Législatives au Portugal : 50 ans après la Révolution des œillets, l’extrême droite gagne du terrain dans l'opinion
Il y a 50 ans, le 25 avril 1974, deux cents capitaines de l'armée menaient le soulèvement contre le pouvoir salazariste, la célèbre Révolution des œillets. Castro Carneiro est l'un d'entre eux. Il garde dans son bureau des œillets rouges, symboles de la révolution. "Mon père, très catholique, et ma mère adoraient Salazar. Juste avant le 25 avril, j'ai envoyé ma femme chez mon père qui habitait à Porto. Quand elle lui a dit que j'étais en train de préparer la révolution, mon père l'a engueulée. Si le 25 avril a mis fin au fascisme, il n'a pas supprimé les fascistes."
Les bureaux de vote ont ouvert dimanche 10 mars au Portugal, pour des élections législatives. Selon les derniers sondages, l'Alliance démocratique (AD), de centre droit, pourrait revenir au pouvoir, devant le Parti socialiste qui gouvernait depuis huit ans. L'autre grand gagnant de ces élections pourrait être le parti d'extrême droite Chega, créé en 2019. Il pourrait doubler les 7% de suffrages obtenus il y a deux ans à l'issue de ces élections.
"Les jeunes n'ont pas conscience de ce qu'était la dictature"
Lors d'un congrès de Chega en 2021, le leader du parti Andre Ventura a même utilisé la vieille devise de la dictature : "Dieu, patrie, famille", et y a ajouté le mot "travail". Alors le retour de l'extrême droite au pouvoir, Castro Carneiro le redoute énormément. "Le Portugal n'est pas du tout à l'abri, au contraire. Quand je vais témoigner dans les écoles, je me sens un peu comme un animal qu'on voit au zoo. Les jeunes n'ont pas conscience de ce qu'était la dictature, le fascisme."
Cette conscience, Manuela Matos Monteiro, l'a en elle, ancrée profondément."C'est une situation où on vit toujours avec la peur, avec le sentiment d'être surveillé, témoigne celle qui organisait des réunions secrètes et des tractages interdits pendant la dictature. Vous ne pouvez pas lire certains livres, vous ne pouvez pas voir certains films. La mémoire, c'est très important, mais c'est aussi très difficile à transmettre, parce que c'est seulement quand tu es privé de liberté que tu sais ce qu'est la liberté."
"Célébrer le 50e anniversaire du 25 avril [date de la chute de la dictature] dans ce contexte me laisse perplexe", conclut-elle. Selon une récente étude universitaire, les électeurs les plus séduits par Chega aujourd'hui sont aussi les plus nostalgiques de la dictature de Salazar.
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