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Affaire des petits fromages magiques: aucun effet, beaucoup de victimes au Chili
La justice française vient de rendre son jugement dans l'affaire dite «des petits fromages magiques». Retour sur une arnaque à la Madoff qui a fait 5.500 victimes au Chili et sur Gilberte van Erpe, son instigatrice, une personne peu banale. Parce que du haut de ces pyramides, les escrocs vous contemplent...
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La théorie
Vous achetez un kit de préparation pour la modique somme de 369 euros. Pour ce prix, vous avez 10 sachets de ferments lactiques lyophilisés, des filtres en soie et des bourses en papier. Vous mélangez les ferments à du lait et obtenez après 12 à 16 semaines des petits fromages.
Une fois que vous avez vos petits fromages, vous les envoyez vers une société pour que ces produits, d’une grande valeur parce qu’artisanaux (puisque faits par vous), soient envoyés au Congo. Là, ils sont transformés avant d'être réexpédiés et utilisés en France par l’Oréal pour fabriquer des crèmes de beauté blanchissant la peau comme celles qu’utilisait Michael Jackson, par exemple.
C’est là que l’investissement se révèle judicieux et juteux: à l’expédition de votre précieuse production, vous êtes rétribué le double de ce que vous avez mis et vous faites 100% de bénéfice.
La réalité
Le kit de fabrication avait une valeur réelle de 40 euros. Le petit fromage obtenu était… un petit fromage (probablement même pas comestible). Le système d’expédition couvrait une escroquerie de type pyramidal. Comme toujours dans ce type d’arnaque, les premiers investisseurs sont bien rentrés dans leur investissement. En revanche, 5.500 chiliens y ont perdus de 400 à 168.000 euros se retrouvant ruinés pour certains. Cinq tonnes de fromages avariés ont été retrouvées au fond d’un entrepôt à Santiago du Chili.
Une arnaque désormais intitulée «l’escroquerie aux petits fromages magiques» (quesitos magicos en version originale, lien en espagnol). Son organisatrice, une Française aurait, elle, gagné 14,5 millions d’euros.
De Ponzi à Madoff
L’escroquerie pyramidale fut initialement inventée par un italien, Charles Ponzi, qui l'a mise en pratique à Boston au début du siècle dernier. Les arnaques de ce type répondent toujours aux mêmes critères :
-l’investissement assure un rendement inégalable où que ce soit ailleurs (et pour cause),
-l’investisseur, de bonne foi, place une mise dans le système et en fait la promotion à son entourage (c’est éventuellement l’aspect «miraculeux» du système qui devrait l’alerter),
-toutes les nouvelles personnes entrantes et s’acquittant de la somme prévue ne servent en fait qu’à payer les intérêts des premiers investisseurs...
Donc, tant qu'il y a cooptation et que le nombre d’investisseurs croît, le système fonctionne. Dès qu’il s’essouffle ou que les investisseurs veulent récupérer leur mise de départ (et non plus seulement les dividendes), tout s’écroule et l’argent est perdu. Pas pour tout le monde, puisque c’est très lucratif pour l’initiateur, s’il a pris le large à temps. Le plus célèbre successeur de Ponzi, ces dernières années, et qui a largement dépassé le maître en matière de gains, est bien sûr Bernard Madoff et ses 65 milliards de dollars en cause.
Gilberte van Erpe
Aujourd’hui âgée de 72 ans, celle qui fut aussi surnommée Madame Yaourt, est un personnage haut en couleurs, une aventurière ayant vécu plusieurs vies. Née en Syrie, elle parle cinq langues, dispose de six passeports et navigue entre l’Europe, l’Afrique et l’Amérique du sud.
Belle-sœur de l’empereur Bokassa (il a épousé une de ses sœurs), elle négocia des diamants pour lui. Dans un tout autre genre, elle fut directrice régionale des ventes pour la société de cosmétiques Avon. Troisième type de domaine, le BTP. Pour la partie avouable de son activité.
Pour celle qui l'est moins, on trouve une première apparition des «petits fromages magiques»en Belgique en 1994. Puis au Chili en 2006. Mais aussi une affaire de «champignons fermentés» au Pérou en 2003.
La France étant réputée pour ne pas extrader ses ressortissants, les Chiliens ont directement attaqué l’«escroque» à domicile: interpellée à Nice en 2008, et après deux ans de prison préventive, la justice française vient de la condamner à six ans de prison dont trois ferme.
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