Reportage "Il ne peut pas jouer les dictateurs" : en Allemagne, immersion dans la première commune dirigée par un maire du parti d'extrême droite AfD

Alors que des manifestations sont organisées en Allemagne contre l'AfD, une commune de l'ex-RDA est dirigée par le parti d'extrême droite depuis l'été dernier.
Article rédigé par franceinfo - Nathalie Versieux
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Manifestation contre l'AfD, le parti d'extrême-droite allemand, le 16 janvier 2024. (ULRICH PERREY / DPA / AFP)

Plus de 100 000 personnes sont attendues dans les rues de Berlin, samedi 3 février, pour protester contre le parti d'extrême droite AfD. Crédité de 19% des intentions de vote, l’AfD est représenté dans tous les parlements régionaux et au Bundestag. L’été dernier, Hannes Loth est devenu à Raguhn Jessnitz, une commune de 9 000 habitants en ex-RDA (République démocratique d'Allemagne), le premier maire AfD du pays.

Raguhn Jessnitz se trouve dans l'une de ces zones laminées par la fin du régime communiste. Des régions souvent acquises à l’AfD. Le maire Hannes Loth, 42 ans, se présente comme proche de ses administrés : "Je dirais que nous prenons les préoccupations et les inquiétudes des citoyens plus au sérieux qu’avant. Je marche souvent dans les rues pour montrer que je suis là, et les gens m’adressent la parole."

L’élection de Hannes Loth à Raguhn Jessnitz, en juillet dernier, a créé un choc en Allemagne. Son prédécesseur à la mairie, Nils Naumann, sans étiquette, relativise : "Ici, au niveau communal, l’AfD n’a pas beaucoup d’influence. Les décisions sont prises au final par le conseil municipal. Il ne peut pas jouer les dictateurs ou je ne sais quoi…"

"Il transforme ses mensonges en vertus"

Que la marge de manœuvre du maire soit limitée, les administrés s’en sont rapidement rendu compte. Quelques mois après le scrutin, il n’est plus question à Raguhn de gratuité pour la garde des jeunes enfants, ou de baisser taxe foncière et taxe professionnelle. Des promesses électorales du maire, assurent ses détracteurs. Des promesses jamais formulées, assure l’intéressé. Ses administrés, en tout cas, ne lui en tiennent pas rigueur : "Bon, qu’est-ce qu’on peut espérer ? Qu’est-ce qui n’augmente pas ? Qu’est-ce que le maire y peut ? Il n’y peut rien. C’est la faute de notre gouvernement !"

Eva von Angern, du parti néocommuniste die Linke, a côtoyé Hannes Loth au parlement régional de Magdebourg. Faire des promesses électorales qu’on sait ne pas pouvoir tenir, c’est à ses yeux une des caractéristiques du parti. "Il transforme ses mensonges en vertus. La différence entre les élus de l’AfD et les autres partis, je vois ça ici au parlement régional, c’est qu’ils le font sans vergogne. Ils mentent sans rougir et ce qui me fait vraiment peur, c’est que les gens les croient !", craint-elle. Trois importantes élections régionales auront lieu en ex-RDA à l’automne. Les sondages laissent entrevoir une nouvelle progression du parti d’extrême droite.

En Allemagne, immersion dans la première commune dirigée par un maire du parti d'extrême droite AfD

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