Envoi de troupes en Ukraine : pourquoi l’Allemagne n'est pas sur la même ligne que la France ?

Le chancelier allemand Olaf Scholz a rejeté mardi l'éventualité d'un envoi de troupes européennes sur le front ukrainien, évoquée par Emmanuel Macron.
Article rédigé par franceinfo, Frédéric Says
Radio France
Publié
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Le chancelier allemand Olaf Scholz a affirmé qu'"aucun soldat" ne serait envoyé en Ukraine par des pays d'Europe ou de l'Otan. (CHRISTOPH SCHMIDT / DPA)

Au lendemain des déclarations d'Emmanuel Macron n'excluant pas l'envoi de troupes au sol en Ukraine, le chancelier allemand a pris le contre-pied du chef d'État français mardi 27 février. Olaf Scholz a déclaré "qu'il n'y aura aucune troupe au sol, aucun soldat envoyé ni par les États européens, ni par les États de l'Otan sur le sol ukrainien".

Le chancelier refuse aussi de fournir des missiles longue portée à l'Ukraine, des missiles Taurus d'une portée de 400 kilomètres. Depuis des mois, l'Ukraine demande la livraison de ces missiles pour frapper des cibles russes positionnées loin derrière le front, comme des dépôts de munition, des postes de commandement et des axes névralgiques. Ces armes de précision, larguées par avion, sont capables d’atteindre un objectif situé à plus de 500 kilomètres, soit deux fois plus loin que les Storm Shadow et Scalp français et britanniques déjà livrés aux troupes de Kiev.

L'opposition conservatrice et certains partenaires de la coalition pressent le chancelier de fournir ces missiles. Mais Olaf Scholz reste inflexible. L'armée et les soldats allemands ne doivent pas être associés aux objectifs atteints par ces missiles, affirme-t-il. Il n'est pas question que l'Allemagne se retrouve, d'une certaine manière, directement impliquée dans la guerre, indique le chancelier, qui redoute "une escalade dans le conflit".

Cette année, l'Allemagne s'est engagée à livrer à l'Ukraine quatre systèmes de défense aérienne Iris-T, des mines antichars et 140 000 obus d’artillerie.

Une prudence critiquée par Emmanuel Macron

Cette prudence n'est pas du goût d'Emmanuel Macron. Lundi soir, le chef de l'État, au cours de sa conférence de presse, a regretté l'attentisme de certains pays : "Beaucoup de gens qui disent 'jamais' aujourd'hui étaient les mêmes qui disaient 'jamais des tanks', 'jamais des avions', 'jamais des missiles de longue portée' il y a deux ans. Je vous rappelle qu'il y a deux ans, beaucoup autour de cette table disaient : 'Nous allons proposer des sacs de couchage et des casques'", a souligné le chef de l'État.

L'Allemagne n'est pas nommée mais elle est clairement visée car il s'agit d'une allusion à la première initiative allemande, au tout début de l'invasion russe, d'envoyer des casques aux Ukrainiens et non pas d'armement. C'est un exemple souvent utilisé désormais dans les cercles diplomatiques européens pour souligner les atermoiements allemands, comme si Berlin n'avait pas tout de suite pris la mesure de ce conflit.

Par ses déclarations très offensives, Emmanuel Macron tente aussi de faire oublier ses propres hésitations. Au début de la guerre, il avait appelé à ne pas humilier la Russie. Cette tonalité tout en retenue est donc désormais bel et bien révolue.

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