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"C'est la fin de l'aventure indépendantiste catalane menée par Carles Puigdemont", après son arrestation en Allemagne

L'historien Benoît Pellistrandi estime dimanche sur franceinfo que cette arrestation du leader catalan est "d'abord la suite logique des événements".

Article rédigé par franceinfo
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L'ancien président de Catalogne, Carles Puigdemont, ici au Parlement finlandais le 22 mars 2018. (ANTTI AIMO-KOIVISTO / LEHTIKUVA)

L'ancien président catalan Carles Puigdemont a arrêté dimanche 25 mars par la police allemande à la frontière entre le Danemark et l'Allemagne alors qu'il revenait d'un séminaire en Finlande. La justice espagnole avait émis vendredi un mandat d'arrêt européen à l'encontre de Carles Puigdemont. Benoît Pellistrandi, historien et spécialiste de l'Espagne contemporaine, a réagi à cette arrestation dimanche sur franceinfo.

franceinfo : Cette arrestation peut-elle changer la donne en Catalogne ?

Benoît Pellistrandi : Elle est d'abord la suite logique des événements qui se sont déroulés depuis plusieurs semaines. Cela veut dire qu'il n'y a plus de leaders indépendantistes actuellement en position politique de pouvoir agir. Il faut sans doute voir dans l'arrestation de Carles Puigdemont en Allemagne, une action parfaitement coordonnée entre les services espagnols et les services allemands. Il faut savoir qu'avec ce mandat d'arrêt européen, le pays dans lequel l'individu recherché est arrêté, a dans son code pénal à peu près les mêmes délits que le code pénal espagnol. C'est le cas de l'Allemagne. Il me semble que l'avenir de Carles Puigdemont sera l'extradition et la prison en Espagne où il aura un procès et effectivement la donne politique est complètement modifiée. C'est la fin de l'aventure indépendantiste [catalane] menée par Carles Puigdemont et ses alliés.

N'y a t-il pas un risque de relancer des mobilisations en Catalogne ?

Il faut bien distinguer d'un côté la question juridique avec des élus qui ont violé la Constitution et doivent répondre de cela devant la justice de leur pays, à savoir l'Espagne. Ensuite, il y a la situation politique et naturellement en Catalogne des gens vont interpréter cette action de l'État de droit comme étant de la répression. Il est évident que tout cela participe de la crise qui dure depuis un certain temps en Catalogne. Mais, il faut bien comprendre qu'à l'intérieur de l'indépendantisme il y a deux courants : le parti de Carles Puigdemont et la gauche républicaine catalane d'Oriol Junqueras. Ils n'ont pas réussi à s'entendre depuis les élections du 21 décembre pour permettre l'élection d'un nouveau président de la Généralité de Calatogne. Donc le camp indépendantiste est extraordinairement fragilisé par ces divisions internes qui sont des divisions personnelles et de tactiques personnelles des uns et des autres. Cela force l'indépendantisme à réfléchir sur son échec politique et à trouver une nouvelle stratégie et surtout à trouver de nouveaux leaders. On n'est pas sortis de la crise, mais les acteurs de ces épisodes vont devoir être remplacés par de nouveaux acteurs et une nouvelle génération, sans aucun doute.

Comment le pouvoir central à Madrid peut-il sortir de la crise ?

La solution ne pourra être qu'une solution commune espagnole consensuelle. La première question est de savoir si le cadre constitutionnel est respecté, ensuite ce cadre constitutionnel naturellement peut évoluer, il peut y avoir des réformes. Beaucoup d'Espagnols et de Catalans souhaitent une réforme de la Constitution. Les projets sont parfois contradictoires. Certains souhaitent aller vers la création d'un État fédéral, d'autres au contraire vers une sorte de recentralisation. C'est aux Espagnols de trouver la formule politique. Là ce sera sans doute un peu plus compliqué, parce que nous sommes au milieu de la législature, que la politique en Espagne est en train de bouger de façon très rapide. Si on regarde d'un point de vue strictement politicien, beaucoup de partis ont intérêt à être dans le statut-quo et à ne pas trop bouger. Il va falloir passer à cette étape que l'on appelle de la grande politique, c'est-à-dire avoir une certaine hauteur de vue, une certaine générosité. Le problème c'est que l'on a des échéances électorales qui arrivent. Tout ça complique. À court terme, je suis un peu pessimiste, mais à long terme profondément optimiste.

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