Cet article date de plus de sept ans.

La paix au Sahel au 27e sommet Afrique–France au Mali

Les 13 et 14 janvier 2017, Bamako accueille le sommet Afrique-France. Le contexte est plutôt morose avec, en arrière-plan, la menace terroriste partout en Afrique. Sur le plan économique, beaucoup de pays africains s’affranchissent de la puissance française. Alors, un sommet pour rien?
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Logo du sommet Bamako 2017 (DR)

Le sommet France-Afrique né en 1973 est devenu Afrique-France en 1981. Un tour de passe-passe qui n’impressionne pas la société civile. Pour la Coalition internationale des sans-papiers et migrants (CISPM), «il est révoltant et risible à la fois de voir que depuis le 1er sommet en 1973 sous la présidence Pompidou, ces rencontres au sommet affichent, sous une appellation ou une autre, les trois mêmes sujets: dialogue, sécurité, développement. Depuis que les sommets France-Afrique existent, rien en Afrique n’a vraiment changé. Pire, presque tout a empiré, prédation, corruption, dictature, déni de démocratie»
 
Un sommet honteux?
Le chroniqueur du Monde Afrique, Laurent Bigot, est tout aussi virulent. «Si le débat sur l’utilité d’un tel sommet est légitime, ce qui me dérange le plus, c’est de le voir se tenir au Mali. Le Mali incarne à lui seul le mal qui ronge la sous-région: un pouvoir politique qui a fait de l’incurie sa marque de fabrique, une clique de kleptocrates qui ont mis en coupe réglée le pays et les logiques mafieuses qui sont désormais les seules qui prévalent dans tous les secteurs d’activité.» Aux yeux de Laurent Bigot, tout cela explique que les opinions publiques, notamment les jeunes, voient la France et la communauté internationale comme complices de ces actes.

La France dévaluée
La France ne parvient pas à faire remonter sa cote de popularité en Afrique. Les opérations Serval et Barkhane ont renvoyé l’image d’une puissance néocoloniale, surtout chez les jeunes souvent séduits par les discours patriotiques, voir djihadistes. L’association Survie dans un rapport intitulé Cinq guerres pour un empire est particulièrement critique vis-à-vis de l’interventionnisme militaire français en Afrique. «Ces opérations demeurent particulièrement discutables. On remarque ainsi que, bien loin de résoudre les crises, celles-ci contribuent à les aggraver et à en créer de nouvelles.»

Patrouille française de l'opération barkhane à Kidal au Mali. (AFP)
 
L’économie à la traîne
La France est également de moins en moins présente sur la scène économique africaine. Bien éloignée du dynamisme chinois, elle n’est plus le pays incontournable, même en Afrique francophone. Au point que le patron des patrons français, Pierre Gattaz, a lancé la reconquête. «L’Afrique, c’est important qu’on y soit. Il faut qu’on aide nos amis africains, sans aucune arrogance. L’idée, c’est de faire tout ça en grande humilité. On n’a pas de leçons à donner à qui que ce soit», a-t-il  déclaré à Géopolis.

Ajouter à cela la suspicion grandissante vis-à-vis du franc CFA, et vous avez un tableau très sombre de l’influence économique française. Une monnaie garante d’une stabilité financière rare, mais accusée par certains d’être un frein au développement.
 
Un sommet sous haute sécurité
10.000 hommes sont mobilisés pour protéger la trentaine de chefs d’Etat attendus. Car malgré l’opération Barkhane, malgré la formation à tour de bras de 20.000 militaires africains par an, le calme est loin d’être rétabli dans la zone sahélienne. Le récent enlèvement, la veille de Noël, d’une humanitaire française à Gao, prouve que les terroristes sont actifs et libres de leurs mouvements. On parle du groupe al-Mourabitoune dirigé par Mokhtar Belmokhtar, un chef donné plusieurs fois mort, mais qui réapparaît sans cesse. En novembre 2016,un attentat au camion piégé avait visé l’aéroport de Bamako, détruisant les bureaux de l’ONU. 

Mais ce sommet de Bamako revêt un double symbole. D’abord, il marque l’ultime voyage en terre africaine du président Hollande. Une Afrique qui de Tombouctou à Bangui aura mobilisé les troupes françaises et rempli l’agenda du Président. L’autre symbole est malien. En 2012, les djihadistes pavanaient dans Tombouctou. Cinq ans plus tard, le pays est encore debout ce que ne manquera sûrement pas de souligner son président, Ibrahim Boubacar Keita.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.