, elles ne fleuriraient pas cette année".
Des plantes non adaptées au climat plus doux
Si les bourgeons de certaines plantes sont déjà en train de s'ouvrir, c'est à cause de la douceur des dernières semaines. "Les bourgeons sortent avec de l'avance, comme vous vous sortez sans cache, col ou sans manteau, parce qu'il fait doux, rappelle Marc-André Selosse, botaniste et professeur au Muséum d'Histoire naturelle. Le climat comporte des hivers moins prononcés, donc il y a des plantes qui vont démarrer en pensant que c'est le printemps. Il y a aussi des plantes qui ont eu du mal à s'arrêter. Il y a encore quelques mois, je voyais un plan de tomates qui avait refleuri. Il avait oublié que c'était l'hiver et il faisait des fruits".
"L'idée, c'est que le climat change et les plantes rentrent un peu en vrac, dans des climats que leurs ancêtres n'ont pas connus et donc auxquelles elles ne peuvent pas être adaptées", ajoute-t-il.
Avec la douceur des derniers jours, le botaniste soulève une autre conséquence : "Certaines plantes ont besoin du froid de l'hiver pour être capables de ressentir le printemps ensuite et démarrer. Ces plantes-là risquent d'avoir plus de mal à former leurs fleurs et à former leurs bourgeons au printemps. Alors ce n'est pas irrémédiable mais si ça se répète d'année en année, ce sont des choses qui risquent de les affaiblir". C'est le cas notamment des cerisiers ornementaux, très célèbres au Japon.
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